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France / Libye

Kadhafi : la politique des droits de l’homme d’affaires

par Patrice Biancone

Article publié le 10/12/2007 Dernière mise à jour le 11/12/2007 à 09:57 TU

La visite du leader libyen à Paris déchaîne les passions. L’opposition et la presse ne cessent de dénoncer une atteinte au crédit international de la France. Certains membres du gouvernement auraient souhaité plus de discrétion pour recevoir le colonel Kadhafi. Et Rama Yade, secrétaire d’Etat aux Droits de l’homme, est même allée plus loin en expliquant que « notre pays n’est pas un paillasson ». Des propos qui ont choqué une partie de la majorité et poussé Nicolas Sarkozy à apporter son soutien à sa secrétaire d’Etat.

Le leader libyen Mouammar Kadhafi.(Photo : AFP)

Le leader libyen Mouammar Kadhafi.
(Photo : AFP)

Pour 61% des Français, Mouammar Kadhafi n'est pas le bienvenu à Paris. C'est un sondage Ifop-Paris Match qui l'affirme soulignant ainsi que quelques contrats, même d'un montant de dix milliards d'euros annoncés par le chef de l'Etat français, ne valent pas forcément que l'on oublie que l'on a à faire à un dictateur. D'ailleurs, à entendre les réactions que provoque la visite du responsable libyen, nous pourrions presque penser qu'avec Nicolas Sarkozy, nous ne sommes plus dans le domaine des droits de l'homme, mais bien dans celui des droits de l'homme d'affaires.

Le voyage en Chine avait été contesté sur la forme. L'amitié démonstrative accordée à Vladimir Poutine avait été dénoncée bruyamment. Et voilà désormais que la venue de Kadhafi confirme l'urgente nécessité de savoir si la « realpolitik » doit se résumer à la mise sous le boisseau de convictions qui ont fait, en leur temps, la grandeur de la France. Souvenons-nous tout de même qu'il y a peu, Mouammar Kadhafi était un homme que l'on qualifiait de dictateur. Un homme à qui l'on reprochait de détenir des prisonniers politiques. Un homme qui a exercé un chantage international avec les infirmières bulgares. Un homme enfin qui, aujourd'hui encore, loin de condamner le terrorisme, le légitime comme il l'a fait à Lisbonne en expliquant que les faibles pouvaient y avoir recours contre les superpuissances.

Malgré ce constat, pour Nicolas Sarkozy, il fallait accueillir le leader libyen parce que si la France n'accueille pas les pays qui prennent le chemin de la respectabilité, que doit-elle dire à ceux qui prennent le chemin inverse ? Et d'ajouter, en pleine polémique : « J'espère que des contrats seront signés. Et que s'ils le sont, ce sera sans que nous ayons reculé d'un centimètre sur les convictions qui sont les nôtres ».

L'opposition tente d'exploiter l'affaire

Ces explications ne satisfont nullement l'opposition et une partie de l'UMP qui auraient souhaité plus de discrétion pour cette visite. Mais, c'est mal connaître Mouammar Kadhafi que d'espérer cela de lui. Il a choisi d'être vu. Vu et entendu : la raison pour laquelle il a déployé tout ce faste qui a fait couler beaucoup d'encre et dire à la plupart des journaux qu'il s'agit d'une atteinte au crédit international de la France.

Une tente a donc été installée dans les jardins de l'hôtel de Marigny, résidence officielle des hôtes de l'Etat français. Le président libyen a déjà été reçu, dès son arrivée, à l'Elysée. Un dîner est prévu ce lundi soir. Demain, il se rendra à l'hôtel de Lassay où il sera accueilli par Bernard Accoyer, le président de l'Assemblée nationale, avant de rencontrer les responsables du Medef à l’hôtel Ritz. Et mercredi, un second rendez-vous est prévu avec Nicolas Sarkozy. C'est beaucoup. C'est trop, estiment les socialistes.

Et jusqu'à certains membres du gouvernement qui ont exprimé des réserves. C'est le cas de Rama Yade, la secrétaire d'Etat  aux Droits de l'homme qui a eu les mots les plus durs. « Le colonel Kadhafi doit comprendre que notre pays n'est pas un paillasson sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s'essuyer les pieds du sang de ses forfaits », a-t-elle commenté, avant de conclure que « la France ne doit pas recevoir ce baiser de la mort ».

Une façon comme une autre de damer le pion à l'opposition - elle a reçu le soutien de Nicolas Sarkozy - et de rappeler que notre pays n'est pas seulement une balance commerciale le jour même de la célébration des droits de l'homme...

Première journée de la visite du colonnel Kadhafi en France

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10/12/2007 par Mouna Elbanna

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Kadhafi en visite officielle

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