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Etats-Unis

Un général à la tête de la CIA

«L'homme qu'il faut», le général Michael Hayden -au centre-, entouré de George Bush et de son ancien responsable, John Negroponte.(Photo : AFP)
«L'homme qu'il faut», le général Michael Hayden -au centre-, entouré de George Bush et de son ancien responsable, John Negroponte.
(Photo : AFP)
La nomination de Michael Hayden pour remplacer Porter Goss fait déjà des vagues, y compris dans le camp du président.

De notre correspondante aux Etats-Unis

C’est un général quatre étoiles que George Bush a décidé de placer à la tête de la CIA. Mais quand il parle de Michael Hayden, 61 ans, le président des Etats-Unis l’appelle par son prénom. « Mike connaît la communauté du renseignement de la base jusqu’au sommet », a-t-il dit en présentant son choix dans le bureau ovale, insistant sur son expérience dans le renseignement plus que dans l’US Air Force.

Si la Maison Blanche s’emploie à faire oublier son uniforme, c’est que le statut militaire de Michael Hayden est devenu le premier motif de dénigrement de ce choix, dans les rangs démocrates comme républicains. Un général à la tête de la CIA pourrait donner l’impression que l’agence a été « avalée par le département de la Défense », a déploré le sénateur démocrate Joseph Biden. « Pour souligner son indépendance vis-à-vis du Pentagone, le général Hayden pourrait envisager de se mettre en retraite de l’armée de l’air », a souhaité Susan Collins, la sénatrice républicaine qui préside le Comité à la sécurité intérieure.

Mais le gouvernement a déjà laissé entendre que le numéro 2 actuel de l’agence, le vice-amiral Albert Calland serait remplacé par un civil, pour maintenir la tradition d’un binôme civil-militaire à la tête de l’agence. Le nouvel adjoint est un vrai produit de la CIA ramené à bord : Stephen Kappes est l’ancien directeur des services clandestins de l’agence. Il avait démissionné brutalement en 2004 alors qu’il était en conflit ouvert avec l’ex-patron de la CIA Porter Goss dont il critiquait la gestion de la centrale d’espionnage.

La loyauté, motif d’inquiétude

Militaire de carrière, le général Hayden a effectivement passé l’essentiel de sa vie professionnelle dans le renseignement, avec des postes en Allemagne, Yougoslavie, Corée du Sud et Bulgarie. Il a déjà eu l’occasion de travailler avec Condoleezza Rice au Conseil de sécurité nationale sous Bush père et est devenu directeur de la National Security Agency (NSA) de 1999 à 2005 avant de devenir, en mars 2005, l’adjoint de John Negroponte, le « super directeur du renseignement ».

Créé suite aux recommandations de la commission d’enquête du 11 septembre, le poste de Negroponte chapeaute les services de renseignement de 16 agences gouvernementales, une activité qui incombait jusque-là à la CIA. Porter Goss, directeur de l’agence jusqu’à vendredi, défendait son territoire contre le contrôle de Negroponte, lequel aurait obtenu le feu vert de la Maison Blanche pour demander son départ. En faisant nommer son bras droit à la tête de la CIA, Negroponte ne risque plus ce genre de conflit.

Cette loyauté est un autre motif d’inquiétude au Congrès. Le sénateur Richard Durbin s’est inquiété à l’idée que « le Général Hayden ne soit pas capable d’être la voix indépendante dont le président a besoin face à lui à la CIA. » L’incapacité de la CIA à s’opposer aux conclusions tirées par la Maison Blanche sur la présence d’armes de destruction massive en Irak avait justement été mise sur le compte du désir de plaire.

«L’homme qu’il faut»

Enfin, d’autres lui reprochent d’avoir été l’architecte du controversé programme secret d’écoutes domestiques sans mandat de justice. Le sénateur républicain Arlen Specter, qui préside le comité judiciaire du Sénat, a déjà indiqué qu’il profiterait de la procédure de confirmation de la nomination d’Hayden devant le sénat pour rouvrir le débat sur la légalité des écoutes domestiques. John Negroponte a déjà dit s’attendre à ce que Hayden ait à faire face à « beaucoup de questions » sur le sujet.

Aucun sénateur n’a encore indiqué s’il votait en faveur ou non d’Hayden lors des procédures de confirmation au sénat. Le général a la réputation d’exceller dans l’art du briefing, que ce soit à la Maison Blanche ou face au Congrès. Mais dans une année sanctionnée en novembre par des élections législatives, il est probable que même les Républicains souhaitent, avec des questions ardues pendant les auditions de confirmation au Sénat, montrer qu’ils ne sont plus disposés à signer des chèques en blanc au président.

Hier, George Bush a présenté Hayden comme « l’homme qu’il faut (à la CIA) à un moment critique. » Les sénateurs se souviendront peut-être que c’est mot pour mot ce qu’il avait dit du directeur partant Porter Goss en 2004.

par Guillemette  Faure

Article publié le 09/05/2006 Dernière mise à jour le 09/05/2006 à 08:32 TU