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France/Rwanda

Demande d’asile à nouveau rejetée

<font size="1">Agathe Habyarimana (</font><a href="http://www.guide2womenleaders.com/" target="_blank"><font size="1">guide2women<br>leaders.com</font></a><font size="1">).</font>
Agathe Habyarimana (guide2women
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Pour la seconde fois, la veuve de l’ancien président rwandais Juvénal Habyarimana s’est vue déboutée de sa demande de statut de réfugié en France. La Commission de recours des réfugiés retient les présomptions alléguées par l’OFPRA selon lesquelles «il existe des raisons de penser» qu’Agathe Kanziga «aurait participé au génocide» de 1994.

De notre correspondante à La Haye

 

La Commission de recours des réfugiés a débouté Agathe Kanziga, la veuve de l’ancien président rwandais Juvénal Habyarimana, de sa demande de statut de réfugié en France. Son avocat, maître Philippe Meilhac, a annoncé son intention de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat. «Cette prise de position vient encourager des personnes à porter plainte», a-t-il en outre estimé. Mardi après-midi, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda, une association créée en novembre 2001 en France, déposait plainte contre Agathe Kanziga pour complicité de génocide et de crimes contre l’humanité devant le tribunal d’Evry. Selon les plaignants, Agathe Kanziga a eu «un rôle de coordinatrice occulte de différents cercles politiques, économiques, militaires et médiatiques avant le génocide, qui a contribué à sa préparation». Considérée par plusieurs experts comme un élément central de l’Akazu, un cercle informel accusé d’avoir mis en place un pouvoir parallèle ayant conduit au génocide de 1994 au cours duquel près de 800 000 tutsis ont été massacrés, Agathe Kanziga a échappé, jusqu’à ce jour, à toutes poursuites judiciaires, même si le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) continue d’enquêter sur le dossier Akazu. Selon Steven Rapp, ancien chef des enquêtes, «il reste possible pour le TPIR, ou pour des juridictions nationales, de charger les personnes responsables pour les ordres donnés à la Garde présidentielle lors des trois premiers jours du génocide». Entre le 6 et le 9 avril 1994, les opposants au régime étaient abattus par la garde présidentielle. Leur liste aurait été constituée le soir de l’attentat, au domicile de la famille Habyarimana, selon plusieurs témoins,

 

Les témoins de l’intérieur

 

Mais comme dans toute mafia, les victimes directes du «clan de Madame» sont difficiles à identifier : les auteurs agissaient par procuration. Seuls les hommes de l’intérieur peuvent apporter des preuves tangibles. Ils sont rares. Michel Bagaragaza est l’un d’eux. L’ancien patron de l’Office de thé du Rwanda fait partie de ceux qui ont bénéficié du système. Lors de son témoignage contre Protais Zigiranyirazo, à Arusha, il expliquait que le centre de l’Akazu «se chargeait de remplir toutes les cases de l’organigramme (…) de l’administration centrale, de l’exécutif, du judiciaire et du législatif, ainsi que du secteur privé et religieux». Bref, l’Akazu plaçait ses hommes aux commandes du pays. Le cœur de l’Akazu ? Une poignée de personnalités, constituée de proches du couple présidentiel, dont les frères de la veuve. Elie Sagatwa, décédé dans l’avion présidentiel, Protais Mpiranyia, chef de la Garde présidentielle, André Rwabukumba, homme d’affaires et patron de la Centrale et Protais Zigiranyirazo, dit «Z», puissant préfet.

 

Monsieur «Z» en procès à Arusha

 

A ce jour, seul monsieur «Z» est dans le box d’Arusha où il doit répondre de génocide et crimes contre l’humanité. Il avait un temps été inquiété par le FBI, pour sa participation présumée dans l’assassinat de Diane Fossey, dont la vie avait inspiré le film Gorilles dans la brume. Le chef de la Garde présidentielle, Protais Mpiranyia, est lui aussi inculpé, mais en fuite. Il fut un temps repéré en Ouganda et en République démocratique du Congo (RDC). Parmi les proches mis en accusation figure aussi Félicien Kabuga, qui poursuit, jusqu’ici, sans grand souci, ses affaires d’import-export de camions Mercedes dans l’est africain, comme peu avant le génocide du 6 avril 1994, il importait des machettes à bas prix depuis la Chine, selon les accusations d’Arusha. Les preuves sont aussi difficiles à trouver contre Séraphin Rwabukumba. Ce dernier fut un temps inquiété en Belgique, pour son implication dans l’assassinat de trois coopérants qui menaçaient de révéler des détournements de fonds de la coopération belge. Aujourd’hui encore, charger l’Akazu fait peur. Dans son sillage, Michel Bagaragaza avait entraîné le repentir de l’ancien patron de l’Office des parcs nationaux, Juvénal Uwilingiyimana. L’homme avait été retrouvé mort dans un canal de Bruxelles, le 17 décembre 2005, sans que la police belge ne soit cependant parvenue à ce jour à éclaircir les circonstances du décès.

 

L’étau se resserre

 

Comme Séraphin Rwabukumba, Agathe Kanziga avait été évacuée par les forces françaises, le 9 avril 1994. Accueillie au Quai d’Orsay quelques jours plus tard, elle avait gardé des liens avec le gouvernement à l’œuvre pendant le génocide, lit-on dans la décision rendue par la Commission de recours des réfugiés, dont Pauline Nyiramasuhuko ou Augustin Ngirabatware. Inculpé par le TPIR, le ministre du Plan est toujours en fuite. En novembre 1999, il avait échappé à son arrestation à Paris, grâce à un passeport gabonais. Comme lui, depuis le génocide de 1994, Agathe Kanziga circulait avec un vrai-faux passeport délivré par l’ancien président du Zaïre, le maréchal Mobutu, et avec un passeport diplomatique gabonais établi sous une fausse identité. En situation illégale sur le territoire français depuis 1998, Agathe Kanziga s’était portée partie civile dans le dossier du juge Bruguière sur l’attentat contre l’avion présidentiel. Le juge français a conclu à la responsabilité des autorités rwandaises actuelles.

 



par Stéphanie  Maupas

Article publié le 15/02/2007 Dernière mise à jour le 15/02/2007 à 17:56 TU