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Liban

Le Hezbollah durcit ses positions

Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, qui rejette l’idée d'une force internationale déployée au Liban sud. 

		(Photo : AFP)
Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, qui rejette l’idée d'une force internationale déployée au Liban sud.
(Photo : AFP)
Quelques heures après la fin de la conférence de Rome, le Hezbollah a durci ses positions en refusant le déploiement d’une force internationale au Liban sud. Sa position diffère sensiblement de celle exposée par le Premier ministre libanais, en Italie.

De notre correspondant à Beyrouth

La communauté internationale n’est pas la seule à afficher ses divergences sur les moyens d’arrêter la guerre entre le Liban et Israël. Quelques heures à peine après la fin de la conférence de Rome, qui n’a pas appelé à un cessez-le-feu immédiat à cause du veto américain, des dissensions inter-libanaises sont apparues sur la conduite politique à suivre face à l’offensive israélienne. Le Hezbollah a en effet indirectement rejeté le plan proposé par le Premier ministre pour sortir de la crise.

Fouad Siniora avait appelé à Rome à un cessez-le-feu immédiat; un échange de prisonniers entre le Liban et Israël; le placement sous l’autorité des Nations unies des hameaux de Chebaa occupés par l’Etat hébreu, en attendant la délimitation des frontières avec la Syrie; le déploiement des troupes régulières au sud du pays «pour empêcher toute présence armée autre que celle de l’Etat, conformément à l’accord de Taëf» qui a mis fin à la guerre civile; l’élargissement des prérogatives et du mandat des forces des Nations unies au Sud, de manière à «garantir la stabilité et la sécurité afin de permettre le retour des déplacés dans leurs villes et villages».

Jacques Chirac se démarque du projet américain

Le projet de Fouad Siniora rejoint en plusieurs points le plan proposé par Jacques Chirac. Celui-ci aussi donne la priorité à l’arrêt des combats avant le déploiement d’une force internationale, à condition que soit trouvé un «accord politique supposant un cessez-le-feu». Contrairement aux Etats-Unis, qui ignorent complètement le Hezbollah, le président français veut associer à toute solution le parti islamiste, représenté au gouvernement et au Parlement. Selon lui, le cessez-le-feu «doit être négocié, d'une part, entre le gouvernement libanais et le Hezbollah, et, d'autre part, entre la communauté internationale, Israël et le Liban». Le souci du chef de l’Etat français est d’éviter d’imposer par la force au Hezbollah une solution qui pourrait provoquer une guerre civile.

Jacques Chirac écarte une participation de son pays à une force de l'Otan «qui est perçue, qu'on le veuille ou non, comme le bras armé de l'Occident dans ces régions. Pour la France, l'Otan n'a pas vocation à mettre sur pied une telle force», dit-il, dans un entretien avec le quotidien français Le Monde. Le président français se démarque des Américains qui souhaitent, selon lui, l'envoi au plus vite de la «Force de réaction de l'Otan (NRF) qui serait commandée par l'état-major du corps européen composé de l'Allemagne, la France, la Belgique et l'Espagne, et qui serait en quelque sorte chargée d'appliquer le cessez-le-feu».

Jacques Chirac précise que son pays opte pour un plan en trois étapes: «un cessez-le-feu, puis un engagement politique et, à partir de là, une force multinationale sur le terrain». Le mandat de cette force, qui «doit être très soigneusement élaboré, doit permettre le recouvrement par le gouvernement libanais légal de la totalité de sa souveraineté sur l'ensemble de son territoire».

Quelles que soient les nuances, mêmes fondamentales, entre les visions américaine et française, et les différences entre les plans de Jacques Chirac et de Fouad Siniora, le Hezbollah ne s’embarrasse pas des détails. Désavouant d’une manière indirecte le Premier ministre, le parti chiite affirme qu’il est «uniquement concerné par le cessez-le-feu immédiat et les négociations pour l’échange de prisonniers» avec Israël. «Tout ce qui sort de ce cadre n’exprime que des points de vue personnels», a déclaré Mohammad Raad, le chef du bloc parlementaire du Hezbollah.

Le Hezbollah appelle à la mobilisation générale

«Face aux objectifs de cette guerre barbare, explique le député du Hezbollah, il est inconcevable que certaines parties, au Liban, exposent leurs idées personnelles et les présentent comme étant des constantes susceptibles d’être exploitées par les Américains pour servir leurs intérêts». De son côté, Cheikh Mohammad Hussein Fadlallah, qui est considéré comme la plus haute référence religieuse chiite au Liban, a été encore plus explicite. Dans une interview mercredi à la chaîne de télévision qatari al-Jazeera, le dignitaire a refusé le déploiement d’une force internationale au Liban sud. «Nous n’acceptons pas la venue d’une telle force dans notre pays, a-t-il dit. Puisque sa mission consiste à protéger Israël, alors il faut qu’elle se déploie du côté israélien de la frontière».

Cheikh Fadlallah a même émis une fatwa (un décret religieux) appelant à la mobilisation générale. «Chaque personne qui possède une arme, même à titre individuelle, doit se diriger vers la frontière pour défendre le pays», a-t-il décrété. C’est la première fois qu’un appel à la mobilisation générale est lancé par une personnalité religieuse de cette envergure. Ces développements politiques et diplomatiques interviennent alors que l’offensive israélienne est entrée dans sa troisième semaine. Mercredi, des combats terrestres d’une rare violence ont eu lieu autour de la ville de Bint-Jbeil, où le Hezbollah oppose une résistance acharnée aux troupes israéliennes qui ont du mal à progresser au sol. L’armée israélienne a reconnu la mort de neuf militaires dans ces affrontements qui ont également fait 22 blessés dans ses rangs.

Dans la nuit de mercredi à jeudi, l’aviation israélienne a repris ses bombardements contre l’armée libanaise dont une des casernes a été touchée, dans la localité chrétienne d’Amchit, à une quarantaine de kilomètres au nord de Beyrouth. Ces raids interviennent après l’annonce par les services de sécurité libanais de l’arrestation de 40 personnes, soupçonnées de fournir des renseignements aux Israéliens pour leur permettre d’ajuster leurs tirs d’artillerie et leurs raids aériens.



par Paul  Khalifeh

Article publié le 27/07/2006Dernière mise à jour le 27/07/2006 à TU

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(©AFP/Bourgoing/RFI)