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Environnement

Harbin attend que passe le benzène

A Harbin, l'atmosphère reste tendue dans les files d'attente de distribution de l 'eau.(Photo: AFP)
A Harbin, l'atmosphère reste tendue dans les files d'attente de distribution de l 'eau.
(Photo: AFP)
Plus de 4 millions de Chinois sont toujours privés d’eau courante dans la ville de Harbin, au nord du pays. Depuis mardi, l’alimentation est suspendue en raison d’une pollution du fleuve Songhua. Le 13 novembre dernier, 100 tonnes de produits chimiques s’y étaient déversées après l’explosion d’une usine en amont. Les habitants s'organisent. D’après les responsables politique de Harbin, avec le courant, la nappe de produits toxiques devrait s’éloigner de la ville à partir de samedi.

De notre envoyé spécial

Le calme est revenu dans la ville de Harbin et la vie s’organise pour pallier l’absence d’eau courante. Les commerces restent très affectés par cette coupure générale qui touche tout le centre ville de cette agglomération de 9 millions d’habitants. Les restaurants et les hôtels, par exemple, ont dû adapter leur fonctionnement au contexte de pénurie. Ainsi, les plats cuisinés avec de l’eau ont été retirés des cartes, et pour faire des économie d’eau, les plus grands restaurants de la ville ont été fermés. Pour rassurer les clients, la plupart des établissements affichent des banderoles disant qu’ils utilisent de l’eau de source et pas l’eau issue du fleuve. En effet, une centaine de puits ont été forés depuis le début de la semaine pour puiser dans les nappes phréatiques de Harbin épargnée par la pollution.

Mais les habitants restent méfiants sur la qualité de l’eau et la plupart des restaurants tournent au ralenti. Dans les hôtels, les baignoires et les éviers sont remplis en prévision de la coupure, les clients sont invités à limiter leur toilette au strict minimum. Dans les salons de coiffure, l’eau qui a servi au shampoing est réutilisée pour laver le sol avant d’être jetée. Bref, c’est toute la ville qui s’est adaptée a la pénurie d’eau.

Des stocks de plus de 7 000 tonnes d’eau

Pour les habitants, le rationnement est organisé par la municipalité qui distribue de l’eau gratuitement dans chaque quartier. Plusieurs fois par jour, de longues files d’attente se forment pour attendre le passage du camion citerne. Ces opérations sont étroitement supervisées par les comités de quartier du Parti communiste. C’est le signe le plus visible de la mobilisation des autorités locales. Car après avoir, dans un premier temps, essayé de dissimuler la réalité de la pollution, la municipalité et le gouvernement de la province jouent désormais la carte de la transparence et de la mobilisation. Un changement de politique qui s’est accompagné par des mesures concrètes. La province du Heilongjiang ou se trouve Harbin a ainsi débloqué 10 millions de Yuans (1 million d’euros) pour répondre à la catastrophe et a organisé un vaste réseau de ravitaillement pour fournir de l’eau aux citadins.

De son côté, la municipalité de Harbin affirme avoir constitué des stocks de plus de 7 000 tonnes d’eau. La première conséquence de cette reprise en main, c’est qu’il est à nouveau possible de trouver de l’eau minérale dans les magasins de la ville. Au début de la semaine, les rayons avaient été dévalisés par les habitants pris de panique par l’annonce soudaine d’une coupure générale de quatre jours. Désormais, les bouteille sont acheminées par camion depuis les régions limitrophes. Les autorités de Harbin ont également mis fin à la spéculation sur l’eau minérale en imposant un strict contrôle des prix.

Il n’y a ni odeur, ni cadavre de poisson

Les hôpitaux de la ville sont en état d’alerte pour prévenir les cas d’empoisonnement au benzène. Un stock de carbone actif pour purifier l’eau a également été constitué. Enfin, pour prévenir les mouvements de foule, les équipes de police ont été renforcé dans les rues de Harbin. Ces mesures ont permis un certain retour à la normale après la psychose qui s’était emparée de la ville au début de la semaine, juste après l’annonce soudaine de la coupure d’eau. Les habitants semblent maintenant résignés, ils attendent que la nappe de pollution, longue de 80 kilomètres, s’éloignent de leur ville. Cependant, l’atmosphère reste tendue, dans les files d’attente de distribution d’eau, certains habitants laissant éclater leur colère et s’en prennent aux représentants du Parti communiste accusés de cacher la véritable ampleur de la catastrophe.

Sur les rives du fleuve Songhua, à la hauteur de Harbin, aucune trace de pollution n’est visible. Il n’y a ni odeur, ni cadavre de poisson. Avec des températures qui descendent à 10 degrés en dessous de zéro, le cours d’eau est déjà à moitié recouvert par la glace. Du coup, les habitants continuent à se promener le long des berges dont l’accès reste libre. Pourtant les taux de benzène et de nitrobenzène sont encore très élevés, un village construit sur le bord du fleuve a même dû être évacué jeudi pour des raisons de sécurité. A l’heure actuelle, l’importance réelle de la catastrophe écologique et de ses conséquences pour l’écosystème ne sont pas encore connues. D’autant que le fleuve Songhua, long de près de 2000 kilomètres, traverse une trentaine de villes chinoises avant de continuer sa course en Russie. Dans les régions reculées, la population ignore les risques liés a la consommation de poisson et a l’utilisation de l’eau du fleuve. D’après les responsables politique de Harbin, avec le courant, la nappe de produits toxiques devrait s’éloigner de la ville à partir de samedi. Une fois les tests sanitaire effectués, l’eau courante sera rétablie pour les habitants.


par Mathieu  Baratier

Article publié le 25/11/2005 Dernière mise à jour le 08/01/2006 à 14:28 TU