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Pérou

Un «méga-procès» pour les dirigeants du Sentier lumineux

Abimael Guzman sera jugé dès ce lundi.(Photo : AFP)
Abimael Guzman sera jugé dès ce lundi.
(Photo : AFP)
Abimael Guzman, le chef du mouvement qui aurait causé la mort de 31 300 Péruviens entre 1980 et 1997, et vingt-trois membres de la guérilla seront jugés, dès lundi, pour terrorisme. Cherchant à effacer le souvenir humiliant d’un premier procès ajourné l’an passé, la justice péruvienne a cette fois réuni l’ensemble des procédures contre les accusés qui donneront lieu à un seul et unique jugement.

De notre correpondante à Lima

Il y a tout juste un an, les médias péruviens attendaient avec impatience l’ouverture du procès d’Abimael Guzman. Pour la première fois depuis son apparition en habit de prisonnier lors de son arrestation en 1992, le fondateur et leader du Parti communiste du Pérou, plus connu sous le nom de Sentier lumineux, allait apparaître en public et être jugé pour terrorisme par un tribunal civil. Un moment historique pour le pays qui a vécu dans la terreur semée par le mouvement de 1980 à 1997. La guérilla maoïste serait ainsi à l’origine de plus de 31 300 morts, selon la Commission de la vérité et de la réconciliation chargée, en 2001, de faire la lumière sur deux décennies d’affrontements entre militaires et terroristes. Un conflit interne qui aurait fait près de 70 000 victimes dans l’ensemble du Pérou.                   

Effacer l’échec d’un premier procès ajourné sine die

«Abimael», comme le nomment les Péruviens, avait bien été jugé une première fois peu après son arrestation mais ce jugement avait été cassé en 2003 sur avis de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, estimant que le procès n’avait pas été réalisé dans des conditions équitables.

En novembre 2004, la nouvelle procédure engagée contre les dirigeants terroristes se voulait donc exemplaire et symbolique d’un renouveau démocratique. Le procès tant attendu s’était pourtant rapidement transformé en une véritable mascarade. Dès son entrée dans la salle d’audience, Abimael Guzman, le «président Gonzalo», comme l’appellent ses partisans, avait d’abord embrassé ses «camarades», avant de lever le poing en l’honneur de la «guerre populaire», face aux caméras et appareils photo des journalistes, venus du monde entier pour l’occasion. Totalement débordé, le tribunal avait fini par ajourner la séance qui allait reprendre une semaine plus tard, pour mettre à jour des divergences entre les juges empêchant la continuité du procès. Un imbroglio judiciaire qui n’aura fait que décrédibiliser un peu plus des institutions déjà déconsidérées par les Péruviens.

La prison à perpétuité réclamée pour «Abimael»

Lundi 26 septembre, la justice péruvienne aura donc à cœur d’effacer cet épisode humiliant et n’est pas prête de répéter les mêmes erreurs. Cette fois, l’ensemble des chefs d’accusation à l’encontre des dirigeants de la guérilla ont été réunis en un seul et unique «méga procès», selon le nom consacré par les autorités du pays.

Abimael Guzman et vingt-trois autres membres du Sentier lumineux comparaîtront ainsi pour «terrorisme aggravé, homicide qualifié et délits au préjudice de l’Etat» dans la salle spéciale de jugement de Callao, près de Lima, la capitale. Ils devront répondre des nombreux crimes exécutés au nom de leur lutte armée contre l’Etat péruvien et de l’usage de voitures piégées, d’explosifs, d’armes ayant contribué à créer un climat de terreur dans le pays.                                                                                               

La prison à perpétuité a d’ores et déjà été réclamée par le procureur pour «Abimael» et dix dirigeants, dont Elena Iparraguirre, sa compagne, elle aussi incarcérée. Les treize autres accusés risquent vingt-cinq ans de prison. Les autorités espèrent un procès rapide, qui pourrait se terminer en février. D’ici à cinq mois, on devrait donc connaître la peine encourue par les chefs du Sentier lumineux, ce mouvement à l’origine d’une des pages les plus douloureuses et meurtrières de l’histoire du Pérou. 


par Chrystelle  Barbier

Article publié le 26/09/2005 Dernière mise à jour le 26/09/2005 à 08:42 TU