Iran-Royaume-Uni
Bataille médiatique entre Londres et Téhéran

(Photo AFP / Al Alam)
«Des images complètement inacceptables», a jugé le ministère de la Défense britannique.
Faye Turney, la seule femme du groupe, devrait être libérée d'ici 24 heures, a annoncé Téhéran.
Le Premier ministre britannique, Tony Blair, n'aura pas pu éviter la diffusion des images télévisées des 15 militaires britanniques de la Royal Navy, capturés le 23 mars, au cours d'une patrouille en mer dans le golfe Persique.
«On s'occupe bien de moi»
La télévision nationale iranienne en langue arabe, Al-Alam, a montré mercredi soir les 15 prisonniers, apparemment en bonne forme, en train de partager un repas. Faye Turney, la seule femme du groupe, portait un foulard de couleur claire. On la voit aussi fumer une cigarette.
En gros plan, on déchiffre une lettre, que la militaire aurait écrite à sa famille : «Nous avons été arrêtés le vendredi 23 mars par les forces iraniennes alors que nous avons de toute évidence pénétré dans les eaux territoriales (...) On s'occupe bien de moi. Les gens sont amicaux et accueillants». La lettre dont l'authenticité n'a pas encore été vérifiée, demande à ce que l'on prenne bien soin de son mari et de sa petite fille de trois ans.
Un peu plus tôt dans l'après-midi de mercredi, un porte-parole du ministère des Affaires étrangères iranien avait indiqué que Faye Turney, âgée de 26 ans, allait être libérée «d'ici un ou deux jours». Une libération qui aurait été obtenue grâce à la médiation du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, actuellement au sommet de la Ligue arabe, à Riyad (Arabie Saoudite).
Les autorités britanniques ont aussitôt réagi à la diffusion des images télévisées, en les déclarant «complètement inacceptables».
La présentation des prisonniers à la télévision iranienne rappelle de mauvais souvenirs aux Britanniques. En juin 2004, huit militaires de la Royal Navy, capturés après avoir pénétré par erreur dans les eaux territoriales iraniennes, avaient été exhibés, les yeux bandés, devant une caméra avant d'être libérés trois jours plus tard.
Fermeté de Londres face à Téhéran
La diffusion des images télévisées intervient après une succession d'initiatives du gouvernement britannique, décidé à traiter de façon ferme avec Téhéran sur le dossier des 15 prisonniers. Pour lui, le sujet est à dissocier de la question du programme nucléaire iranien et du refus du président Ahmadinejad d'y mettre un terme.
L’interception de la frégate britannique dans le golfe Persique, à un endroit où les divisions territoriales irako-iraniennes sont particulièrement fluctuantes selon les spécialistes du droit maritime, a en effet eu lieu à la veille de la décision du Conseil de sécurité des Nations unies de renforcer les sanctions financières à l'encontre de l’Iran.
La ministre des Affaires étrangères britannique, Margaret Beckett a ainsi annoncé mercredi la suspension «de tous les échanges bilatéraux avec l’Iran, à l’exception des négociations engagées en vue de la libération des 15 militaires». En d'autres termes : plus de visites diplomatiques, plus de visas pour les responsables iraniens, et suspension des missions commerciales en Iran. «Nous devons concentrer tous nos efforts bilatéraux sur la résolution de la question des prisonniers», a-t-elle justifié.
Eaux troubles

(Photo : Reuters)
Au même moment, au ministère de la Défense britannique, le vice-amiral, Charles Style se livrait à une démonstration devant la presse sur la position exacte des 15 membres de la Royal Navy lors de leur arrestation le 23 mars.
Selon les relevés des balises-satellites de la frégate où ils avaient embarqué et de son bâtiment-maître, le HMS Cornwall, les marins étaient «à 1,7 mille nautique (3,5 km), à l’intérieur des eaux irakiennes». Force est d’en déduire pour les Britanniques que s’ il y a eu franchissement illégal de frontières maritimes, c’est du côté iranien qu’il faut chercher l’infraction, et que les militaires et marins de la Royal Navy n’ont aucune raison d’être retenus à Téhéran.
Par ailleurs, les autorités iraniennes auraient -toujours selon Charles Style- indiqué deux positions différentes de la frégate, à quelques jours d’intervalle, la dernière étant dans les eaux iraniennes.
Les Etats-Unis et leurs alliés ont entamé lundi une nouvelle série de manœuvres navales dans le golfe Persique, impliquant deux porte-avions, une quinzaine de navires et une centaine d’appareils, «sans lien avec la crise irano-britannique» a tenu à préciser le Pentagone.
par Marion Urban
Article publié le 28/03/2007 Dernière mise à jour le 28/03/2007 à 10:00 TU