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Grippe aviaire

Le Nigeria lance un appel à l’aide

Selon l'Organisation Internationale de la Santé animale, la souche du H5N1 prélevée au Nigeria est la même que celle qui a tué des dizaines de milliers de volailles en Chine, en Europe Centrale, ou en Turquie.(Photo : AFP)
Selon l'Organisation Internationale de la Santé animale, la souche du H5N1 prélevée au Nigeria est la même que celle qui a tué des dizaines de milliers de volailles en Chine, en Europe Centrale, ou en Turquie.
(Photo : AFP)
Pour la première fois, le virus de la grippe aviaire a atteint l'Afrique. C'est le Nigeria qui est touché. Pays le plus peuplé du continent avec 130 millions d'habitants, il est aussi l'un des plus pauvres. Les autorités disent avoir activé un plan d'urgence préparé à la fin de l'année dernière, mais la situation empire d'heure en heure.

De notre correspondante au Nigeria

Hier, les autorités nigérianes ont lancé un appel à l'aide. Selon le ministre de l'Agriculture Adamu Bello, le Nigeria a besoin de laboratoires, de vaccins, d'un soutien technique, et d'échanges avec les pays confrontés à la même expérience. En clair, il faut un support logistique massif pour lutter contre l'épidémie qui est en train de décimer les gallinacés au nord du pays. De source diplomatique, « la grande majorité des pays veulent aider, mais il faut leur donner une liste de besoins précis, ça n'a pas été le cas lors de la réunion ». Les Etats-Unis qui disposent sur place d'experts en virologie dans le cadre du plan de lutte contre le sida ont déjà promis une enveloppe de 20 millions de dollars et un laboratoire, trois experts de la FAO doivent arriver dans le courant du week-end pour aider à la définition des besoins dans les zones infectées. L'OMS va également envoyer une équipe sur place.

Une propagation rapide

La situation est jugée inquiétante par la FAO. La grippe aviaire se répand comme une traînée de poudre. A Kaduna, au nord du pays, un premier foyer de H5N1 a été détecté mercredi. Mais les poulets y étaient malades depuis près d'un mois, un délai que le virus hautement pathogène a visiblement mis à profit pour essaimer dans la région. L'Etat de Kano, frontalier de Kaduna est touché, ainsi que le Plateau, une zone plus centrale, réputée pour son agriculture. De grandes distances séparent les foyers, qui ont été mis en quarantaine. La présence de la grippe aviaire est avérée officiellement dans quatre fermes, mais une trentaine pourraient être infectées. Au moins 100 000 volailles sont mortes. Le chiffre grossit de jour en jour.

Des comportements à risque

Plus inquiétant encore, la population multiplie les comportements à risque. Les éleveurs se sont dépêchés d'écouler sur les marchés des zones infectées les volailles malades, par peur semble-t-il, de perdre de l'argent. Les acheteurs se sont rués sur cette marchandise d'ordinaire coûteuse vendue à prix sacrifiés. Le gouvernement a annoncé le versement de compensation, à raison de 250 nairas (1,5 euros) par volatile abattu, et la FAO a demandé hier la fermeture de ces marchés. Mais, même quand les villageois détruisent les oiseaux malades ou morts, ils le font souvent sans protection. Selon l'agence Reuters, dans la région de Kano, des poulets sont manipulés à mains nues, et jetés dans les brasiers en présence des enfants. Un témoin rapporte qu'aucun dispositif sanitaire n'était visible jeudi sur la route entre Abuja et Kaduna, « les poulets se promènent en liberté, la grippe aviaire est partout et nulle part ».

Un manque d'information

Jusqu'à mercredi, la majorité des Nigérians ignoraient sans doute jusqu'à l'existence de cette grippe aviaire. A la fin de l'année dernière, les autorités jugeaient minimes les risques d'apparition du virus dans le pays. « Nous ne sommes pas sur la route des oiseaux migrateurs et nous n'importons pas de volailles » affirmait en octobre un responsable du ministère de l'Agriculture. Alors qu'en Europe, les ruptures de stocks de Tamiflu étaient largement commentées, la presse nigériane n'a guère consacré que quelques articles à l'enjeu aviaire. Dans un pays confronté quotidiennement au sida, au paludisme, à la poliomyélite au nord du pays, le risque d'apparition d'une maladie qui pourrait un jour se transformer en pandémie humaine n'a pas retenu l'attention. Petit espoir, les réseaux mis en place au nord du pays pour informer sur la vaccination contre la poliomyélite, dont l'inoculation avait été contesté en 2003 par des leaders religieux, pourrait permettre de faire passer rapidement quelques messages utiles sur le H5N1.

Risque humain

Selon l'Organisation Internationale de la Santé animale, la souche du H5N1 prélevée au Nigeria est la même que celle qui a tué des dizaines de milliers de volailles en Chine, en Europe Centrale, ou en Turquie. Autrement dit, elle est dangereuse pour l'homme. Jeudi, deux enfants de Kaduna ont subi des examens médicaux. Leur père a indiqué qu'ils se sont mis à tousser et à cracher du sang peu après la morts d'une partie des volailles de sa ferme. Officiellement, aucun cas humain n'a été détecté. Mais les régions du nord du pays sont pauvres, et les structures hospitalières y sont quasiment inexistantes, ce qui rendra très difficile l'évaluation des effets de la grippe aviaire sur la santé humaine. De même que le contrôle des mutations du virus : s'il devient transmissible d'homme à homme, il pourrait causer une pandémie mondiale et des millions de morts.


par Virginie  Gomez

Article publié le 11/02/2006 Dernière mise à jour le 11/02/2006 à 11:47 TU

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(Conception : Bourgoing / RFI)

Audio

Jeanne Brugères-Picou

Professeur à l'école vétérinaire de Maison-Alfort

«Il faut bien faire cuire la viande, se laver les mains, nettoyer la table où la volaille a été préparée et aussi, surtout, bien faire cuire les oeufs.»

[11/02/2006]

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