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Liban

L’opposition en rangs dispersés aux municipales

Portrait du Premier ministre libanais Rafic Hariri, le 14 février 2001 à Paris, qui est en visite officielle en France pour deux jours. 

		(photo: AFP)
Portrait du Premier ministre libanais Rafic Hariri, le 14 février 2001 à Paris, qui est en visite officielle en France pour deux jours.
(photo: AFP)
Les deuxièmes élections municipales de l’après-guerre commencent ce dimanche au Liban. D’âpres batailles sont prévues dans de nombreuses villes et localités, mais les divisions de l’opposition, notamment chrétienne, font que ce scrutin ne remettra pas en cause la stabilité du régime soutenu par la Syrie.
De notre correspondant à Beyrouth

Les 2, 9,23 et 30 mai, 2,7 millions de Libanais sont appelés aux urnes pour choisir leurs élus locaux dans plus d’un millier de communes. Loin de constituer une source d’inquiétude pour le pouvoir libanais appuyé par la Syrie, ce deuxième scrutin municipal de l’après-guerre pourrait, au contraire, renforcer sa légitimité. Les divisions de l’opposition libanaise, plus particulièrement celles des chrétiens, empêcheront vraisemblablement l’émergence d’un contre-pouvoir susceptible de menacer la stabilité du régime. Celui-ci aura à son actif le mérite d’avoir organisé une consultation populaire dont les préparatifs se sont déroulés, jusqu’à présent, d’une manière plutôt satisfaisante.

Ce dimanche, ce sont les électeurs des 303 localités du Mont-Liban, une région à majorité chrétienne censée être le fief de l’opposition, qui doivent élire les membres de leurs Conseils municipaux, ainsi que leurs moukhtars, sorte d’officiers de l’état civil. Mais cette opposition, qui réclame depuis des années le retrait des troupes syriennes et le départ de la classe politique au pouvoir avec la bénédiction de Damas depuis la fin de la guerre, a été incapable d’élaborer un programme électoral commun.

Dans la plupart des localités, les considérations d’ordre familial et clanique l’ont emporté sur les alliances politiques, et certaines figures de l’opposition ont fait primer l’action traditionnelle sur le discours politique qu’elles tenaient depuis des années. Ainsi au lieu d’unir leurs forces dans le Metn, principal bastion de l’opposition, les partisans del’ancien chef du gouvernement, le général Michel Aoun (en exil en France), et ceux de l’ex-président de la République Amine Gemayel, mènent la bataille dans des listes séparées. Même schéma dans les villes de Jounié, chef-lieu du caza du Kesrouan (une subdivision administrative équivalente au canton) et Byblos, la capitale de Jbeil. Là aussi, le divorce est pratiquement consommé entre les partisans du général Aoun et ceux du Rassemblement de Kornet Chehwan, qui regroupe les principales figures de l’opposition chrétienne. Non seulement les deux camps ont décidé de ne pas unir leurs forces, mais ils se lancent des accusations en public à la grande satisfaction des loyalistes qui se frottent les mains.

La chance inouïe de Hariri

A Beyrouth, l’opposition a laissé passer une occasion qui ne se présentera pas avant longtemps de rafler la majorité des 24 sièges du Conseil municipal de la capitale, aujourd’hui contrôlé par le Premier ministre Rafic Hariri. Des querelles et des divergences entre les rivaux sunnites de Hariri (l’ancien Premier ministre Salim Hoss et l’ex-député Tammam Salam) d’une part, et les partisans de Michel Aoun et de l’ancien député opposant Najah Wakim de l’autre, ont provoqué l’échec des efforts entrepris pour la Constitution d’une liste de coalition. La seule personnalité sunnite capable de diriger cette liste d’entente, Assem Salam (ancien président de l’Ordre des ingénieurs) a jeté l’éponge, Salim Hoss s’est retiré de la bataille et Tamman Salam a changé de camp. Une personnalité sunnite de second plan, Khaled Daouk, conduira, le 9 mai, une liste de l’opposition considérablement affaiblie qui aura toutes les peines du monde à percer la liste béton formée par Rafic Hariri.

Le Hezbollah, au plus haut de sa popularité après l’échange de prisonniers avec Israël, en janvier, et en raison des aides multiformes apportées par ses associations à des milliers de familles, n’a aucun souci à se faire. Le parti islamiste qui contrôle actuellement plus d’une centaine de localités, dont l’une des plus importantes municipalités du Liban (celle de Ghobeiri, dans la banlieue-sud de Beyrouth), pourrait voir sa part grossir, à l’issue du scrutin du 23 mai. En effet, son principal rival chiite, le Mouvement Amal du président de la Chambre Nabih Berry, n’est pas dans sa meilleure forme. Miné par les exclusions et les départs de cadres supérieurs, discrédité par les soupçons de corruption qui planent sur plusieurs de ses hauts responsables, Amal est plus affaibli que jamais.

Autre personne qui peut dormir sur ses lauriers, le chef druze Walid Joumblatt. Il est assuré de rafler la majorité des127 municipalités de la Montagne où les listes de coalition druzo-chrétiennes qu’ils parrainent n’auront aucun difficulté à se faire élire grâce notamment aux votes des chrétiens… qu’il avait chassés de leurs villages, il y a 20 ans.

par Paul  Khalifeh

Article publié le 01/05/2004 Dernière mise à jour le 03/05/2004 à 09:20 TU