Euro 2004
La France dans la souffrance
(Photo : AFP)
Mission accomplie. L’équipe de France partie au Portugal avec pour seule ambition de conserver la couronne européenne conquise il y a quatre ans a franchi le premier cap, celui du premier tour . A son bilan deux victoires, contre l’Angleterre et la Suisse, et un nul face à la Croatie, sept buts marqués pour quatre encaissés, et la première place de son groupe. Lu d’une manière linéaire le bilan des Bleus pourrait paraître largement positif, d’autant que la bande à Jacques Santini poursuit sa série de matches sans défaite ( 26 avant le quart de finale contre la Grèce). Et pourtant, passée l’euphorie d’une victoire in extremis contre l’Angleterre le premier jour, le sentiment général est que les feux ne sont pas au vert mais à l’orange, comme si on se trouvait en état d’alerte permanent.
Face à la Suisse, l’équipe de France, réorganisée au milieu de terrain à la demande des joueurs avec un Robert Pires sur le côté gauche et un Zidane à droite, n’a pas plus convaincu que lors de ses sorties précédentes. Non seulement elle n’a pas trouvé son équilibre au milieu de terrain avec un Zidane qui souhaite désormais jouer dans l’axe, uniquement dans l’axe, et ni à gauche, ni à droite, mais elle a laissé entrevoir de grosses lacunes défensives où seul Lilian Thuram a tenu son rang. Mikaël Silvestre, au centre, a, à plusieurs reprises, contre la Suisse comme contre l’Angleterre, commis quelques bévues qui ont soit permis à l’adversaire de marquer, soit mis la défense en grand danger. Les latéraux n’ont pas davantage été décisifs. Devant, il a fallu attendre le dernier quart d’heure du troisième match pour retrouver un Thierry Henry buteur. Visiblement son entente avec l’autre buteur-maison, David Trezeguet, est loin d’être parfaite. Un Trezeguet quasiment transparent depuis le début de la compétition, sauf au moment de l’égalisation face à la Croatie. La France a donc passé le premier tour dans la souffrance, laissant dans son sillage une collection de points d’interrogation. Qui seront peut-être oubliés si le onze tricolore poursuit le chemin qu’il s’est tracé ; qui seront source de remises en question en cas d’échec.
La France a perdu son âme. Et Zidane, auteur de trois buts et demi (deux contre l’Angleterre, un contre la Suisse, et un demi contre la Croatie sa frappe étant déviée dans le but par un défenseur), n’a pas eu tout à fait son rayonnement habituel. Un peu meilleur que ces derniers mois à Madrid, pas aussi rayonnant qu’on l’espérait. Pour une raison difficile à comprendre, l’équipe de France boitille. On la croyait, avant l’Euro, armée psychologiquement et physiquement pour gommer les erreurs d’il y a deux ans. Et si le mal collectif s’appelait tout simplement saturation. Les centenaires en sélections ne sont-ils pas victime de l’usure des matches à répétition, des matches à enjeux, victime de la pression d’un public qui en réclame toujours plus. Jusqu’à présent, la France au Portugal n’a pas montré qu’elle était capable de dépassement. On peut toujours se référer à la célèbre formule : « qui veut aller loin ménage sa monture… ». En l’occurrence, ce serait plutôt le cavalier qui donnerait des signes de faiblesse.
par Gérard Dreyfus
Article publié le 22/06/2004 Dernière mise à jour le 22/06/2004 à 10:36 TU