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Israël

Olmert trace les frontières de l’Etat hébreu

Ehud Olmert veut dessiner les frontières permanentes de l'Etat hébreu.(Photo :AFP)
Ehud Olmert veut dessiner les frontières permanentes de l'Etat hébreu.
(Photo :AFP)
L’homme commence sa mue. D’intérimaire d’Ariel Sharon, Ehoud Olmert veut désormais devenir titulaire du fauteuil de Premier ministre d’Israël. Pour cela, il a donné mercredi soir à la télévision sa première interview depuis qu’il a pris la tête du gouvernement. Ehoud Olmert a précisé, plus que tout autre dirigeant israélien avant lui, quelles frontières il entendait définir pour l’Etat hébreu s’il est élu le 28 mars prochain. Une initiative qui fait grincer des dents jusque dans son propre parti, Kadima.

De notre correspondant en Israël

L’exercice est difficile pour Ehoud Olmert. Pour gagner les prochaines élections, il doit apparaître comme un leader national, exister par lui-même, tout en ne s’écartant pas trop du boulevard ouvert par le « bulldozer » Ariel Sharon à son nouveau parti Kadima, grand favori des sondages.

Bibliothèque de littérature juive pour toile de fond et drapeau bleu et blanc frappé de l’étoile de David à ses côtés, Ehoud Olmert a voulu donner l’image d’un successeur crédible, et effacer celle du remplaçant appliqué.

Quand Ariel Sharon parlait de garder « des grands blocs de colonies » en Cisjordanie, Ehoud Olmert précise : ce sera Goush Etzion (au sud de Jérusalem), et les deux plus importants, Ariel (dans le nord), et Maalé Adoumim (à l’est de Jérusalem, presque une banlieue de la Ville Sainte).

Tout comme Ariel Sharon, son remplaçant est animé par l’obsession démographique. « Nous nous séparerons de la plupart de la population palestinienne qui habite dans les territoires de Judée Samarie (Cisjordanie) », a déclaré Ehoud Olmert. Ce qui implique un regroupement des colons : « Nous nous rassemblerons dans les principaux blocs d’implantations, et nous préserverons l’unité de Jérusalem », a continué le Premier ministre par intérim. En tout, environ 60 000 Israéliens habitent actuellement dans les colonies promises à l’évacuation par Ehoud Olmert (chiffres du mouvement pacifiste La Paix Maintenant).

Ehoud Olmert envisagerait ainsi d’agir seul, reprenant la rhétorique sharonienne de « l’absence de partenaire palestinien ». Depuis que le Hamas a remporté les législatives palestiniennes, le chef du gouvernement israélien se refuse à tout contact avec un gouvernement qui serait dominé par les islamistes. Comme à Gaza l’été dernier, il procéderait donc à des retraits unilatéraux en Cisjordanie.

Carrure moins imposante

Le nom du Premier ministre hospitalisé a été peu évoqué, et pourtant son ombre a plané au-dessus d’Ehoud Olmert pendant toute l’interview. L’ancien maire de Jérusalem endosse le costume de son mentor, mais le taille par retouches légères à sa carrure moins imposante.

Le chef de file de Kadima veut, comme Ariel Sharon, dessiner les frontières permanentes de l’Etat hébreu. Il entend pour cela garder le contrôle de la Vallée du Jourdain, un territoire stratégique qui sépare la Cisjordanie de la Jordanie. Du lac de Tibériade, au nord, jusqu'à la mer Morte, au sud, ce sont également quelque 150 kilomètres de terres agricoles très riches.
 
Comme on pouvait s’y attendre, la gauche travailliste et la droite Likoud ont dégainé leurs critiques dès la fin de l’interview. Mais les flèches sont également parties de la formation centriste du Premier ministre par intérim. L’une des cautions « sécuritaires » de Kadima, Avi Dichter, l’ancien chef du Shin Bet – les services de sécurité intérieure et de contre-terrorisme, s’oppose fermement à tout nouveau « retrait unilatéral ». Trop dangereux sans assurances que l’ordre sera maintenu dans les territoires évacués. Même son de cloche chez un ministre transfuge du Likoud, Tzachi Hanegbi : pas question d’évacuer sans contrepartie donnée par les Palestiniens.

Pour l’éditorialiste politique du journal Haaretz, ces déclarations pré-électorales ont une « valeur très limitée ». Il n’y a qu’à relire les interviews du mentor Ariel Sharon avant son élection de 2003 : « Leur seul détail exact est la date de leur publication », ironise le commentateur.

En tout cas, comme Ariel Sharon avant lui, Ehoud Olmert n’a pas oublié de se déclarer attaché à la « Feuille de Route », le plan de paix resté lettre morte depuis son lancement, et qui prévoyait la création d’un Etat palestinien en… 2005.


par Xavier  Yvon

Article publié le 08/02/2006 Dernière mise à jour le 08/02/2006 à 18:51 TU