par Anne Toulouse
Article publié le 05/12/2007 Dernière mise à jour le 05/12/2007 à 09:44 TU
Mitt Romney, candidat à l’investiture républicaine pour la présidentielle de 2008, doit prononcer jeudi dans une université texane un grand discours sur la religion. Intervention très attendue car son appartenance à l’Eglise mormone semble être un obstacle pour bon nombre d’électeurs.
Mitt Romney, ancien gouverneur du Massachusetts, et candidat à l'investiture républicaine pour la présidentielle de 2008.
(Photo : Reuters)
En prononçant ce jeudi un discours sur son appartenance à l`Eglise mormone, Mitt Romney, candidat républicain, pose la question de l`importance de la religion dans les motivations de vote aux Etats-Unis.
Il reprend la démarche de John Kennedy qui, en 1960, avait fait cette célèbre mise au point : « Je ne suis pas un candidat catholique à la présidence, mais un candidat à la présidence qui se trouve être catholique ». A cette époque, le fait d`être catholique suscitait quelques suspicions dans un pays en majorité protestant, ce qui n`a pas été le cas quelques 40 années plus tard lorsqu`un autre catholique, John Kerry, s`est présenté a l`élection présidentielle. Il est vrai qu`entre temps, en raison de l`immigration hispanique, les catholiques sont devenus le premier groupe religieux des Etats-Unis.
Les mormons constituent une communauté beaucoup plus complexe, à cause du mystère qui entoure une partie de leur culte. Les non-membres de l`Eglise n`ont pas accès à toute une partie du rituel qui se déroule dans leurs temples. Lors d`un récent sondage publié par l`institut Pew Research, la première idée associée aux mormons était la polygamie, pour 18% des personnes interrogées. 6% leur prêtaient des rites sataniques.
La polygamie a, de fait, été rejetée par l`Eglise mormone lorsque l`Etat dans lequel ils se sont installés, l`Utah, est devenu un Etat américain en 1896.Tous les membres de l`Eglise n`ont pas obéi a cette directive, des communautés ont fait scission et se sont installées dans les montagnes Rocheuses. De nombreuses affaires de mœurs ont éclaboussé l`image de marque des mormons, même s`il s`agissait de cas isolés.
Ils ont également été accusés de racisme pour n`avoir accepté des prêtres noirs qu`à partir de 1978. Tous les hommes de religion mormone ont accès a la prêtrise, s`ils en sont jugés dignes par leurs pairs.
Les pionniers de Salt Lake City
L`Eglise mormone, connue aux Etats-Unis sous le nom de LDS, « Later Days Saints », a été fondée en 1820 par un jeune homme de l`Etat de New-York, Joseph Smith, qui s`est autoproclamé prophète et a écrit un livre de révélation, le Livre des mormons. A la suite d`une série de persécutions, les mormons se sont installés dans un endroit à l`époque désert, Salt Lake City. La migration de plusieurs milliers de familles, dans des conditions épouvantables, est une page spectaculaire de l`histoire des Etats-Unis.
Les mormons sont devenus une communauté prospère, qui domine politiquement l`Etat de Utah. Ils revendiquent 13 millions de fidèles à travers le monde, dont 5 millions et demi aux Etats-Unis. Ces chiffes sont contestés, car ils englobent tous ceux qui ont reçu le baptême mormon, sans tenir compte de leur activité réelle dans l`Eglise. Des études indépendantes évaluent à 3 millions le nombre réel des mormons aux Etats-Unis, ce qui représente 1% de la population.
Les mormons sont en délicatesse avec la partie de la population américaine que l`on appelle les chrétiens évangéliques. Cette dénomination recouvre une large mouvance de protestants, généralement conservateurs, qui, comme leur nom l`indique, appliquent à la lettre leur interprétation de la Bible et s`efforcent de convertir le reste du monde. Bien qu`ils professent sensiblement les mêmes valeurs morales, les chrétiens évangéliques reprochent aux mormons de donner préséance à leur Livre de révélation sur la Bible. Selon un sondage, 30% des évangéliques interrogés considèrent les mormons comme des hérétiques.
Une position politique délicate.
Dans la mesure où les chrétiens évangéliques sont l`un des piliers de l`électorat républicain, Mitt Romney se trouve dans l`obligation de les rassurer. Plus que d`autres candidats mormons, il est assimilé à son Eglise, car il est le descendant de l`une des familles fondatrices de Salt Lake City. Cette image d`homme pieux et conservateur lui a valu d`être en tête, ou en bonne position, dans les sondages d`Etats très religieux comme l`Iowa et la Caroline du Sud, qui sont très important dans le processus de sélection des candidats. Mais cette position est actuellement battue en brèche par un autre candidat républicain, Mike Huckabee, pasteur de l`Eglise baptiste du sud qui se présente comme le « vrai candidat chrétien ».
Mitt Romney a dépensé beaucoup d`argent pour sa candidature, parce qu`il a une énorme fortune personnelle et reçoit de généreux subsides de la communauté mormone. Cette richesse est une arme à double tranchant. Mitt Romney a été accusé de vouloir « acheter la présidence », pour la mettre au service de son Eglise.
Mitt Romney n`est pas le premier mormon qui se présente à une élection présidentielle. En 2000, Orin Hatch, sénateur de l`Utah a fait une brève tentative. Un autre mormon, Harry Reid, démocrate du Nevada, occupe la position-clé de chef de la majorité au sénat. Mais aucun n`a suscité une telle controverse, sans doute parce que leur personnalité est plus discrète.
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Lors du débat des candidats républicains, la « prime de sympathie » est revenue incontestablement à Mike Huckabee.
01/12/2007 par Anne Toulouse