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Coupe du monde

Un bonheur guyanais bleu, blanc, rouge, auriverde

Guyanais et Brésiliens ont offert un carnaval sud-américain dans les rues de Cayenne après la victoire de la France contre le Brésil en quart de finale de la Coupe du monde 2006. 

		(Photo : Jody Amiet)
Guyanais et Brésiliens ont offert un carnaval sud-américain dans les rues de Cayenne après la victoire de la France contre le Brésil en quart de finale de la Coupe du monde 2006.
(Photo : Jody Amiet)
Guyanais et Brésiliens n’ont pas que 730 km de frontière à partager. Ils ont aussi le sens commun de la joie. Comme en 1998, ils ont fêté ensemble la victoire française face au Brésil dans les rues de Cayenne. Les supporters brésiliens reconnaissant, sans sourciller, le succès mérité de la France.

De notre correspondant en Guyane

Bleu, blanc, rouge, « auriverde » : Guyane. Spontanément, après quelques larmes chez les vaincus, Guyanais et Brésiliens ont offert un carnaval sud-américain dans les rues de Cayenne hier soir. «Bah, on a gagné 5 fois le Mondial, alors on en laisse un peu pour les autres » confie Sylvana, qui, au milieu du défilé, klaxonne au volant de sa voiture où ses enfants agitent un drapeau brésilien, ajoutant : « Non, je plaisante, les meilleurs ont gagné et puis c’est un peu ma victoire, mes enfants sont nés en Guyane ». Les Brésiliens avaient pourtant investi les premiers les rues de Cayenne volant de succès en succès depuis le début de la compétition « Ca nous a bien agacé, on les avait trouvés presque arrogants, alors depuis France-Togo on a défilé, à notre tour, mais avec le drapeau tricolore » confie Robert, créole guyanais hilare en regardant le défilé avenue du Général De Gaulle, l’artère principale de Cayenne.

« Même née en Guyane, je suis pour le Brésil »

La Guyane et le Brésil, c’est beaucoup d’aventures communes. Notamment sentimentales : «Ici , un métropolitain (originaire de l’Hexagone) sur deux est avec une Brésilienne », confie Juliana, de parents brésiliens qui se sont rencontrés… en Guyane où elle est née. Juliana, 26 ans, est aussi la sœur aînée d’un an de Florencia, l’épouse de Florent Malouda, l’international guyanais. « Même si je suis née en Guyane, je suis pour le Brésil, c’est mon sang. C’est pareil pour mes frères et sœurs désormais à Albi avec notre mère, il a fallu leur envoyer des tee-shirt du Brésil là-bas en France. Il ne doit y avoir que Florencia qui supporte l’équipe de Florent et encore, je ne lui ai pas demandé », confiait Juliana, quelques heures avant la rencontre. A Cayenne, dès le coup d’envoi de ce nouveau France-Brésil historique, le Domino bar brésilien, rendez-vous des férus du carnaval, a vite tourné à l’ambiance bleue. Depuis le début de la compétition, deux écrans « géants » y diffusent les mêmes matchs en simultané, l’un est branché sur la chaîne brésilienne Globo, l’autre sur Canal Plus en français. Dans le bar, noir de monde, les visages des supporters brésiliens trahissent une incompréhension. « On est complètement étouffés par les Français » admet l’un d’eux à la mi-temps pendant laquelle Français et Brésiliens investissent ensemble la piste de danse, entre techno et forro. En deuxième mi-temps, les yeux des supportrices « auriverde » rougissent en silence au but coup de massue de Thierry Henry. Au Domino ne résonnent dès lors plus que des « Zizou, Zizou, Malouda, Malouda, Allez les Bleus ! » pourtant en blanc. Au coup de sifflet final, Brésiliens et Français s’embrassent : « Zidane a été incroyable » confie Roberto 22 ans, dont la maman est brésilienne et dont le papa, guyanais, soutient la France. « Moi je suis à 100% pour le Brésil » précise Roberto. En débarquant à son tour au Domino, Paul Bellony, président de l’association Guyasil qui favorise des échanges culturels entre le Brésil et la Guyane confie « je suis heureux mais déçu aussi… pour mes Brésiliens ».

« Cette équipe nous ressemble »

Observateur attentif, pour sa part, du défilé rue De Gaulle, Guy Frédérick, animateur tonitruant d’une radio autonomiste participe au lyrisme ambiant. « Je ne suis pas un indépendantiste étriqué, il faut bien s’identifier à quelque chose, cette équipe nous ressemble ». Mais l’un des « Guyanais » les plus heureux est sans doute Marius, Martiniquais d’origine, qui a passé 10 ans en France, y a vu naître le centre de Clairefontaine, avant de s’installer depuis 17 ans en Guyane : sa maison est décorée de 9 maillots tricolores et 7 drapeaux français depuis mai : « A cette date, personne n’y croyait, regarde moi j’ai gardé mon drapeau de 98 ». Seul Christophe, cet adolescent guyanais de 16 ans qui vous tire par le bras au milieu du défilé, est un peu inquiet : « Dites monsieur, il ne va pas prendre sa retraite, hein, Zidane ? ».



par Frédéric  Farine

Article publié le 02/07/2006Dernière mise à jour le 02/07/2006 à TU