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24e sommet Afrique-France

De nouveaux financements du développement à l'essai

En décembre 2005, la France décide d’instaurer une taxe sur les billets d’avion. Appliquée à partir du 1er juillet 2006, la taxe est acquittée sur tous les billets d’avion achetés en France. 

		(Photo: Air France)
En décembre 2005, la France décide d’instaurer une taxe sur les billets d’avion. Appliquée à partir du 1er juillet 2006, la taxe est acquittée sur tous les billets d’avion achetés en France.
(Photo: Air France)
Elément moteur dans la recherche de sources innovantes de financement du développement, la France a instauré en juillet 2006 une taxe sur les billets d’avion. Celle-ci finance principalement l’Unitaid, une facilité internationale d’achat de médicaments créée en septembre 2006 par cinq pays, le Brésil, le Chili, la France, la Grande-Bretagne et la Norvège.

L’instauration de la taxe sur les billets d’avion est le résultat d’un long processus lancé à l’initiative du président Jacques Chirac. A la suite de la publication, en septembre 2004, d’un rapport sur les sources innovantes de financement du développement (1), Paris a décidé de soutenir la mise en place de financements additionnels, parmi lesquels les mécanismes d’incitation aux contributions privées, la proposition britannique de Facilité financière internationale (IFF) et les prélèvements de solidarité internationaux. Pour ces derniers, la France met l’accent sur quatre assiettes possibles : contribution à très faible taux sur une fraction des transactions financières internationales, prélèvement sur les flux de capitaux à destination ou en provenance des pays pratiquant le secret bancaire, contribution sur le carburant utilisé par le transport aérien et maritime, et prélèvement sur les billets d’avion.

L’objectif des financements additionnels est de suppléer à l’insuffisance de l’aide publique au développement – sachant qu’une augmentation d’au moins 50 milliards de dollars par an serait nécessaire pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement en 2015 – et surtout à sa déficience en termes de prévisibilité et de stabilité. Ils sont désormais inscrits à l’ordre du jour de toutes les grandes enceintes internationales (ONU, FMI, Banque mondiale, G8, Union européenne). En septembre 2005, lors du Sommet des Nations unies sur la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement, 79 pays ont apporté leur soutien à la déclaration sur les sources innovantes de financement du développement, co-parrainée par l’Algérie, l’Allemagne, le Brésil, le Chili, l’Espagne et la France.

Unitaid : plus de 230 millions d’euros escomptés en 2007

Pour prouver la faisabilité des prélèvements internationaux, et sous l’impulsion volontariste de Jacques Chirac, la France décide, en décembre 2005, d’instaurer la taxe sur les billets d’avion, la plus facile à mettre en œuvre. Et organise, les 28 février et 1er mars 2006 à Paris, une conférence ministérielle au cours de laquelle 44 Etats adhèrent au «Groupe pilote sur les contributions de solidarité en faveur du développement». Appliquée à partir du 1er juillet 2006, la taxe est acquittée sur tous les billets d’avion achetés en France. Son montant varie selon la destination du vol et la classe du voyage (de 1 euro par passager en classe économique sur les vols nationaux et infra-européens à 40 euros pour les classes affaires et première sur les autres vols). Environ 50 millions d’euros ont été récoltés en 2006 et il est prévu que le montant atteigne 200 millions d’euros en année pleine.

Lors de la conférence de Paris, le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, avait proposé d’utiliser les revenus de la taxe pour financer une Facilité internationale d’achat de médicaments (FIAM), dénommée Unitaid, dans l’optique de faire baisser le prix des médicaments contre le sida, la tuberculose et le paludisme, trois graves pandémies qui touchent les populations les plus pauvres. Unitaid est officiellement lancée le 19 septembre 2006 à New York, en marge de la session d’ouverture de l’assemblée générale des Nations unies, par les représentants des cinq pays fondateurs : France, Brésil, Chili, Norvège et Royaume-Uni (http://www.unitaid.eu/).

En octobre 2006, Philippe Douste-Blazy est élu président du conseil d’administration d’Unitaid, qui est composé de dix membres, dont cinq issus des pays fondateurs : un pour le continent africain, un pour l’Asie, un pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et deux représentants d’ONG. Afin d’éviter toute dérive bureaucratique, le secrétariat et le fonds fiduciaire d’Unitaid sont hébergés par l’OMS. Des partenariats ont été noués avec les organisations internationales existantes en matière de santé (Fonds mondial de lutte contre le sida, etc.) ainsi qu’avec des ONG comme la Fondation Clinton. Unitaid fonctionne dans une «logique de niche». Ses actions prioritaires pour 2007 portent sur la mise au point de formules pédiatriques contre le sida et la tuberculose, la mise en place de traitements antirétroviraux ou antipaludéens de 2e génération à des prix plus bas à destination des pays en développement, de traitements contre la tuberculose multirésistante ainsi que le soutien aux programmes de préqualification de l’OMS. Le ministre français escompte obtenir 230 millions d’euros dès 2007 et jusqu’à 400 millions d’euros à partir de 2009.

De grands absents

Toutefois, seuls 19 pays ont engagé des procédures devant conduire à l’instauration d’une contribution de solidarité sur les billets d’avion ou d’un mécanisme proche pour financer l’Unitaid. Les pays européens sont peu nombreux (Chypre, France, Luxembourg, Norvège, Royaume-Uni), tandis que l’on compte de grands absents comme les Etats-Unis, le Canada, le Japon ou la Chine. En revanche, des pays africains francophones ont adopté ce mécanisme (Cameroun, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, Madagascar, Maurice, Mali), ainsi que quelques pays sud-américains (Brésil, Chili, Nicaragua) ou asiatiques (Cambodge, Corée du Sud, Jordanie).

Si le processus d’adhésion à la taxe sur les billets d’avion n’est pas terminé (l’Espagne et l’Algérie ont annoncé leur intention de la mettre en œuvre), d’autres financements innovants en faveur du développement ont été lancés comme la Facilité internationale de financement pour la vaccination ou IFFIm (International Finance Facility for Immunisation) (http://www.iff-immunisation.org/), projet pilote de l’IFF appliqué à la vaccination. Créé en février 2006 à l’initiative de la Grande-Bretagne avec le soutien de pays européens (Espagne, France, Italie, Norvège, Suède), du Brésil et de l’Afrique du Sud, l’IFFIm a pour objet de mobiliser des capitaux garantis par des engagements de donateurs sur une période de dix ans pour financer les activités de l’Alliance GAVI, qui rassemble les principaux acteurs de la vaccination. En novembre 2006, l’IFFIm a émis avec succès sur les marchés financiers des obligations pour 1 milliard de dollars. A terme, il est prévu de mobiliser 4 milliards de dollars au cours des dix prochaines années sur les marchés internationaux des capitaux, ce qui devrait permettre de vacciner plus de 500 millions d’enfants et de sauver 10 millions de vies.

par Isabelle  Verdier

Article publié le 06/02/2007 Dernière mise à jour le 06/02/2007 à 16:45 TU

(1) Rapport de Jean-Pierre Landau sur les "nouvelles contributions financières internationales", septembre 2004, La Documentation française, www.ladocumentationfrancaise.fr/catalogue/9782110057549/index.shtml

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