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Liban

Israël frappe le cœur du «pays chrétien»

La principale route entre Beyrouth et le nord est désormais coupée après les bombardements israéliens qui ont visé plusieurs ponts. 

		(Photo: AFP)
La principale route entre Beyrouth et le nord est désormais coupée après les bombardements israéliens qui ont visé plusieurs ponts.
(Photo: AFP)
Vendredi matin, au 24e jour de la guerre, l’aviation israélienne a bombardé le cœur de la région chrétienne du Mont Liban. Les raids ont détruit des ponts sur la principale autoroute côtière. Cette intensification des bombardements aériens intervient quelques heures après un discours dans lequel le chef du Hezbollah souffle le chaud et le froid.

De notre correspondant à Beyrouth

En l’espace de 45 minutes, vendredi matin, quatre des principaux ponts reliant entre elles les différentes parties du Mont Liban, à majorité chrétienne, ont été détruits ou sévèrement endommagés par l’aviation israélienne. Il s’agit des ponts du Casino du Liban, de Maameltein, de Halat et de Madfou. Les raids ont fait au moins trois morts et de nombreux blessés et provoqué un important incendie. Désormais, l’autoroute entre le nord du Liban et Beyrouth est impraticable. Elle était empruntée par les convois d’aides humanitaires qui transitent de Syrie à travers le seul point de passage encore ouvert entre les deux pays.

C’est la première fois depuis le début de la guerre que le cœur du «pays chrétien» est pris pour cible par l’aviation israélienne. Ces raids interviennent trois jours après un sommet religieux organisé à Bkerké, au Mont Liban, sous la houlette du Patriarche Nasrallah Sfeir, chef de l’Eglise maronite. Les chefs spirituels des différentes communautés chrétiennes et musulmanes ont condamné, dans un communiqué commun, «l’agression dirigée contre le Liban» et dénoncé «les crimes de guerre perpétrés par l’armée israélienne». Ils ont également rendu hommage à «la résistance du peuple libanais dont le Hezbollah constitue une partie intégrante».

Dès le début de l’offensive israélienne, le principal leader chrétien du pays, le général Michel Aoun, qui dirige le plus important bloc parlementaire de cette communauté (21 députés sur 128), a fermement dénoncé l’offensive israélienne qui vise, selon lui, «tous les Libanais sans exception». Il s’est même prononcé contre le déploiement au Liban de contingents multinationaux qu’il a assimilé à «une force d’occupation, dont la tâche sera de combattre le Hezbollah».

Quelques heures auparavant, à l’aube, les avions israéliens avaient lancé, en vagues successives, des raids d’une rare violence contre la banlieue sud de Beyrouth. Les appareils ont effectué au moins trente passages en l’espace d’une heure et demi. Les fortes déflagrations ont fait vibrer les vitres dans toute la capitale. Au moins un soldat libanais a été tué et trois autres blessés lorsque leur position, située près de l’aéroport de Beyrouth, a été touchée de plein fouet par un missile air-sol.     

Nasrallah souffle le chaud et le froid   

Cette escalade dans les opérations militaires israéliennes survient au lendemain du tir par le Hezbollah de plusieurs dizaines de roquettes sur le nord d’Israël, faisant huit morts et des dizaines de blessés. Mais elle peut être aussi interprétée comme une fin de non-recevoir à la proposition faite par le secrétaire général du Hezbollah de suspendre les attaques contre les cibles civiles de part et d’autres et de confiner le conflit aux seuls militaires.

«Vous attaquez nos villes, nos villages, nos civils et notre capitale. Nous réagissons. Dès que vous déciderez d'arrêter votre campagne contre nos villes, nos villages, nos civils et nos infrastructures, nous ne tirerons plus de roquettes, contre aucune ville ou implantation israélienne», a assuré Hassan Nasrallah lors d’une intervention télévision diffusée par la chaîne de son parti al-Manar et reprise, en direct, par toutes les télévisions libanaises et panarabes. C'est la première fois depuis le début des combats que le Hezbollah formule une telle proposition. En revanche, Hassan Nasrallah a menacé de frapper Tel-Aviv si Israël visait le centre de Beyrouth. «Si vous bombardez notre capitale Beyrouth, nous bombarderons votre capitale», a menacé Hassan Nasrallah. Les combattants du Hezbollah se battront «jusqu'au dernier souffle et jusqu'à la dernière balle», a-t-il promis.

Effectivement, sur le terrain au sud du Liban, les combattants du Hezbollah opposent une résistance farouche à la progression des troupes israéliennes. Après 24 jours de guerre, les combats au sol se concentrent toujours autour des localités situées à la frontière. Les troupes israéliennes avancent très lentement et sont contraintes de livrer de rudes batailles à chaque fois qu’elles tentent de s’approcher des villages libanais.

Ces dernières 48 heures, l’armée israélienne a progressé parfois de trois kilomètres à l’intérieur du territoire libanais. Mais elle est partout harcelée par des combattants du Hezbollah qui connaissent bien le terrain et se déplacent sans cesse. Armés de missiles anti-chars de type Sagger, RPG7 ou Milan, ils arrivent à infliger aux assaillants des pertes importantes. Selon l’expert militaire Sobhi Soueidane, l’objectif des troupes israéliennes est d’occuper quatre collines stratégiques leur permettant de surplomber une grande partie du Sud Liban allant de Naqoura, sur la côte, au Arkoub, limitrophe des fermes de Chebaa, dans le secteur oriental.

Sur le plan politique, et alors que les concertations se poursuivent à Paris, New York et d’autres capitales, pour tenter d’aboutir à un arrêt des hostilités, le Hezbollah, par la bouche de son numéro 2, cheikh Naïm Kassem, a posé ses nouvelles conditions. Désormais, la priorité n’est plus à un cessez-le-feu, mais à un «arrêt de l’agression». Cela passe par «le retrait des troupes israéliennes qui ont pénétré en territoire libanais, le retour dans leurs villes et villages de tous les déplacés et, enfin, le cessez-le-feu».

Vingt-quatre jours après le début de la guerre, les Libanais ont l’impression de revenir à la case départ.



par Paul  Khalifeh

Article publié le 04/08/2006Dernière mise à jour le 04/08/2006 à TU

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(©AFP/Bourgoing/RFI)

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Philippe Douste-Blazy

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«Au Liban, c'est un désastre humanitaire avec plus d'un million de personnes déplacées»

[04/08/2006]