Liban
Une trêve fragile s’installe
(Photo: AFP)
De notre correspondant à Beyrouth
Trente-trois jours après le début de la guerre et 72 heures après le vote au Conseil de sécurité de la résolution 1701, le Liban et Israël ont convenu de «l’arrêt des opérations militaires» à partir de lundi, 5 heures temps universel.
L’annonce de la suspension des hostilités a été accueillie avec beaucoup de scepticisme par les Libanais. Car il ne s’agit pas d’un cessez-le-feu sur tous les fronts mais uniquement d’un arrêt des «opérations offensives», une expression qui peut donner lieu à de multiples interprétations.
L’inquiétude de la population se justifie par le fait que les combats ont redoublé de violence après le vote de la résolution 1701, vendredi. Pendant plus de 48 heures, Israël et le Hezbollah se sont affrontés sans répit sur un front large de
Lourdes pertes israéliennes
L’Etat hébreu a essayé en vain d’enregistrer un succès significatif au sud du Liban, alors que le Hezbollah s’est efforcé de l’en empêcher à tout prix.
L’armée israélienne a subi des pertes très lourdes, laissant sur le terrain des dizaines de morts et de blessés. Et même si elle a réussi à progresser d’une dizaine de kilomètres par endroit, d’intenses combats se poursuivaient à un kilomètre de la frontière. Les bombardements de part et d’autres étaient encore plus violents que les jours précédents.
Rien que pour la journée de dimanche, 37 personnes dont quatre soldats libanais ont été tuées, et 90 autres civils blessés. La banlieue sud de Beyrouth a été soumise à un infernal matraquage aérien avec, parfois, vingt raids en l’espace de deux minutes.
Le Hezbollah, lui, a tiré quelque 250 roquettes sur les villes et villages du nord d’Israël, un record qui montre que la puissance de feu du parti reste très importante malgré les 8 000 raids menées par l’aviation israélienne et les 120 000 obus tirés par l’artillerie, depuis le 12 juillet.
L’arrêt des opérations n’est pas un cessez-le-feu
Moins d’une heure avant l’arrêt des opérations militaires, l’aviation israélienne a mené des raids contre le camp palestinien d’Ain el-Héloué, à l’est de Saida, faisant des morts et des blessés. A l’aube, les appareils avaient attaqué une zone résidentielle au nord
L’arrêt des opérations militaires ne signifie donc pas un cessez-le-feu. Les raids aériens devraient s’arrêter en profondeur en territoire libanais, de même que les tirs de roquettes sur le nord d’Israël. Mais les combats terrestres pourraient se poursuivre, d’autant que plus de 30 000 soldats israéliens se trouvent au sud du Liban, face à plusieurs milliers de combattants du Hezbollah.
La situation est donc extrêmement compliquée et la trêve fragile. Tant que les belligérants sont face à face, le doigt sur la détente, la situation peut dégénérer à n’importe quel moment.
Un terrain miné
La résolution 1701 prévoit l’arrêt des hostilités, puis le retrait israélien parallèlement au déploiement de l’armée libanaise et des forces des Nations unies. Avant le début de ce processus, il y a une période de flottement de plusieurs jours, en attendant que les 15 000 soldats libanais et autant de casques bleus soient prêts à être déployés.
La trêve n’était pas encore entrée en vigueur que des divergences sont apparues entre les différentes forces politiques libanaises. Le Conseil des ministres a reporté sine die une réunion qu’il devait tenir dimanche pour examiner les modalités et le mécanisme de déploiement de l’armée au Sud.
Les milieux de la coalition du 14 mars, proche des Etats-Unis, ont indiqué que le report était dû à des divergences sur la question du désarmement du Hezbollah. Mais pour le parti de Hassan Nasrallah, il n’est pas question de rendre les armes tant que les troupes israéliennes occupent le sud du Liban et les fermes de Chebaa.
Déterminé à ne faire «aucun cadeau» aux Israéliens, il affirme que le déploiement de l’armée est une question technique et non pas politique, dont les détails doivent être discutés avec le commandement de l’armée et non pas en Conseil des ministres.
On le voit bien, le terrain politique n’est pas moins miné que le champ de bataille.
par Paul Khalifeh
Article publié le 14/08/2006Dernière mise à jour le 14/08/2006 à TU