Afrique : chemins clandestins vers l’Europe
Migrants clandestins : invisibles et partout présents
(Photo: AFP)
Combien sont-ils à tenter de traverser l'Afrique de part en part pour s'agglutiner aux portes de l'Europe? Des dizaines de milliers sans doute. Plus encore? Peut-être. Impossible de les dénombrer, mais notre envoyé spécial, Serge Daniel, est allé à leur rencontre de Lagos à Ceuta, de Lomé à Nouadhibou. Avec ces hommes, ces femmes -et parfois ces enfants- en quête d'un avenir, il a découvert les réseaux, tous parfaitement interconnectés qui se font fort de conduire les candidats à l'immigration (ou émigration, simple question de point vue) d'une ville à l'autre, toujours plus au nord, moyennant de grosses poignées de billets. En chemin, il a croisé aussi les escrocs, les voleurs, les exploiteurs.
(Dessin : Alain Kojelé Makani)
Combien sont-ils à se lancer dans l'aventure? Personne ne le sait, d'autant que certains sont en route depuis plusieurs années. Le chemin du retour est souvent impossible. Quand la famille s'est cotisée pour payer le début du voyage, quand on porte les espoirs de toute une communauté, comment rentrer les mains vides? Comment renoncer à un rêve quand aucun autre espoir ne point à l'horizon?
Combien sont-ils en transit en Afrique obligés de travailler clandestinement, de se prostituer, de tout faire pour gagner l'argent qui leur permettra de poursuivre le voyage? Nul ne le sait tant ces hommes et ces femmes sont tombés dans un angle mort de nos préoccupations quotidiennes. Loin de leurs attaches et loin de leur destination, ils n'appartiennent à aucun monde. Ils sont les sans-voix, les sans-droits, les sans-visages que seules quelques images sporadiques d'assaut contre les barbelés de Ceuta, de Melilla, de coques de noix ballottées par les flots sur la Méditerranée ou de l'Atlantique révèlent l'espace de quelques heures sur les écrans de nos télévisions.
Combien sont-ils? Nul ne le sait mais Serge Daniel a tenté de rendre à ceux qu'il a rencontrés un visage et une histoire, en un mot, une humanité. De leurs rêves, de leurs peurs, de leur honte parfois, de leurs misères, il nous parle. Des voix qu'il faut entendre au moment où l'Europe, et la France notamment, s'interroge sur les moyens de réduire l'immigration clandestine. Des paroles qu'il faut écouter alors que les Etats africains font souvent comme si les problèmes de ces migrants n'étaient pas les leurs.par Philippe Couve
Article publié le 27/04/2006 Dernière mise à jour le 20/02/2008 à 09:49 TU
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