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24e sommet Afrique-France

Chine, Brésil… les nouveaux partenaires de l’Afrique

Novembre 2006 : la place Tiananmen à Pékin était décorée aux couleurs africaines. Le prochain sommet Chine-Afrique se tiendra en 2009 au Caire, en Egypte. 

		(Photo : AFP)
Novembre 2006 : la place Tiananmen à Pékin était décorée aux couleurs africaines. Le prochain sommet Chine-Afrique se tiendra en 2009 au Caire, en Egypte.
(Photo : AFP)
La mondialisation et l’émergence de nouvelles puissances comme la Chine, l’Inde ou le Brésil offrent l’opportunité de nouveaux partenariats à l’Afrique, traditionnellement tributaire de l’aide et du commerce de ses bailleurs de fonds occidentaux et japonais. Déjà les responsables africains rêvent d’une coopération Sud-Sud, sans conditions politiques ni modèle imposé, qui leur apporterait de l’argent frais pour leurs infrastructures et donnerait un coup de fouet à leurs échanges commerciaux.

Les Africains se félicitent particulièrement des premiers sommets Chine-Afrique et Amérique latine-Afrique, organisés fin 2006, qui ont illustré les nouveaux partenariats s’offrant à elle, à l’heure où ces groupes régionaux réclament une plus grande participation dans les affaires du monde, en particulier au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. De leur côté, les pays industrialisés du G8 et de l’OCDE en général, qui restent les principaux fournisseurs d’aide au développement, se montrent pour le moment relativement sereins et se déclarent favorables au développement d’une telle coopération Sud-Sud.

Ils observent toutefois de près la présence désormais continentale de la Chine, suivie encore de loin par l’Inde, et le nouvel intérêt pour l’Afrique du Brésil qui coopérait déjà étroitement avec les pays lusophones, en particulier l’Angola et le Mozambique. Car les réserves africaines de pétrole et de gaz ainsi que les minerais du continent intéressent le monde entier. «Il y a une concurrence directe sur le plan commercial. Mais nous pensons surtout que les Africains doivent demander à la Chine ce qu’ils ont convenu avec les pays de l’OCDE, c’est-à-dire un vrai partenariat – et non pas un échange commercial inégal… – basé sur la prévisibilité, la transparence et le suivi», souligne un diplomate français. Il pose aussi, en privé, la question de la dette africaine : alors que l’Occident a consenti un important effort financier pour alléger l’endettement du continent, il ne faudrait pas que l’Afrique se réendette auprès de ses nouveaux partenaires. Paul Wolfowitz, le président américain de la Banque mondiale, avait déjà soulevé ce problème.

La percée continentale chinoise

Depuis 2000 et l’organisation d’un premier forum ministériel sino-africain, la Chine a fait une percée spectaculaire sur le continent avec, comme point d’orgue, un premier sommet de chefs d’Etat organisé, en novembre 2006 à Pékin, qui a lancé un «partenariat stratégique» pour 2007-2009. Parmi les mesures concrètes annoncées par le président Hu Jintao figurent le doublement de l’aide chinoise à l’Afrique d’ici 2009, l’octroi de 3 milliards de dollars de prêts et de 2 milliards de dollars de crédits à des conditions préférentielles, ainsi que la création d’un fonds de développement de 5 milliards de dollars pour encourager les entrepreneurs chinois à investir en Afrique et à les soutenir.

Pékin s’est aussi engagé à construire un centre de conférences pour l’Union africaine afin de soutenir les efforts d’unité et d’intégration des pays du continent, et à annuler les prêts publics sans intérêt arrivant à échéance en 2005, ceci pour les pays les plus pauvres ayant des relations diplomatiques avec la Chine. Le président Hu Jintao et le Premier ministre Wen Jiabao ont visité 10 pays africains en 2006, une poussée diplomatique qui a vu deux Etats, le Sénégal et le Tchad, renouer avec Pékin au détriment de Taiwan – cette dernière s’était montrée très généreuse avec les Africains dans les années quatre-vingt-dix.

Dans un document publié en janvier 2006, Pékin avait insisté sur les bénéfices mutuels d’un tel partenariat : selon le ministère chinois du Commerce, la Chine a aidé, au cours du demi-siècle passé, 53 pays africains avec près de 800 projets. Cette aide s’est faite sans aucune condition politique : la Chine coopère ainsi non seulement avec le Soudan mais aussi le Zimbabwe, mis au ban de la communauté internationale – mais non de l’Afrique –. En 2005, le commerce entre la Chine et l’Afrique a atteint 39,74 milliards de dollars, soit le double du montant relevé pour l’année 2000, en hausse de 35% par rapport à 2004. Il devrait dépasser 50 milliards de dollars en 2006. Le pétrole figure en bonne place : en 2005, la Chine a importé d’Afrique 38,3 millions de tonnes de pétrole brut, soit 30% de ses importations totales. Pékin a de plus annoncé son intention d’ouvrir des banques sur le continent, et la Banque africaine de développement doit, en mai 2007, tenir ses assemblées annuelles à Shanghai.

L’Inde s’appuie sur des réseaux anciens

Si la Chine est en position dominante, elle se trouve parfois en concurrence directe avec l’autre géant asiatique, l’Inde. Pékin a ainsi gagné un important contrat pétrolier en Angola mais collabore, dans le même secteur, avec New Delhi au Soudan. Encore loin derrière son voisin chinois, l’Inde devrait toutefois poursuivre sa progression. Les prévisions du gouvernement de New Delhi font en effet état d’une demande accrue en énergie, l’Inde devant importer d’ici 2030 quelque 90% du pétrole et gaz naturel qu’elle consommera.

Comme Pékin, New Delhi s’intéresse au premier chef aux pays pétroliers comme le Nigeria, premier producteur de l’Afrique subsaharienne, l’Angola ou la Libye mais aussi à de nouveaux producteurs comme la Mauritanie et le Tchad, ainsi qu’aux producteurs potentiels, au Sahel notamment. Le ministère indien du Pétrole a organisé, en mai 2006, une réunion avec les dirigeants de l’industrie pétrolière de quinze pays africains (notamment l’Angola, le Congo, la Côte d’Ivoire, l’Ethiopie, le Ghana, la Guinée équatoriale, le Nigeria, le Sénégal…).

L’informatique, un des points forts de l’Inde, constitue un autre moyen de pénétration. Les dirigeants indiens ont proposé de partager leur savoir-faire dans ce secteur avec les Africains, utilisant notamment l’Ile Maurice, où vit une importante communauté d’origine indienne, comme tête de pont dans ce secteur. On retrouve en effet des communautés d’origine indienne aussi bien dans l’est de l’Afrique (Kenya, Ouganda) qu’en Afrique australe. D’où des relations commerciales déjà anciennes, y compris dans le domaine des pierres et métaux précieux, comme les diamants et l’or.

Les principaux partenaires économiques de l’Inde sur le continent sont l’Afrique du Sud, le Nigeria et le Soudan. Mais elle a aussi ouvert une ligne de crédit de 500 millions de dollars au bénéfice de huit pays d’Afrique de l’Ouest, et a mis une ligne de crédit de 200 millions de dollars à la disposition du Nouveau partenariat pour le développement économique de l’Afrique (Nepad).

Afrique et Amérique du Sud, «deux régions avec d’immenses possibilités»

L’Amérique latine, qui politiquement vire à gauche, et l’Afrique ont tenu leur premier sommet fin novembre 2006 à Abuja (Nigeria) ; celui-ci s’est traduit par un appel à une forte alliance Sud-Sud pour le développement, une meilleure représentation des deux continents sur la scène internationale et une résistance accrue aux pressions des pays riches occidentaux. «L’Afrique et l’Amérique du Sud sont deux régions avec d’immenses possibilités. Ensemble, nous représentons 1,2 milliard d’habitants, nous avons d’abondantes terres cultivables et de vastes ressources minérales. Ceci devrait nous mettre dans une position avantageuse dans le contexte d’engagements multilatéraux globaux», avait déclaré le président nigérian, Olusegun Obasanjo, hôte du Sommet.

Le chef d’Etat brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, à l’origine de cette réunion, a mis en garde contre un échec du cycle de Doha de l’Organisation mondiale du commerce sur la libéralisation du commerce mondial, qui «condamnerait les deux continents à un extrême dénuement». Le président vénézuélien Hugo Chavez, qui n’a pu se rendre à Abuja, avait proposé au sommet de l’Union africaine, à Banjul en juillet 2006, l’institution d’un partenariat stratégique – formule à la mode ! –, entre pays du Sud, à travers la création d’une commission du pétrole, d’une compagnie de télévision, d’une banque et d’une université du Sud. Les Africains ont réclamé plus d’investissements de la part de leurs partenaires latino-américains, qui à ce stade font surtout du commerce. Message bien reçu par le président brésilien : il estime que son pays qui, conséquence de l’esclavage, compte la plus importante population noire dans le monde après le Nigeria, «a une dette envers l’Afrique».

par Marie  Joannidis

Article publié le 05/02/2007 Dernière mise à jour le 05/02/2007 à 15:35 TU

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