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Leica frappé par la révolution numérique

Le fabriquant allemand Leica, avec son célèbre format 24x36 mm, a révolutionné l'histoire de la photographie.(Photo : AFP)
Le fabriquant allemand Leica, avec son célèbre format 24x36 mm, a révolutionné l'histoire de la photographie.
(Photo : AFP)
Après l’Américain Kodak, le Belge Agfa-Gevaert, le Britannique Ilford, c’est au tour du fabricant allemand Leica Camera, rendu célèbre par Henri Cartier-Bresson, de tourner la page de l’argentique. Faute d’avoir su prendre à temps le virage du numérique, la société Leica enregistre de lourdes pertes et s’enfonce dans la crise. Le groupe doit aujourd’hui mener sa reconversion au pas de charge.

C’est devenu une habitude. Depuis plusieurs mois, nombre de fabricants de photo accusent de lourdes pertes. Le mouvement s’est même accéléré en 2004. Dernière victime en date : Leica Camera. Malmené par l’envolée du numérique, le prestigieux fabricant d’appareils photo allemand, l’une des marques les plus réputées pour la photographie, annonce une perte nette à venir d’au moins 10 millions d’euros sur son exercice 2004/05 en cours. Résultat : six de ses banques créancières ont décidé d’annuler en partie leurs lignes de crédit.

«Les lignes de crédit restantes couvrent encore les besoins de trésorerie», a précisé la société dans un communiqué, en soulignant que la direction était en négociation avec les banques créancières pour trouver une solution transitoire jusqu’à l’assemblée générale d’actionnaires prévue le 31 mai prochain. A cette occasion, une nouvelle recapitalisation de l’entreprise doit être discutée. Ce n’est pas la première pour le groupe allemand, qui avait déjà émis l’an passé un emprunt à hauteur de 15 millions d’euros.

Le 24x36, un standard mondial

Cent ans après la fabrication du célèbre format 24x36 mm en argentique, c’est une page d'histoire qui se tourne. En 1905, les appareils photo sont encombrants et difficilement transportables. Un ingénieur de la société, Leica Oskar Barnack, a l’idée d’utiliser des négatifs plus petits pour fabriquer un prototype de poche. L’appareil devient vite mythique. Le modèle est adopté par les plus grands, l’Australien Helmut Newton et surtout le Français Henri Cartier-Bresson, dont le Leica devient l’appareil fétiche et dont les photos feront beaucoup pour la notoriété de la marque. Ce fameux modèle est encore utilisé aujourd’hui dans la plupart des appareils photo argentiques traditionnels.

Cette crise à Leica est également la conséquence économique d’un virage industriel négocié trop tardivement. En optant pour le numérique bien après ses concurrents, le fabricant allemand est obligé de mener sa reconversion au pas de charge. Ses appareils numériques sont arrivés trop tard, et leur prix n’est pas justifié par la notoriété Leica comme dans l’argentique.

L’an passé, d’autres symboles de la photographie traditionnelle ont été contraints à des dépôts de bilan accompagnés de suppressions d’emplois. En 2004, le Belge Afga-Geavert a vendu ses activités photo. La crise n’a pas épargné le Britannique Ilford qui a également abandonné sa division «pellicules en noir et blanc et papiers photographiques» basée en Grande-Bretagne. D’autres tentent de se convertir, le groupe américain Kodak a annoncé, dès 2003, qu’il cessait tout investissement dans le film argentique traditionnel pour se recentrer sur le numérique, au prix d’une suppression de milliers d’emplois. Kodak devrait consacrer près de 3 milliards de dollars en acquisitions pour opérer ce virage.

Face au succès spectaculaire du numérique, l’argentique a du mal à tenir le coup. Le marché mondial des appareils numériques a triplé en trois ans, passant de 18,5 millions d’unités en 2001 à 50 millions en 2003. Avec un taux de progression de 100%, l’Europe est devenue le premier marché mondial des appareils numériques, devant les Etats-Unis et le Japon. L’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France sont à l’heure actuelle les principaux pays consommateurs sur le marché européen. Avec en plus une donnée nouvelle, la forte progression chez les professionnels. Après avoir acquis, le statut de produit grand public, le numérique est en train de conquérir les professionnels. Car aujourd’hui, grâce aux très importantes évolutions de la technologie, le numérique soutient dans bien des domaines la comparaison avec la photographie traditionnelle.


par Myriam  Berber

Article publié le 23/02/2005 Dernière mise à jour le 23/02/2005 à 16:29 TU