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Grippe aviaire

L'Indonésie et l'OMS trouveront-elles un terrain d'entente?

L'Indonésie reste le pays le plus touché par la maladie en termes de mortalité humaine, mais aussi, la seule nation où la transmisssion interhumaine a été confirmée par des analyses en laboratoire. 

		(Photo : AFP)
L'Indonésie reste le pays le plus touché par la maladie en termes de mortalité humaine, mais aussi, la seule nation où la transmisssion interhumaine a été confirmée par des analyses en laboratoire.
(Photo : AFP)
Jusqu’à demain mardi, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le pays le plus touché au monde par la grippe aviaire, se sont attablés à Jakarta (Indonésie) autour du dossier brûlant de partage gratuit des échantillons de virus H5N1, nécessaire pour accélérer la confection d’un vaccin.

Avec, jusqu’à ce jour, soixante-six personnes décédées de la grippe aviaire depuis le début de la flambée de la maladie, en 2003, l’Indonésie est le premier pays victime de l’épizootie. En février 2007, la ministre indonésien de la Santé, Siti Fadilah Supari, annonçait avoir signé un accord sans précédent avec un groupe pharmaceutique américain, la société Baxter International. Le contrat prévoit l’envoi gracieux de souches virales de H5N1 en échange de vaccins contre l’épidémie, à tarif préférentiel, en cas d’urgence. «Nous avons le virus, c’est nous qui sommes malades», avait souligné Siti Fadillah. La connaissance des séquences virales conditionne la mise au point de vaccins et l’OMS avait immédiatement dénoncé ce contrat, au nom de la santé publique et de l’intérêt général. Elle revient aujourd’hui à la charge, appelant au «principe de partage gratuit d’échantillons».

L’Indonésie se sent doublement lésée : elle compte soixante-six décès humains dus à la grippe aviaire, sur 171 à l’échelle planétaire. Ce bilan la place au premier rang des pays fournisseurs de souches virales de H5N1, alors que ses chercheurs ne sont pas associés à la recherche. Or, un dépôt de brevet de vaccin rapporte beaucoup d’argent et face à la menace d’une épidémie mondiale de grippe aviaire, le marché est prometteur et les laboratoires sont financièrement tous mobilisés dans une course contre la montre.

En monnayant un contrat d’exclusivité, souches contre vaccins, avec la multinationale Baxter, le gouvernement indonésien a donc tiré son épingle du jeu, au risque de faire perdre du terrain aux autres laboratoires -qui travaillent sous les auspices de l’OMS. Non seulement l’Indonésie ne veut pas être piégée par le futur coût des vaccins mais, de surcroît, se sentant particulièrement vulnérable, elle souhaite même bénéficier de tarifs préférentiels en cas d’épidémie.

La rencontre de deux jours entre l’organisme international et le pays le plus affecté par les pertes humaines dues à l’aviaire, a pour thème : «Pratiques responsables de partage des virus de la grippe aviaire et des bénéfices à en tirer». De quels bénéfices s’agit-il au juste : santé publique ou intérêts financiers? Les deux à la fois donc. Car si l’OMS souhaite bel et bien la transparence des données au nom d’une noble cause, qui est d’accélérer la recherche pour parer au plus vite une pandémie mondiale, elle protège aussi une quinzaine de laboratoires dans le monde qui, selon un arrangement conclu sous ses auspices, se partagent confidentiellement des informations cruciales sur le virus H5N1.

86 personnes infectées, 66 cas de décès

Cette situation n’est pas acceptable, selon Siti Fadilah Supari, qui pointe le fait que «la législation actuelle exige que les pays envoient leurs échantillons de virus à l’OMS, mais [qu’] il n’existe pas de législation correspondante exigeant une collaboration avec les pays d’origine pour commercialiser les vaccins créés. Le système actuel est tel que l’OMS et ses affiliés partagent des échantillons de virus avec des sociétés privées, sans collaborer avec les pays d’où proviennent ces échantillons de virus. C’est  inacceptable pour les pays en voie de développement», s’insurge Siti Fadilah Supari.

En Indonésie, où la soixante-sixième victime a été annoncée le 19 mars dernier, le nombre de cas de grippe aviaire a augmenté récemment après plusieurs mois d’apparente accalmie. Néanmoins, tout en insistant sur le fait que la lutte restait de mise, les experts sanitaires qui s’étaient réunis à Vérone (Italie, nord) le 22 mars dernier, pour une conférence internationale, ont estimé que les foyers de grippe aviaire ne devraient pas connaître, en 2007, de «flambée comparable à celle de 2006».

par Dominique  Raizon

Article publié le 26/03/2007 Dernière mise à jour le 26/03/2007 à 16:50 TU

(*) Un état de fait qui avait, d’ailleurs, été dénoncé, dès avril 2006, par un consortium de quelque soixante-dix chercheurs regroupés sous la bannière Global initiative on sharing avian influenza data («Initiative mondiale de partage des données sur la grippe aviaire»), lors du 6e symposium international sur la grippe aviaire.

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(Conception : Bourgoing / RFI)

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Que faire en cas de pandémie de grippe aviaire ?

«Avec des exercices de terrain, on peut voir ce qui peut sembler être de petits réglages mais qui pourraient changer beaucoup de choses dans la préparation.»

[13/03/2007]

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