Sahara occidental
Les rites d'un conflit trentenaire
(Photo : AFP)
Le Conseil de sécurité s'en saisit à quelques jours de l'expiration du mandat de la Minurso, fin avril.
L'Espagne, l'ancienne puissance coloniale, et la France voient dans ce plan une base de dialogue. Le Front Polisario, qui défend les intérêts du peuple sahraoui, dénonce les «adhésions dangereuses».
L’alternative, autonomie au sein du Maroc ou autodétermination du peuple sahraoui, sera à nouveau au centre des discussions de l’Organisation des Nations unies le 20 avril prochain, dix jours avant l’expiration du mandat de la Minurso, la Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental.
Le Maroc présentait ce mardi au Conseil de sécurité son plan d’autonomie pour le Sahara occidental, avec le fol espoir que la cour qu’il a faite ces dernières semaines aux représentations diplomatiques européennes portera ses fruits.
Déjà vu
Le Conseil Royal de Consultation pour les Affaires Sahariennes (Corcas) est resté discret sur le contenu du plan. L'organisme marocain, créé par Hassan II dans les années 1970 puis dissous avant d'être remis en place par son fils Mohamed VI en mars 2006, a planché pendant six mois sur le document qui, selon la presse marocaine, présente des «avancées», sans pour autant dire lesquelles.
Le ministère marocain de la Communication s’est contenté pour sa part de rappeler les trois axes sur lesquels le Corcas avait travaillé : «La souveraineté du Maroc, la prise en compte des particularités sociales et culturelles de la région et des critères internationaux en matière d’autonomie».
Il n’y a guère de surprise puisque ces principes étaient déjà énoncés dans la proposition, qualifiée de «troisième voie» que le Maroc avait élaborée en 2001 et qui avait été reprise dans un rapport des Nations unies en juin de la même année.
Dans les faits, il ‘agit d’accorder un Parlement, un gouvernement et une autorité judiciaire autonome au Sahara occidental, dans le respect des lois marocaines.
Autorisé à collecter les taxes, le gouvernement sarhaoui gèrerait le commerce, les transports, la sécurité intérieure, le logement, l’industrie, l’éducation, la culture, le Maroc se réservant la défense, le contrôle des frontières et les relations extérieures.
Le Front Polisario (Front populaire pour la libération de Saguia el-Hamra et du Rio de l'Oro) qui mène la lutte pour l'indépendance du peuple sahraoui depuis 1973, avait à l'époque rejeté ce plan d'autonomie, qui excluait un référendum sur l'autodétermination des Sahraouis et entérinait l'occupation du territoire du Sahara occidental par les Marocains.
Le Maroc n'en est pas à sa première version d'un projet d'autonomie sahraouie au sein du Royaume. Chacune de ses propositions ont été assorties de tentatives de séduction des pays européens et des instances onusiennes, avec moultes arguments.
En décembre dernier, alors que le Corcas mettait un point final à la proposition royale, le président du Conseil, Khelli Henna Ould Errachid, expliquait que «l'autonomie est une forme d'application de l'autodétermination». Le Front Polisario réclamant l'autodétermination, l'autonomie devrait donc le satisfaire.
Les adhésions dangereuses
L'Espagne, l'ancienne puissance coloniale du Sahara occidental, parle du projet marocain d’autonomie présenté ce mardi comme d’un «canal de dialogue».
La France, impliquée depuis la fin des années 50 dans cette région d'Afrique, évoque le «caractère constructif de la démarche marocaine».
«Nous considérons qu'il est important d'avoir une nouvelle initiative à même d'ouvrir un dialogue» entre les parties en conflit, a déclaré le président du Parlement norvégien, Thorbjorn Jagland, lors d'une visite à Rabat (Maroc), le 3 avril dernier.
Le chef du Polisario, Mohamed Abdelaziz, a d’ores et déjà dénoncé «l’adhésion dangereuse» des Espagnols au plan d’autonomie marocain et critiqué la position de la France «qui fait fi de la légalité internationale et fournit un soutien inconditionnel à l’aventure coloniale marocaine au Sahara occidental».
Mohamed Abdelaziz, qui assure parallèlement les fonctions de président de la République sahraouie, a également interpellé la communauté internationale, pour qu’elle «assume entièrement sa responsabilité», en lui demandant d’amener le Maroc à revenir au respect des précédentes décisions de l’Onu et à «protéger les Sahraouis».
Le Polisario dénonce régulièrement les discriminations dont sont victimes les Sahraouis de la part des autorités marocaines qui occupent les trois-quarts du pays depuis bientôt trente ans.
Des membres du Congrès américain ont envoyé une lettre au président George Bush, formulant le voeu que son administration continuera à soutenir «le droit à l’autodétermination du Sahara occidental, en faisant avancer le droit à une solution juste et finale qui apporterait la paix et la stabilité dans cette partie du monde».
La République arabe sahraouie démocratique (RASD), proclamée en 1976, fait partie de l’Union africaine depuis 1984 –ce qui a provoqué immédiatement la démission du Maroc de cette organisation- mais elle n’est pas membre de l’Onu.
par Marion Urban
Article publié le 10/04/2007 Dernière mise à jour le 10/04/2007 à 08:15 TU