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Musée du quai Branly

Jacques Chirac a inauguré « son » musée

Onze ans après le lancement du projet, le président Jacques Chirac a inauguré mardi 20 juin le Musée du Quai Branly, dédidé aux arts d'Afrique, d'Océanie, d'Asie et des Amériques. 

		(Photo : AFP)
Onze ans après le lancement du projet, le président Jacques Chirac a inauguré mardi 20 juin le Musée du Quai Branly, dédidé aux arts d'Afrique, d'Océanie, d'Asie et des Amériques.
(Photo : AFP)
Initiateur du projet dès 1995, amateur reconnu d’arts premiers auxquels il voulait rendre « leur juste place » dans les musées français, le président a inauguré mardi matin le musée consacré aux cultures non européennes dont il a la paternité. Onze après le lancement du projet et au terme de cinq ans de travaux, le musée ouvrira ses portes au public le 23 juin prochain. Pour franchir le seuil de ce musée très attendu, le président était entouré du secrétaire général de l'Onu Kofi Annan et de plusieurs personnalités étrangères. Le musée du quai Branly, déjà baptisé le « musée du regard de l’Autre », constitue la réalisation culturelle majeure des douze années de présidence de Jacques Chirac. Ce musée est le premier d'envergure à sortir de terre en France depuis le Centre Pompidou en 1977.

Qui un pinceau à la main, qui un câble, qui un marteau-piqueur, le musée du quai Branly -consacré aux arts d’Afrique, d’Océanie, d’Asie et des Amériques- ressemblait à une ruche affolée lundi, veille de l’inauguration des lieux par Jacques Chirac. Seuls les grands mâts totémiques, les statuettes au port de tête altier à l’instar de la grande sculpture djennenké (Mali) semblaient prêtes, au garde à vous, en attendant la visite officielle du président de la République. Onze après le lancement du projet et au terme de cinq ans de travaux, le président a coupé le cordon, mardi, en présence de Lionel Jospin qui, alors qu’il était premier ministre, lui avait donné son feu vert pour la réalisation du musée en 1998. Parmi les personnalités invitées, figuraient le secrétaire général de l'Onu Kofi Annan, le ministre australien des Affaires étrangères Alexander Donner, le prix Nobel de la paix guatémaltèque Rigoberta Manchu, et le Premier ministre du territoire canadien du Nunavut, Paul Okalik.

S’attardant devant l’une des œuvres emblématiques du musée, une statuette androgyne djennenké datant du Xe-XIe siècle, le président a déclaré : « Au cœur de notre démarche, il y a le refus de l’ethnocentrisme, de cette prétention déraisonnable et inacceptable de l’Occident à porter, en lui seul, le destin de l’humanité. (…) Ce sont là des préjugés absurdes et choquants. Ils doivent être combattus. Car il n’existe pas plus de hiérarchie entre les arts et les cultures qu’il n’existe de hiérarchie entre les peuples. C’est d’abord cette conviction, celle de l’égale dignité des cultures du monde, qui fonde le musée du quai Branly », a-t-il ajouté, souriant, devant un cortège de mécènes et de marchands d’art. Puis il s’est entretenu avec ses invités -parmi lesquels Kofi Annan ou bien encore le secrétaire général de l'organisation internationale de la francophonie, Abdou Diouf- de telle pièce parmi les quelque 3 500 exposées sur 300 000 conservées par le musée.

« C’est une excellente chose que les Français décident de promouvoir les cultures africaines, qu’elles soient magnifiées au cœur de Paris et que ces œuvres soient valorisées », s’est réjoui le docteur Abdoulaye Camara, conservateur du musée de l’institut fondamental d’Afrique noire de Dakar. Christiane Taubira, députée (PRG) de Guyane, quant à elle plus nuancée, a déclaré « relever avec satisfaction que les pays d’origine de ces multiples objets ne [soient] pas traités en colonies d’un ancien empire, mais au titre de ce qu’ils étaient, dans leur indépendance et leur rayonnement, avant le choc violent des conquêtes coloniales », objectant toutefois que « ces objets ont pour propriétaires ultimes les pays où ils furent imaginés et fabriqués (…). La grande visibilité de la richesse des collections (...) offre l’occasion de poser la question de la restitution et du partage de ces biens et des savoirs qui leurs sont attachés ».

Un million de visiteurs attendus par an

Il était alors maire de Paris, en 1992, lorsque Jacques Chirac rencontra Jacques Kerchache, passionné, comme lui, par les arts et les civilisations lointaines. C’est à ce moment là que germa le projet de leur consacrer un espace privilégié. Objet d’un concert de louanges dans les médias français, le musée -qui a coûté 235,2 millions d’euros, soit 7% de plus que le budget initial- aura toutefois suscité la critique de certains anthropologues et ethnologues, à l’instar de Jean-Loup Amselle, directeur d’études à l’école des hautes études de sciences sociales (EHESS), déclarant : « C’est un musée cliché, une coquille vide. (…) C’est la conception même du musée qui me gêne. Elle renvoie à une ethnologie du passé, de peuples sans histoire, associés à la préhistoire, alors que ces peuples sont présents, ils sont parmi nous à travers l’immigration comme les Bambaras », d'Afrique de l’Ouest.

Le bien-fondé de la création de ce musée n’a pas fini de faire couler de l’encre. Quoiqu’il en soit, aujourd’hui bel et bien implanté à deux pas de la tour Eiffel, il est prêt à accueillir un million de personnes par an. « C’est magnifique, franchement magnifique. C’est un enrichissement culturel (…) Je dis merci en toute simplicité », a déclaré le maire PS de Paris, Bertrand Delanoë. Pour fêter son ouverture, le musée du quai Branly sera exceptionnellement libre d’accès et gratuit pour tous vendredi 23, samedi 24 et dimanche 25 juin. Pour le président du musée, Stéphane Martin, il s’agit de faire comprendre aux visiteurs que « découvrir les Dogons du Mali, cela peut être aussi enthousiasmant que de voir l’exposition d’un grand maître de la peinture ». Un ensemble d’activités sera proposé pour découvrir les collections du musée de manière ludique : intervention de conteurs, remise d’un carnet de voyage pour aller à la découverte des collections en famille, diffusion de documentaires dans la salle de cinéma.



par Dominique  Raizon

Article publié le 20/06/2006Dernière mise à jour le 20/06/2006 à TU

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(Réalisation : Marc Verney / RFI)

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