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France

Se souvenir de l’esclavage

Lors de la cérémonie officielle dans le jardin du Luxembourg, à Paris, Nicolas Sarkozy fera ses premiers pas en tant que nouveau président de la République française aux côtés du président sortant, Jacques Chirac. Néanmoins, en cette journée nationale de commémoration de l’abolition de l’esclavage, ce sont deux visions différentes qui se côtoient.


Dimanche, 6 mai 2007. Au soir de son élection, le nouveau président Sarkozy a déclaré : «Je veux en finir avec la repentance qui est une forme de haine de soi et la concurrence des mémoires qui nourrit la haine des autres».

A l’issue de son dernier conseil des ministres, mercredi 9 mai, Jacques Chirac a appelé à se mobiliser contre l’esclavage, une «infamie» qui continue à faire des centaines de milliers de victimes dans le monde. «L’esclavage, ce n’est pas uniquement une tragédie du passé. Encore aujourd’hui, la traite des êtres humains fait des centaines de milliers de victimes dans le monde (…) L’honneur de la France c’est d’être à la pointe de ce combat pour la dignité et les droits de l’homme. Notre pays est le premier à avoir reconnu que l’esclavage est un crime contre l’humanité», a déclaré le chef de l’Etat.

Edouard Glissant

Ecrivain et poète martiniquais

«Il est important que les descendants de ceux qui ont souffert de l'esclavage prennent conscience de cette réalité historique.»

L’intervention du président Chirac faisait suite à l’adoption d’un projet de loi autorisant la ratification de la convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains.

Le 10 mai, la date qui fâche

Si le 10 mai a été retenu, c’est uniquement en référence au 10 mai 2001, date de l’adoption définitive par le Parlement de la loi Taubira, (du nom de la députée guyanaise, Christiane Taubira), reconnaissant la traite négrière et l’esclavage comme des crimes contre l’humanité.

Pour Jacques Chirac, il s’agissait plus de fixer une date mémorielle pour l’Hexagone et non de commémorer une date historique. Le décret de l’abolition officielle remonte au 27 avril 1848. Mais chaque population concernée célèbre l’événement en ordre dispersé, selon la date à laquelle le décret est alors effectivement parvenu à leurs ancêtres. «Les départements d’outre-mer préfèrent commémorer les victimes et non les abolitionnistes», explique Victorin Lurel, secrétaire national du PS à l’Outre-Mer et président du Conseil général de la Guadeloupe.

Plusieurs associations d’outre-mer auraient souhaité retenir la journée du 23 mai, en souvenir du 23 mai 1848, premier jour de liberté pour les esclaves martiniquais, ou du 23 mai 1998, où plus de 40 000 descendants d’esclaves ont marché silencieusement dans les rues de Paris, en souvenir de leurs ancêtres. C’est également le 23 mai 2001 que la loi Taubira a été publiée au journal officiel.

Lilian Thuram

Footballeur

«Durant cette période, le Noir n'était pas considéré comme un homme.»

Il aura fallu attendre le 30 janvier 2006 et la décision de Jacques Chirac pour que la métropole choisisse aussi une date pour honorer la mémoire des victimes de l’esclavage. Mais, le jour importe-t-il vraiment, quand il s’agit avant tout de ne jamais oublier ce que le poète martiniquais, Aimé Césaire, nomme «cette barbarie civilisée» que fut la traite négrière transatlantique du XVe au XIXe siècle? Elle ne constitue qu’une partie de l’histoire de l’esclavage qui comprend la traite arabo-musulmane, laquelle a duré du VIIe au XXe siècle, et la traite intra-africaine. 

Les principales routes de l'esclavage entre le VIIIe et le XIXe siècle. 

		(Cartographie: Marc Verney/RFI, source: Unesco)
Les principales routes de l'esclavage entre le VIIIe et le XIXe siècle.
(Cartographie: Marc Verney/RFI, source: Unesco)


par Françoise  Dentinger

Article publié le 09/05/2007 Dernière mise à jour le 09/05/2007 à 17:25 TU