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Mali

Présidentielle : ATT face à sept concurrents

Amadou Toumani Touré a bouclé sa campagne à Bamako avec un discours offensif. 

		(Photo : AFP)
Amadou Toumani Touré a bouclé sa campagne à Bamako avec un discours offensif.
(Photo : AFP)
Près de 6,9 millions d’électeurs maliens se rendus aux urnes, dimanche, pour choisir, entre huit candidats, celui qui dirigera le pays dans les cinq prochaines années. Le président sortant, Amadou Toumani Touré, avait sept adversaires : Ibrahim Boubacar Kéita, Soumeylou Boubèye Maiga, Oumar Mariko, Mamadou Sangaré dit Blaise, Madiassa Maguiraga, et Tiébilé Dramé. Une seule femme en lice : Sidibé Aminata Diallo. Le scrutin s'est déroulé dans le calme. Les premières estimations sont attendues dans la journée de lundi, et les résultats complets mercredi ou jeudi.

Pas de danse endiablée, caravanes de supporters à travers la ville de Bamako, meetings de candidats dans la capitale malienne et à l’intérieur du pays, pour un dernier coup de rein avant l’élection présidentielle de dimanche, la campagne électorale a enfin pris du rythme. « Dommage, le débat d’idées commençait à peine, et voilà que ce vendredi à minuit, officiellement, la campagne prend fin. Les candidats n’ont pas démarré la campagne en trombe», analyse Mamadou Samaké, sociologue malien. Le président sortant Amadou Toumani Touré a bouclé sa campagne à Bamako au cours d’un méga meeting. Casquette vissée  sur la tête, sa silhouette était plutôt méconnaissable. Après avoir avant et pendant la campagne électorale sillonné le Mali, il a physiquement perdu du poids. Il n’empêche. Le discours reste offensif. Il a voulu essentiellement s’adresser à la jeunesse malienne. Résumé ? « Faites- moi confiance, le Mali bouge, en cinq ans, nous avons réalisé de grands projets, et pour les cinq prochaines années, j’ai pour vous, un ambitieux programme ». Tonnerre d’applaudissements dans un stade plein à craquer, suivi de la formule-choc de campagne de son camp : « Takokélen ! Takokélen ! »,  expression en langue locale bambara qui littéralement traduite donne « Prise unique », ou victoire dès le premier tour.

Au même moment les adversaires du président sortant, « musclaient » de leur côté le discours. Ainsi, dans la capitale malienne Ibrahim Boubacar Kéita, qui apparaît comme son principal adversaire a appelé ses militants « à voter pour le changement ». « La situation doit changer, la situation peut changer, la situation  va changer », hurlaient les partisans d’un autre candidat Soumeylou Boubéye Maiga, qui a choisi sa ville natale de Gao (1 200 kms au nord de Bamako), pour son dernier meeting. Tiébilé Dramé, autre candidat à la présidentielle de dimanche, pour ses derniers mots de campagne appelait les Maliens à rester « très vigilants pour éviter la fraude ». Justement, l’un des enjeux du scrutin est d’abord la consolidation de la démocratie malienne qui impérativement doit passer par l’organisation d’élections libres et transparentes. « Dimanche, c’est la quatrième fois de son histoire depuis l’indépendance que le Mali organise des présidentielles pluralistes. C’est le rendez-vous de la maturité qui doit absolument passer par l’organisation irréprochable du scrutin. C’est primordial pour l’enracinement de la démocratie dans notre pays », analyse Balla Konaré, professeur à l’université du Bamako.

Trois structures pour organiser les élections

Le scrutin de dimanche sera également une occasion de tester encore une fois, la nouvelle «machine» d’organisation des élections au Mali. En effet, après avoir succombé à la mode des années 90 sur le continent où pour que des élections soient estampillées «transparentes», elles devaient êtres organisées par une Commission électorale nationale indépendante (CENI), le Mali a remodelé il y  a cinq ans l’attelage. Depuis la dernière présidentielle de 2002, trois structures sont chargées d’organiser les élections : le ministère de l’administration territoriale chargé de l’organisation matérielle du scrutin, la délégation générale aux élections (DGE), chargée de l’établissement des listes électorales et la Commission nationale électorale (CENI), qui supervise les élections. Elle a pris du grade avec la nouvelle loi électorale adoptée l’an dernier par l’assemblée nationale. Désormais, elle peut également  saisir la justice en cas de constat de la violation de la loi électorale. « Le Mali doit tout faire pour conserver son image de pays stable dans la sous région, au moment où la Côte d’ivoire reste un pays « grippé », au moment où la Guinée reste malgré tout dans la tourmente, au moment où malgré un retour à la paix, des armes traînent toujours dans des pays comme la Sierra Léone et le Libéria », ajoute Balla Konaré.

C’est dans ce contexte que quelques heures avant le début du scrutin, dans un communiqué adressé à RFI, le Conseil national des personnes âgées du Mali « invite » les Maliens à la retenue pendant tout le déroulement du processus électoral, afin d’éviter « d’éventuelles dérives ». Quant aux candidats, le même communiqué des «anciens» les invite « à se battre pour remporter la victoire, conformément aux règles du jeu démocratique ».   Organisation d’un scrutin transparent donc, mais les observateurs garderont également l’œil rivé sur le taux de participation. Les Maliens ne votent pas ou plus.  En 1992, un an après la chute du régime du général Moussa Traoré lors du référendum sur la nouvelle constitution le taux de participation avait grimpé. Depuis, il a rarement tutoyé les 25%. Alors désintéressement ? Rejet des hommes politiques ?  Résignation ? Vainqueur des élections déjà connu ? Un peu de tout ça. En tout cas pour booster le taux de participation,  le gouvernement malien a multiplié les gestes : Simplification des conditions de retrait des cartes d’électeur, une journée déclarée « chômée et payée » sur tout le territoire national, concert gratuit pour les détenteurs de cartes d’électeur, etc.

Bamako, le «grenier électoral» du pays

Le résultat reste pourtant mitigé. Sur le territoire national, à 72 heures du scrutin, le taux de retrait des cartes d’électeurs était à Bamako d’environ 40%. Or, la capitale malienne est le « grenier électoral » du pays avec 837 000 électeurs, soit autant sinon plus d’électeurs que dans les trois régions du septentrion du pays.  « A l’intérieur du pays, le taux de retrait des cartes est beaucoup plus élevé. Il atteint à des endroits 75%. Mais c’est vrai que nous espérions beaucoup mieux », confie à RFI, un fonctionnaire du ministère malien de l’administration territoriale. Les Maliens vont-ils sortir massivement dimanche ? Quel candidat vont-il installer à Koulouba, siège du palais présidentiel de Bamako ? Sur ce registre, les regards sont tournés vers le président ATT. Sans parti politique propre à lui, il a initié lors de son élection en 2002, une expérience politique inédite : former un gouvernement de «consensus» sans opposants, avec une assemblée nationale acquise à sa cause même si les débats sont parfois houleux, il a pu gouverner sans véritable contestation, et son bilan est qualifié de «positif», par les observateurs. Mais une élection ne se gagne pas seulement sur un bilan.

Les rapports de force aujourd’hui ? Le président Amadou Touré candidat indépendant est soutenu par 44 partis politiques et une myriade de d’associations regroupés au sein de l’Alliance pour la démocratie et le progrès (ADP). Ses principaux adversaires sont regroupés au sein du Front pour la démocratie et la République (FDR), qui présente quatre candidats : Ibrahim Boubacar Kéita, Soumeylou Boubèye Maiga, Mamadou Sangaré dit Blaise, et Tiébilé Dramé. La stratégie du FDR ? Jouer sur l’émiettement des voix au premier tour, afin d’obtenir un second tour. Vont-ils réussir à mettre en ballottage le général à la retraite. Oui disent-il, non, répondent les partisans du président sortant. Deux autres candidats Madiassa Maguiraga et Mme Sidibé Aminata Diallo, première femme candidate à une présidentielle au Mali, ont soigneusement évité de critiquer avec virulence le président sortant. Ce qui selon les observateurs font d’eux des futurs alliés de « ATT ». Dr Oumar Mariko, autre candidat à la présidentielle renvoie lui dos à dos partisans du président sortant et responsables du Front pour la démocratie et la République (FDR).  « Nous, nous voulons un Mali nouveau, où le paysan, les couches défavorisées vont pouvoir  enfin voir le bout du tunnel. Et pour cela nous mettons en garde contre toute tentative de fraude. Ça ne passera pas. L’équipe de  ATT n’a pas résolu les problèmes des Maliens », a martelé Oumar Mariko au cours d’un de ses derniers meetings.  Simple rappel, le parti de Dr Oumar Mariko, a toujours un ministre au sein de l’actuel gouvernement malien.      



par Serge  Daniel

Article publié le 28/04/2007 Dernière mise à jour le 28/04/2007 à 09:45 TU