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Burkina Faso

Militaires et policiers : la paix des braves après 5 morts

Forces de l'ordre du Burkina Faso en action. Après ces violences, les autorités se sont résolues à reporter <i>sine die</i> les sommets de la Cedeao et de l'Union économique et monétaire ouest-africaine. 

		(Photo: Alpha Barry/RFI)
Forces de l'ordre du Burkina Faso en action. Après ces violences, les autorités se sont résolues à reporter sine die les sommets de la Cedeao et de l'Union économique et monétaire ouest-africaine.
(Photo: Alpha Barry/RFI)
Les responsables des forces armées et de la police, avec à leur tête leur ministre respectif, se sont rencontrés mardi à Ouagadougou pour aplanir les divergences qui ont conduit aux violents affrontements entre militaires et policiers, les 20 et 21 décembre 2006 dans la capitale burkinabé. Bilan officiel : cinq morts et plusieurs blessés. A l’origine, une altercation entre policiers et militaires qui s’est soldée par la mort d’un soldat. En réaction, les militaires ont assiégé la ville et s’en sont pris aux symboles de la police.

De notre correspondant au Burkina Faso

Des militaires et des policiers qui s’affrontent violemment au fusil-mitrailleur et à l’arme lourde en pleine ville, à la veille d’importants sommets de chefs d’Etat (Cedeao et UEMOA) que le pays est censé accueillir… la scène parait encore surréaliste pour la majorité des Burkinabé. Et pourtant, c’est ce qui est bien arrivé, entraînant le report des deux sommets alors que les réunions des conseils des ministres des deux institutions avaient commencé leurs travaux.

Certes, le calme est revenu depuis, mais les événements ont été si sanglants qu’ils continuent de marquer les esprits. Et c’est pour dédramatiser les choses que les responsables de la police et la hiérarchie militaire se sont retrouvés, mardi, autour de leurs ministres respectifs : Yéro Boly, chargé de la Défense et Djibrill Bassolé, ministre de la Sécurité. A cette occasion, l’armée a assuré la police qu’elle pouvait reprendre son travail interrompu à Ouagadougou depuis le saccage et l’incendie de ses bureaux et véhicules d’intervention.

Depuis ces événements, les policiers vivent cloîtrés chez eux de peur de subir d’autres représailles des jeunes soldats qui ont abattu froidement, le 20 décembre dernier, deux agents en poste à la direction de la police. Les chefs militaires ont donné des assurances aux policiers qu’il n’y avait plus de risque d’actions isolées de la part de soldats en colère. La police a demandé aux responsables de l’armée de faire en sorte que de telles réactions aussi disproportionnées soient bannies à jamais.

Dans un communiqué de presse conjoint signé des deux ministres, les deux parties indiquent avoir mis en place un cadre de concertation pour «une meilleure gestion des relations entre la police et l’armée». Objectif : prévenir tout débordement au sein des troupes.

«Comment redonner confiance ?»

Il reste maintenant à gérer les conséquences de ces affrontements. Côté police, l’urgence est la reprise du travail. Pour cela, il va falloir retaper les bureaux dont les murs portent encore les traces du feu et les vitres toujours brisées. Il faut aussi et surtout trouver au plus vite des véhicules d’intervention. Presque tout le parc automobile a été détruit par les soldats qui ont utilisé parfois utilisé des RPG 7 et tiré au mortier. Le retour en fonction de la police est d’autant plus pressant que plus de 600 détenus de la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou sont en fuite après avoir été remis en liberté par les soldats en colère.

Côté militaire, il y a urgence à rassembler toutes les armes sorties des magasins du camp Guillaume-Ouédraogo, la garnison des soldats manifestants. D’après nos informations, certaines de ces armes ainsi que les munitions non utilisées sont encore dans la nature. Mission a été confiée aux chefs militaires de convaincre leurs troupes.

Pendant que militaires et policiers font le ménage, du côté de la population, on s’interroge sur les conséquences de cette affaire sur l’image du pays. «Nous n’avons rien à vendre à l’extérieur, si ce n’est notre sérieux et la stabilité du pays. Comment redonner confiance ?», s’interroge un observateur du pays. La presse se montre également amère. Dans un éditorial titré «Disons les quatre vérités aux militaires», le quotidien d’Etat Sidwaya écrit que les soldats ont poignardé dans le dos le pays, sa démocratie et sa diplomatie.

Dans les chancelleries occidentales à Ouagadougou, on est encore sous le choc de ces événements, dans un pays jusque-là considéré comme un modèle de stabilité et de paix. On déplore le manque de fermeté du gouvernement à défaut de sanctions immédiates. «Qui va payer tous ces véhicules détruits qui, pour la plupart, étaient des dons de l’extérieur ?», s’interroge un diplomate qui n’exclut pas un coup de froid dans la coopération. «Il est difficile d’avoir confiance dans un pays où des soldats peuvent à tout moment tout remettre en cause», explique-t-il.



par Alpha  Barry

Article publié le 27/12/2006 Dernière mise à jour le 27/12/2006 à 12:31 TU

Audio

Alpha Barry

Correspondant de RFI à Ouagadougou

«Le parc automobile de la police de Ouagadougou a presque entièrement été détruit par les militaires.»

[27/12/2006]

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