Château de Versailles
La galerie des Glaces se refait une beauté
®Phototèque Vinci
Angelot, décor de voûte : l'état des peintures révèle une restauration datant du XiXè siècle. (Photo : Dominique Raizon/RFI) |
«Sorte de royale beauté unique dans le monde»
Nettoyage du décor de la voûte. (Photo : Augusto Da Silva-Graphix Images/Phototèque Vinci) |
En quelques chiffres on comprend l’ampleur de la tâche: la galerie mesure pas moins de 73 mètres de long sur 10,50 mètres de large, et 12,30 mètres de haut. Dix-sept fenêtres ouvrent sur le jardin, et répondent aux dix-sept arcades ornées chacune de vingt et une glaces pour augmenter la profondeur de la galerie, refléter l’éclairage naturel des fenêtres, magnifier l’image et l’atmosphère des réceptions qui se répètent à l’infini dans les jeux de miroir. D’une dimension exceptionnelle, ces 357 miroirs avaient été réalisés à l’origine par une manufacture parisienne créée par Colbert pour concurrencer les produits de Venise. Ils vont être vérifiés un à un, et les glaces endommagées seront remplacées à l’identique par des glaces au mercure, biseautées, achetées aux magasins du palais du Sénat. Un nouvel éclairage de la voûte par 359 sources lumineuses froides de sept types différents pour créer un halo diffus devrait ajouter à la luminosité extérieure.
Vaste chantier où prévalent fidélité esthétique et fidélité historique
Fragilité structurelle d'une peinture sur toile marouflée XVIIè. «Faste des puissances voisines de la France» (Photo : Dominique Raizon/RFI) |
Et puis parallèlement, 1 000 mètres carrés de sculptures, de dorures et de peintures sont soumis à expertise et à réparation. Ce sont les dorures (trophées, cartouches, guirlandes) qui magnifient la voûte de la galerie: «Le principal travail au départ est de nettoyer pour faire apparaître les différents types d’or, le second est de conserver ; on ne refait pas, on redonne tout au plus une cohérence à l’ensemble quand on a une perte de lecture», explique Lucien Mariotti, responsable du chantier des dorures, «au besoin on fait une retouche ponctuelle ou un glacis d’aquarelle pour assurer une homogénéité».
Les peintures, quant à elles, altérées par le temps, les intempéries (toute la façade ouest a subi deux cents ans de manque d’étanchéité de la toiture) et les éclairages à la bougie qui ont noirci les toiles, vont faire l’objet d’un décrassage et de consolidation des pièces fragilisées (lacunes et accidents), afin de redonner à l’image sont unité d’origine. Les repeints et les vernis font également l’objet d’une inspection soigneuse. «Pour mener à bien l’entreprise, les toiles actuelles sont soigneusement comparées aux gravures à valeur documentaire laissées par Massé car les commissaires scientifiques et les restaurateurs ont à cœur de rester au plus près du desiderata de Charles Le Brun», explique Véronique Stedman, restauratrice des peintures et responsable de ce chantier aux côtés de Cinzia Pasquali.
Douze millions d’euros, mécénat le plus grand jamais engagé en FranceCharles Le Brun fut le premier peintre du roi, et son oeuvre a été avant tout au service de la politique royale; il s’agit ainsi d’être esthétiquement fidèle au peintre, mais également de se rapprocher au plus près de la vérité historique de ces toiles qui relatent les grandes victoires de Louis XIV (autour de la grande peinture centrale titrée par Racine Le roi gouverne par lui-même, ce sont par exemple, La prééminence de la France reconnue par l’Espagne, La résolution prise de faire la guerre aux Hollandais), ainsi que ses actions de politique intérieure (arrêt des duels, réformes de la Justice).
Nettoyage des peintures de la voûte. ©Graphix Images/Phototèque Vinci |
Le chantier, d’un coût global évalué à douze millions d’euros, sera suivi par un conseil scientifique constitué d’éminents spécialistes de la peinture du XVIIèmesiècle, de restaurateurs européens, et de responsables de musées européens. Il s’agit là d’un mécénat culturel de compétences, le plus grand jamais engagé en France: ce nouveau type de partenariat engage le mécène au-delà de l’aspect financier puisqu’il associe les compétences techniques des entreprises spécialisées, qualifiées Monuments historiques, qui vont apporter leur savoir-faire sur le chantier. Cette complémentarité d’action publique-privée prolonge l’idée d’une nécessaire collaboration déjà imaginée par André Malraux dans les années 1960, alors qu’il était ministre de la Culture.
par Dominique Raizon
Article publié le 31/01/2005 Dernière mise à jour le 31/01/2005 à 12:53 TU
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