Internet grand public
La BNF met en ligne les archives de la presse
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«Rendre mieux accessible la mémoire de la presse française».Voilà comment le président de la Bibliothèque nationale de France, Jean-Noël Jeanneney, a présenté le vaste chantier de numérisation de la presse française qui prévoit de mettre en ligne l’essentiel des titres sur plus d’un siècle, de la Restauration jusqu’en 1944. Dès 2006, seront consultables sur Gallica, le site web de la BNF quatre premiers quotidiens aux sensibilités bien différentes, dont Le Figaro (depuis sa naissance en 1826), La Croix (1833), L'Humanité (1904) et Le Temps (1861).
Dix huit autres journaux, au rythme de deux à trois titres complets, par an, seront ensuite numérisés, dont Le Journal des débats, Le Constitutionnel, La Presse, Le Siècle, Le Petit Journal, Le Petit Parisien, Le Matin, Ouest-Eclair, L'Action française et L'Aurore. A terme, 3,2 millions de pages seront accessibles en ligne sur le site de Gallica qui propose déjà en ligne 76 000 textes du patrimoine littéraire.
«Une domination écrasante de l'Amérique»
Le chantier s’arrête pour l’instant à 1944 en raison de la coupure de la Libération et aussi des problèmes juridiques liés aux droits d’auteur. Le projet sur cinq ans (2005-2009) doit être financé à hauteur de 3,5 millions d’euros prélevés sur le budget de la BNF. Le Sénat apporte également une aide de 150 000 euros par an, et la BNF espère convaincre d’autres contributeurs.
L’objectif de ce programme est de «protéger un patrimoine spécialement fragile en raison des problèmes d’acidification du papier et de sa mauvaise qualité». Il s’agit également de proposer une alternative au projet pharaonique de Google de mettre en ligne d’ici à 2015 une quinzaine de millions d’ouvrages. En décembre 2004, le leader de la recherche sur le Net a passé un accord avec les bibliothèques des universités américaines d’Harvard, Stanford, du Michigan, l’université britannique d’Oxford et la Bibliothèque de New York. Au total, ce sont près de 4,5 milliards de pages qui seront disponibles sur les répertoires de Google. Le tout pourrait prendre dix ans, pour un coût estimé entre 150 et 200 millions de dollars. A titre de comparaison, la BNF dépense chaque année pour sa bibliothèque virtuelle Gallica un millième de cette somme.
Ce projet de Google va apparemment dans le sens de «la grande bibliothèque immatérielle» rêvée depuis longtemps, capable de fournir à tous l'ensemble des savoirs du monde: c'est en tout cas la thèse généralement défendue outre-atlantique. Le son de cloche est différent en France. Cette initiative de Google risque d'aboutir à «une domination écrasante de l'Amérique dans la définition de l'idée que les prochaines générations se feront du monde» a estimé le président de la BNF, Jean-Noël Jeanneney, dans une tribune au journal Le Monde. Selon le patron de la BNF, l’Europe et notamment la France doivent s’organiser pour assurer une présence face à l’offre massive de Google. Dans cette perspective, Jean-Noël Jeanneney appelle à «une décision politique» de la part des instances de l'Union européenne pour «faire un grand effort de numérisation des collections».
par Myriam Berber
Article publié le 18/02/2005 Dernière mise à jour le 18/02/2005 à 16:56 TU