Fespaco 2005
Le rideau tombe sur le 19e Fespaco
(Photo : AFP)
De notre envoyée spéciale à Ouagadougou
Le Fespaco s’est achevé comme il a commencé, par une grande cérémonie dans le stade du 4 août. Deux films sud-africains, Drum et Zulu Love Letter (Ramadan Suleman), ont été les grands lauréats du palmarès. Plus généralement, l’Afrique du Sud aura été la vedette de cette 19e édition. Dans la seule compétition officielle, quatre longs métrages (sur vingt) étaient en provenance de la « rainbow nation ». Preuve de l’émergence d’une cinématographie riche, capable d’offrir des propositions aussi diverses que Drum (reconstitution très léchée des très riches heures du magazine homonyme), Zulu Love Letter (les affres d’une jeune journaliste et ses hésitations à témoigner devant la commission Vérité et Réconciliation), Max et Mona (comédie urbaine), Beat the drum (drame anti-sida)...
Quels furent autres les tendances marquantes de ce Fespaco ? Tous genres confondus, les plus grandes découvertes partagent un nom commun : le numérique. C’est notamment grâce aux petites caméras DV que la production documentaire doit son renouveau, perceptible voici deux ans, évident lors de cette 19e édition. Désormais affranchis des contraintes financières et techniques, les cinéastes se lancent dans l’aventure numérique : Ask me I’m positive (sida), 5x5 (la polygamie), Joseph Ki-Zerbo et Al’èèsi, une actrice africaine (deux portraits), Aliénations (la psychiatrie algérienne), autant de documentaires qui débordent largement le périmètre de leur sujet. Les thèmes n’ont guère changé, mais l’approche est radicalement différente : désormais, le regard passe volontiers plus particulier, voire le plus local.
Fraîcheur et spontanéité
Dans la fiction, cette révolution numérique prend une tournure sensiblement similaire : désormais, à côté des grands films à thème (le sort des anciens tirailleurs sénégalais dans Tasuma ou des mutilés de la guerre angolaise dans Un héros, les guerres fratricides dans La nuit de la vérité, la commission Vérité et Réconciliation dans Zulu Love Letter) a surgi toute une génération de jeunes réalisateurs. Imprégnés des sons urbains (rap, hip hop), d’une cinéphilie souvent décalée (westerns spaghetti), leurs films offrent des instantanés quasi-sociologiques de la jeune génération africaine, de ses rêves, espoirs et désillusions. Dans Sofia (Boubakar Diallo, Panoramas), plus gros succès burkinabè 2004, une jeune vendeuse oscille entre son amoureux musicien et un riche soupirant. Dans Nyagami (Ousmane Diadié Touré, Semaine des réalisateurs), une jeune élégante venge toutes les femmes de son quartier des harcèlements récurrents d’un riche commerçant. Si leurs films sont souvent moins aboutis que ceux de leurs aînés, ils apportent au cinéma africain, désormais cinquantenaire, une fraîcheur, une spontanéité, une absence de complexes totalement revigorante.
par Elisabeth Lequeret
Article publié le 07/03/2005 Dernière mise à jour le 07/03/2005 à 11:41 TU
Palmarès Longs métrages Etalon de Yenenga : Drum, de Zola Maseko (Afrique du Sud) Etalon d’argent : La chambre noire, d’Hassan Benjelloun (Maroc) Etalon de bronze : Tasuma («le feu !»), de Daniel Kollo Sanou (Burkina Faso) Prix de l’Union européenne : Zulu Love Letter, de Ramadan Suleman (Afrique du Sud) Prix de la première œuvre : Max et Mona, de Teddy Mattera (Afrique du Sud) Prix d’interprétation féminine : Pamela Nomvete Marimbe pour Zulu Love Letter (Ramadan Suleman, Afrique du Sud) Prix d’interprétation masculine : Sid Ali Kouiret pour Les suspects (Kamal Dehane, Algérie) Prix du meilleur scénario : Marc Gautron et Fanta Regina Nacro (La nuit de la vérité, Burkina Faso) Prix de la meilleure image : Mario Masini pour Un héros (Zézé Gamboa, Angola) Prix du meilleur son : Rachid Bonafia pour El Manara (Belkacem Hadjhadj, Algérie) Prix de la meilleure musique : Sékouba Bambino pour Sous la clarté de la lune (Apolline Traoré, Burkina Faso) Prix du décor : Johnny Breedt pour Drum (Zola Maseko, Afrique du Sud) Prix du montage : Andrée Davanture pour Le prince (Mohamed Zran, Tunisie) Prix RFI du public : Tasuma, de Daniel Kollo Sanou (Burkina Faso) Prix Paul Robeson (diaspora) : Beah, a black woman speaks, de Lisa Gay Hamilton (Etats-Unis) Poulain d’or : L’autre mal, de Tahirou Ouedraogo (Burlina Faso) Poulain d’argent : Be Kunko, de Fantamady Camara (Guinée) Poulain de bronze : Safi la petite mère, de Rasmané Ganemtoré (Burkina Faso) Prix documentaire : Pourquoi, de Sokhana Amar (Sénégal)