Etats-Unis

Démission surprise du patron de la CIA

Le général Michael Hayden et George Tenet alors directeur de la CIA en 2002.
(Photo : AFP)

Porter Goss, nommé à la tête de la CIA il y a moins de deux ans pour la réformer, perd son poste. Il avait été nommé à la tête de l’agence après les attentats du 11-Septembre. Il devrait être remplacé par le général Hayden, numéro deux du renseignement américain, un proche de John Negroponte qui supervise désormais les activités de cette agence.

De notre correspondante aux Etats-Unis

La nouvelle a surpris tout le monde. Après seulement un an et demi en fonction, Porter Goss a subitement démissionné de ses fonctions de directeur de la CIA (Central Intelligence Agency), un poste qu’il avait longuement convoité. L’ancien chef de l’agence assis à côté de lui, à l’occasion d’une réunion organisée à la hâte à la Maison blanche, le président Bush l’a remercié pour ses conseils et ses efforts pendant une période « de transition ». Ni Porter Goss, ni le président Bush n’ont expliqué quelles étaient les raisons de cette démission.

Le communiqué de l’Agence centrale de renseignement américaine n’emploie pas le mot démission. Peut-être parce qu’il s’agit plutôt d’un directeur poussé vers la sortie. Les guerres de territoire étaient notoires entre Porter Goss et John Negroponte,  nommé en 2005 directeur national du renseignement. Ce poste, créé suivant les recommandations de la commission d’enquête sur le 11-Septembre, coiffe les services de renseignement de 16 agences gouvernementales et dilue sensiblement les pouvoirs de la CIA. Negroponte cherchait à faire transférer certaines activités de la CIA dans ses bureaux, Porter Goss freinait des quatre fers. Le « superdirecteur » du renseignement aurait demandé le feu vert de la Maison blanche pour faire remplacer Porter Goss. John Negroponte était d’ailleurs présent dans le bureau ovale de la Maison blanche lorsque son départ a été notifié à Porter Goss.

Un directeur très critiqué

Avant Porter Goss, George Tenet avait dû démissionner après sept ans à la tête de l’agence. Il avait endossé la responsabilité des manquements de la CIA à prévenir les attaques du 11-Septembre. George Tenet avait également été accusé d’avoir cautionné l’idée qu’il ait pu y avoir des armes de destruction massive en Irak.  Nommé en septembre 2004 à la tête de la CIA, Porter Goss, 67 ans, ne jouissait pas, au sein de l’agence installée à Langley, en Virginie, de la même popularité que son prédécesseur. Il était en particulier dénigré par les responsables de l’action clandestine de l’agence, service dont il avait été un agent pendant une dizaine d’années pendant la Guerre froide. Porter Goss s’était ensuite tourné vers une carrière politique. Républicain, ancien élu de Floride au Congrès pendant 16 ans, il avait présidé le comité au renseignement de la Chambre des représentants de 1997 à 2004. Ce passé politique faisait partie de ce qui lui était reproché par ses subordonnés, agacés d’avoir vu des postes clés confiés à son ancien entourage politique.

Porter Goss avait aussi été accusé de ne pas tenir son personnel au moment où des fuites avaient révélé à la presse l’existence de prisons secrètes de la CIA en Europe de l’Est. L’analyste à l’origine de ces fuites avait d’ailleurs été renvoyée.

Le général Hayden, remplaçant pressenti

Le successeur de Porter Goss devrait être le général de l'armée de l'Air Michael Hayden. Sa nomination suscitera la controverse et si elle est confirmée, elle fera des vagues au Sénat : actuellement, il est le bras droit de John Negroponte. Le général Hayden, 61 ans, est également un proche du vice-président Dick Cheney. Michael Hayden était directeur de l'Agence de la sécurité nationale (NSA) en 2001 quand un programme d’écoutes téléphoniques pratiquées sans mandat avait été lancé. Lorsque le New York Times en a révélé l’existence l’hiver dernier, le général Hayden l’a vivement défendu au nom de la guerre contre le terrorisme.

La démission de Porter Goss intervient alors que le président George Bush, au plus bas dans les sondages, a, depuis quelques semaines, commencé à remanier son administration. A quelques mois des élections de mi-mandat de novembre prochain, la Maison blanche affiche déjà un nouveau secrétaire général (Joshua Bolten), un nouveau porte-parole (Tony Snow). Quant à Karl Rove, l’éminence grise du président et son conseiller pour la politique intérieure, il est désormais cantonné à un rôle de stratège.

par Guillemette  Faure

Article publié le 06/05/2006 Dernière mise à jour le 06/05/2006 à 11:40 TU