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Israël-Hezbollah

Match nul après huit jours de combats

Beyrouth, banlieue sud : les destructions causées par les bombardements de l'armée israélienne ont pour objectif de démoraliser la population. 

		(Photo : AFP)
Beyrouth, banlieue sud : les destructions causées par les bombardements de l'armée israélienne ont pour objectif de démoraliser la population.
(Photo : AFP)
En huit jours de guerre, Israël n’a encore atteint aucun des objectifs qu’il s’est fixé. Le Hezbollah est toujours présent au Liban sud et sa puissance de feu paraît intacte. Les Etats-Unis ont donc donné une semaine supplémentaire à l’Etat hébreu. Entre-temps, le calvaire de la population se poursuit.

De notre correspondant à Beyrouth

Après huit jours de violents bombardements et 48 heures de féroces combats terrestres, Israël n’a pas encore atteint les objectifs qu’il s’est fixé: «briser le Hezbollah», comme l’a affirmé son ministre de la Défense, Amir Peretz, faire cesser les tirs de roquettes sur le nord de l’Etat hébreu, comme l’indiquent d’autres responsables israéliens.

Au premier jour de l’offensive, certains hommes politiques libanais hostiles à l’action anti-israélienne de la branche armée du Hezbollah ( la Résistance islamique) assuraient en petit comité que «la destruction des capacités militaires du Hezbollah est une affaire de quelques jours». Mais une semaine plus tard, le Hezbollah assure que ses structures militaires demeurent intactes. «Nous avons dans notre arsenal assez de roquettes pour bombarder Israël pendant de long mois», déclare Mahmoud Komati, chef du conseil politique du Hezbollah. Reste à savoir ce qu’il en est sur le terrain.

Il n’est pas pertinent de comparer la situation actuelle à l’offensive lancée en 1982 par l’Etat hébreu pour déloger du Liban l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Pour sa part, le Hezbollah est un parti libanais, disposant d’une légitimité politique puisqu’il est représenté au Parlement et au gouvernement. Il jouit d’un large soutien populaire au sein de la communauté chiite et de la sympathie d’une minorité au sein des autres communautés. Les Palestiniens, eux, entretenaient des relations conflictuelles avec une majorité de Libanais, notamment les chiites et les chrétiens. A l’inverse de l’OLP, le Hezbollah est donc bien enraciné au sein du tissu social libanais, notamment au Liban sud, dans la Bekaa, dans la banlieue sud de Beyrouth et dans les quartiers chiites de la capitale.

La stratégie israélienne ne porte pas ses fruits

Dans la guerre en cours, Israël adopte une stratégie militaire à trois niveaux. D’abord, il concentre ses raids sur la banlieue sud dans le but de démoraliser la population et, surtout, de décimer la direction suprême du Hezbollah dans l’espoir de rompre la chaîne de commandement. Privés de leurs chefs, les combattants qui se trouvent en première ligne au Liban sud seront complètement désorientés et Israël aura gagné la bataille. C’est pour tenter d’atteindre cet objectif que les avions israéliens ont rasé le quartier de Haret-Horeik qui abritait le QG du Hezbollah.

C’est parce les services de renseignements israéliens sont persuadés que le chef de la Résistance islamique, Hassan Nasrallah, se cache dans un tunnel ou un abri fortifié sous ces immeubles, que les avions sont passés et repassés pour tirer leurs missiles sur les ruines. C’est toujours pour la même raison que des appareils israéliens ont lâché, dans la nuit de mercredi à jeudi, 22 tonnes de bombes sur une mosquée en construction à Bourj Barajné, sans succès.

Le deuxième front libanais d’Israël se trouve dans la Bekaa, considérée comme la base arrière du Hezbollah. En bombardant des dépôts dans cette plaine, en coupant les voies d’approvisionnement, l’armée israélienne espère affaiblir progressivement les unités du Hezbollah déployées au Liban sud et qui ne pourront plus alimenter leur arsenal. Enfin, toujours au Liban sud, l’armée israélienne cherche à briser les lignes de défense du Hezbollah et à détruire les rampes de lancement de roquettes à travers un déluge de fer et de feu.

Après huit jours de guerre, la stratégie israélienne ne semble pas avoir porté ses fruits. Les réalités sur le terrain le montrent. Jusqu’à présent, tous les indices prouvent qu’il n’y a pas eu de rupture dans la chaîne de commandement du Hezbollah. Les actions militaires de la milice chiite correspondent toujours à sa stratégie de riposte graduelle mise en œuvre depuis le premier jour de la guerre. De plus, sa puissance de feu demeure intacte. Malgré les assurances israéliennes quant à la destruction d’une grande partie de l’arsenal du Hezbollah qui aurait déjà tiré la moitié de ses roquettes, mardi et mercredi, la Résistance islamique a arrosé Israël d’une pluie de projectiles. Selon les sources israéliennes citées par la presse, les bombardements de mercredi étaient même les plus violents depuis le début de la guerre.

Feu vert américain pour Israël

Au sol aussi, la tâche de l’armée israélienne semble plus difficile que prévue. Les premiers affrontements terrestres se sont terminés à l’avantage du Hezbollah qui a repoussé, mercredi, une tentative d’incursion israélienne sur un front de deux kilomètres de long, entre Aitaroun et Maroun el-Ras, faisant deux morts et neuf blessés dans les rangs des assaillants. Le lendemain, les combats ont duré toute la journée et ont encore fait des victimes dans les rangs de l’armée israélienne. C’est sans doute parce qu’Israël ne s’est pas encore rapproché de ses objectifs que les Etats-Unis ont prolongé le feu vert qu’ils lui ont accordé.

Dans son édition de mercredi, le journal britannique The Guardian affirme «que les Américains et les Européens ont accordé un délai supplémentaire d’une semaine à Israël» pour tenter de briser le Hezbollah. C’est aussi pour cela que la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice, attendue en fin de semaine dans la région, a reporté sa tournée. «J’irai dans la région lorsque ma présence sera utile», a-t-elle dit.

Pendant ce temps, la situation des civils empire de jour en jour. Le demi-million de déplacés vit dans des conditions précaires. Plus de 60 000 sont installés dans des écoles et des stades sportifs. Et ceux qui, malgré la violence des bombardements, ont choisi de rester dans leurs villages commencent à manquer d’eau potable, de nourriture et de médicaments.   



par Paul  Khalifeh

Article publié le 20/07/2006Dernière mise à jour le 20/07/2006 à TU

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(©AFP/Bourgoing/RFI)