Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Justice internationale

La justice belge réclame Hissène Habré

L'ancien président du Tchad, Hissène Habré, est recherché par la justice belge.(Photo : diplomatie.gouv.fr)
L'ancien président du Tchad, Hissène Habré, est recherché par la justice belge.
(Photo : diplomatie.gouv.fr)
Hissène Habré, ancien président du Tchad qui vit en exil au Sénégal depuis la fin 1990 est rattrapé par son passé. La justice belge lance contre lui un mandat d’arrêt international pour «violations graves du droit humanitaire international». Sous sa présidence de nombreux cas de torture et de violations des droits de l’homme ont été pointés par les organisations de défense des droits de l’Homme qui n’ont eu de cesse de réclamer la traduction en justice de l’ancien président.

La justice belge a officiellement annoncé qu’elle réclamait l’extradition de l’ancien président du Tchad Hissène Habré afin de le juger pour les crimes commis sous sa présidence. «Violations graves du droit humanitaire international» est le principal chef d’accusation qui a motivé la délivrance par la justice belge d’un mandat d’arrêt international. «Cette décision historique était attendue depuis longtemps par la FIDH et l’ensemble de ses partenaires au sein du Comité international pour le jugement d’Hissène Habré», a déclaré Sidiki Kaba, le président de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH). Visiblement satisfait de cette décision Sidiki Kaba trouve en cette évolution du dossier un aboutissement de cinq années d’enquêtes, de recherches et de regroupement de faits accablants contre le régime d’Hissène Habré. 

Déjà, en 2000, un collectif de victimes tchadiennes soutenu par des organisations de défense des droits de l’Homme avait déposé une plainte à Dakar contre le dictateur réfugié au Sénégal. Mais, un an plus tard, la Cour de cassation de Dakar déclarait les tribunaux sénégalais incompétents pour juger Hissène Habré, «un étranger qui aurait commis des crimes hors du Sénégal». La déception des organisations de défense des droits de l’Homme et du collectif des victimes était grande, mais leur détermination à traduire l’ancien président en justice n’a jamais été entamée. Toutes les tribunes ont été utilisées pour que les reproches faits à ce régime ne tombent pas dans l’oubli. Certains principes d’universalité de la justice belge ont été requis pour obtenir aujourd’hui qu’une suite soit donnée aux plaintes des victimes.

Prévenir la fuite du dictateur

Selon les autorités belges le mandat d’arrêt a été délivré depuis le 19 septembre 2005. Les autorités sénégalaises qui l’ont reçu sont restées sans réaction. Cette attitude n’inquiète pas Boucounta Diallo, coordinateur du collectif des avocats des victimes tchadiennes, qui affirme que «l’Etat sénégalais se doit d’exécuter immédiatement le mandat d’arrêt international». Il estime par ailleurs que l’accusé «doit avant toute chose se trouver en prison» pour prévenir une éventuelle fuite vers un pays tiers. La FIDH qui s’inquiète aussi de cette éventualité souligne «l’obligation souscrite par le Sénégal en vertu de la Convention des Nations unies contre la torture de 1984, faute d’avoir jugé Hissène Habré au Sénégal, d’extrader celui-ci vers l’Etat qui en fait la demande».

Toutefois, la procédure d’extradition peut être longue. En effet, la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Dakar dispose d’un mois pour se prononcer sur «la légalité de la requête». Dans l’éventualité d’un avis favorable d’extradition, le président de la République du Sénégal dispose à son tour d’un mois pour «signer un décret d’extradition». Le collectif des victimes profite de cette nouvelle avancée du dossier pour se rappeler au bon souvenir du président Abdoulaye Wade qui aurait laissé entendre, il y a quelques années, qu’il ne s’opposerait pas à une extradition si toutefois il avait la garantie qu’un procès «équitable» serait assuré.

L’Etat tchadien, qui se satisfait également de la décision de la justice belge, promet une indéfectible collaboration, en faisant remarquer la révocation de leurs fonctions de plus d’une soixantaine de fonctionnaires qui, selon Human Rights Watch (ONG de défense des droits de l’Homme), bénéficiaient d’une impunité totale alors qu’ils étaient responsables de la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS), la redoutable police politique mise en place par Hissène Habré. De 1982 à 1990, sous le régime de Hissène Habré, 40 000 personnes seraient mortes ou portées disparues dont 4 000 nommément identifiées.


par Didier  Samson

Article publié le 30/09/2005 Dernière mise à jour le 30/09/2005 à 17:39 TU