Santé
L’Afrique se débarrasse du ver de Guinée
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En mars 2007, l’OMS souligne que douze nouveaux pays ont éradiqué le ver de Guinée et, qu’à ce rythme, «la maladie pourrait être la deuxième, après la variole, à être réduite à néant dans moins de deux ans». Aujourd’hui, le Soudan et le Ghana, avec respectivement vingt mille et quatre mille cas recensés, sont les deux pays africains les plus touchés par la dracunculose. Les mille cas restants sont répartis dans sept pays dont le Niger qui a décidé, quant à lui, d’intensifier la lutte pour éliminer la maladie d’ici la fin 2007.
La maladie se propage à travers des parasites vivant dans les eaux souillées et marécageuses et affecte les régions qui n’ont pas accès à l’eau potable. Au début du siècle dernier, cette parasitose était répandue dans de nombreux pays d’Afrique et d’Asie et, dans les années 1950, quelque cinquante millions de personnes en souffraient. Considérée comme un véritable problème de santé publique en milieu rural, il a fallu déployer des «années d’efforts des groupes locaux et internationaux [pour lutter contre cette parasitose]», souligne le docteur Lorenzo Svioli, directeur des Maladies tropicales négligées à l’OMS.
Parmi les dispositifs mis en place pour combattre cette maladie, on peut citer : le renforcement de la surveillance épidémiologique du ver, le ravitaillement en eau potable, l'utilisation de filtres à eau, le traitement des mares au moyen de produits anti-bactériologiques et une politique d'éducation menée par le personnel sanitaire des localités endémiques. La Commission pour la certification de l’éradication de la dracunculose, un organisme d’experts scientifiques mis sur pied par l’OMS, a déclaré 180 pays libérés du ver de Guinée depuis 1995. La Commission ambitionne d’éradiquer totalement cette infection d’ici 2009.
«Toute personne qui boit cette eau boit la maladie»
La dracunculose se manifeste par des fièvres, des démangeaisons et la formation d’une ou plusieurs vésicule(s) sur la jambe. La vésicule évolue en ulcère pouvant atteindre la taille d’une balle de tennis. Quand l’ulcère se perce, il libère un ver parasite, rond et long comme un spaghetti, le dracunculus medinensis, qui peut, dans certains cas, atteindre jusqu’à quatre-vingt centimètres de longueur. Les malades infectés éprouvent des sensations de brûlures qui les incitent à baigner leurs jambes dans les points d’eau les plus proches.
Au contact de l’eau, le ver libère des milliers de larves qui sont ingérées à leur tour par les puces d’eau, vecteurs de la maladie. Ces mêmes points d’eau contaminée constituant parfois les seules sources de boisson à la disposition de la communauté. Le cycle est infernal : la larve s’active et pénètre la paroi intestinale où elle se développe avant de migrer à travers les tissus sous-cutanés. En quelque sorte, résume l’OMS, «toute personne qui boit cette eau boit la maladie».
«La guérison des ulcères peut prendre plusieurs semaines si le malade n’a pas accès aux soins médicaux. Elle peut être compliquée par une infection bactérienne, des raideurs articulaires, de l’arthrite et même des contractures des membres, débilitantes et permanentes», explique le Dr Balkissa Mahamadou à Niamey (Niger). Outre le fait qu’elle est douloureuse, la dracunculose est invalidante et «garde ses victimes prisonnières d’un cycle de douleur et de pauvreté», explique l’OMS, car elle immobilise le patient, entravant ainsi l’activité des agriculteurs et empêchant parfois les enfants d’aller à l’école pendant plusieurs mois. Précisément parce qu’elle touche les populations pendant la saison des récoltes, cette maladie est aussi baptisée «maladie du grenier vide».par Dominique Raizon
Article publié le 30/03/2007 Dernière mise à jour le 30/03/2007 à 15:28 TU