Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Liban

De l’espoir pour les réfugiés palestiniens

Dès leur arrivée à Beyrouth, le chef de l'OLP Mahmoud Abbas (3e D) et le Premier ministre palestinien Ahmed Qoreï (C) se sont rendus au cimetière du camp de réfugiés de Chatila en compagnie du ministre libanais des Affaires étrangères Mahmoud Hammoud (2e G). 

		(Photo : AFP)
Dès leur arrivée à Beyrouth, le chef de l'OLP Mahmoud Abbas (3e D) et le Premier ministre palestinien Ahmed Qoreï (C) se sont rendus au cimetière du camp de réfugiés de Chatila en compagnie du ministre libanais des Affaires étrangères Mahmoud Hammoud (2e G).
(Photo : AFP)
La visite à Damas puis à Beyrouth d’une délégation de la nouvelle direction palestinienne redonne l’espoir aux centaines de milliers de réfugiés installés dans ces deux pays d’une amélioration de leurs conditions de vie difficiles. Il s’agit aussi du premier geste politique concret de l’Autorité palestinienne dans leur direction depuis les accords d’Oslo.

De notre correspondant à Beyrouth.

«Je crois que nous avons donné un excellent départ à nos relations, afin de pouvoir nous consulter sur les affaires communes, d’autant que nous, ainsi que le Liban et la Syrie, avons encore des territoires occupés.» C’est ainsi que Mahmoud Abbas a résumé la visite qu’il a commencée mercredi à Beyrouth en compagnie du Premier ministre palestinien, Ahmed Qoreï. Ce dernier a déclaré qu’il avait réclamé aux autorités libanaises l’ouverture d’une ambassade à Beyrouth. Le Liban a promis d’étudier la demande.

A leur arrivée à l’aéroport, les deux hommes ont été accueillis avec tous les honneurs. Ils se sont rendus immédiatement au cimetière du camp de réfugiés de Chatila, pour rendre hommage à la mémoire des victimes des massacres commis lors de l’invasion israélienne de 1982. Ils ont ensuite pris le chemin du palais présidentiel pour un entretien avec le chef de l’Etat. Émile Lahoud a exprimé le soutien du Liban au peuple palestinien dans «sa lutte pour le recouvrement de ses droits, dont celui au retour».

Un quart de siècle de brouilles et de malentendus

Mahmoud Abbas, lui, a exposé à ses interlocuteurs libanais la politique que compte adopter la nouvelle direction palestinienne depuis la disparition de Yasser Arafat. La priorité reste à l’entente interne, a-t-il souligné. Mais les consultations sont nécessaires avec toutes parties arabes dans une période aussi délicate. La délégation palestinienne s’est également entretenue avec le président de la Chambre Nabih Berry, et le président du Conseil, Omar Karamé.

Comme en Syrie la veille, Libanais et Palestiniens ont mis l’accent sur l’ouverture d’une page nouvelle dans leurs relations. Cet apaisement intervient après un quart de siècle de brouilles et de malentendus provoqués par le rôle joué par les Palestiniens durant la guerre civile libanaise (1975-1990) et alimentés par l’aversion entretenue par le régime syrien à l’égard de Yasser Arafat. Or comme le Liban aligne sa politique étrangère sur celle de Damas, il avait pratiquement rompu toute relation avec l’Autorité palestinienne depuis la signature des accords d’Oslo, en 1993. Le régime syrien ayant décidé d’ouvrir une nouvelle page avec les Palestiniens pour sortir de son isolement, Beyrouth lui a alors emboîté le pas sans se faire prier.

Vie précaire dans les camps

Il faut dire qu’entre Libanais et Palestiniens, les dossiers à étudier sont nombreux. La présence depuis 1948 au Liban de 400 000 réfugiés palestiniens, soit 10% de la population, est déjà une question assez complexe. Certes, le Liban est le seul pays où les Palestiniens conservent leurs armes (à l’intérieur des camps), mais c’est aussi le seul Etat où les réfugiés sont privés de leurs droits civiques les plus élémentaires. Soixante-dix métiers leur sont interdits, de même que le droit d’acquérir un bien immobilier où de construire en dur dans les douze camps où vivent plus de deux cent mille personnes dans des conditions particulièrement difficiles, voire précaires.

C’est pour s’enquérir des besoins des réfugiés que la délégation palestinienne s’est rendue ce jeudi dans les camps du Sud-Liban où vivent plus de cent mille personnes. Une occasion pour rencontrer les chefs locaux et les représentants des différentes organisations, comme ce fut le cas en début de semaine, à Damas.

La situation dans les camps avait déjà été évoquée lors de la venue à Beyrouth, il y a une dizaine de jours, de Farouk Kaddoumi, le successeur d’Arafat à la tête du Fatah. Après cette visite, les autorités libanaises avaient décidé d’autoriser l’utilisation du ciment dans les camps. Ce qui devrait permettre aux réfugiés de construire des maisons en béton. Cette tendance s’est confirmée lors des entretiens de Mahmoud Abbas et Ahmed Qoreï à Beyrouth.

La question des subventions

La partie libanaise a également promis d’alléger le dispositif de sécurité assez sévère mis en place autour des camps. En contrepartie, les organisations palestiniennes devraient faire un effort et cesser de permettre aux camps de servir de refuge aux hors-la-loi.

Au-delà de la dimension humaine, la tournée de la délégation palestinienne comportait également un aspect politique interne. Depuis le conflit ouvert entre le Fatah de Yasser Arafat et les organisations pro-syriennes, les camps du Liban (sauf ceux de Aïn Héloué et de Rachidiyé) et de Syrie échappent au contrôle du Fatah, qui avait d’ailleurs décidé d’arrêter les subventions que l’OLP verse aux différentes organisations qui en sont membres. Cela avait provoqué de nombreux conflits entre les différentes factions dans les camps. Or, depuis la dernière visite de Kaddoumi à Damas et Beyrouth, la voie en vue du règlement de ce contentieux avait été ouverte. La nouvelle direction a promis de recommencer à verser les subventions dues aux organisations pro-syriennes, en contrepartie d’une reconnaissance de l’autorité de l’OLP dans les camps du Liban.

À la recherche d’une légitimité interne et régionale, la nouvelle direction palestinienne a donc mené une opération de marketing qui semble avoir donné ses fruits… pour l’instant.



par Paul  Khalifeh

Article publié le 09/12/2004 Dernière mise à jour le 09/12/2004 à 07:23 TU