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France / Libye

10 milliards de contrats : la polémique

par Myriam Berber

Article publié le 12/12/2007 Dernière mise à jour le 12/12/2007 à 15:16 TU

La visite en France de Mouammar Kadhafi continue de déchaîner les critiques. Alors que le dirigeant libyen reçoit, mercredi 12 décembre 2007, dans un palace parisien le Medef, le patronat français, la polémique porte cette fois sur les dix milliards de contrats commerciaux annoncés comme fermes par Nicolas Sarkozy. Il s’agit, en fait, d’une estimation de ce que pourraient rapporter ces contrats quand ils seront concrétisés.
Le leader libyen Mouammar Kadhafi à son arrivée à l’hôtel Ritz à Paris pour une rencontre avec le Medef, le patronat français.(Photo : Reuters)

Le leader libyen Mouammar Kadhafi à son arrivée à l’hôtel Ritz à Paris pour une rencontre avec le Medef, le patronat français.
(Photo : Reuters)

Le montant des contrats tournerait autour « d’une dizaine de millions d’euros, soit 30 000 emplois sur cinq ans ». C’est l’Elysée qui l’a annoncé dans la soirée de lundi, au premier jour de la visite officielle de Mouammar Kadhafi. Mais qu’en est-il vraiment ? Lors de la cérémonie de la signature de contrats qui a suivi le dîner donné en l’honneur du colonel Kadhafi, aucun chiffre n’a été dévoilé.

La seule grosse commande ferme concerne les 21 Airbus achetés par la Libye par deux compagnies, Afriqiyah Airways et Libyan Airlines. En réalité, il s’agit de la confirmation d’engagements annoncés en juin au salon du Bourget. C’est-à-dire bien avant l’affaire des infirmières bulgares. Un contrat estimé par l’Elysée à 2,7 milliards d’euros alors qu’Airbus parle d’un contrat de 2,08 milliards d’euros. Ce qui fait 620 millions d’euros de moins que l’estimation de l’Elysée.

L’Elysée «confiant » pour le Rafale

Côté militaire, tout reste encore à négocier. Pour l’heure, Tripoli et Paris ont signé «un mémorandum d’intentions de coopération» dans lequel la Libye s’engage à entamer avec la France des «négociations exclusives en vue de l’acquisition, d’Etat à Etat, de matériels militaires». Ces négociations exclusives qui dureront jusqu'au 1er juillet 2008, porteront notamment sur les conditions commerciales et de prix. Tripoli envisage d’acheter à la France 14 avions de chasse Rafale du constructeur Dassault, 35 hélicoptères Tigre, Fennec ou Caracal d’Eurocopter, une soixantaine de véhicules blindés de Renault Trucks, des navires ou encore des radars de défense antiaérienne. Soit un montant d’un total de 4,5 milliards d’euros.

Un chiffre à prendre avec précaution, les négociations n’ont, en effet, pas encore commencé. De son côté, Serge Dassault, actionnaire principal de Dassault Aviation, a confirmé, mardi, «espérer dans deux ou trois mois la signature d’un contrat de vente de 14 avions Rafale ». Si les négociations avec la Libye aboutissent, ce sera la première fois que la France réussira à exporter le Rafale. L’Elysée se dit «confiant» sur ce dossier, car le fait que la Libye s’interdit jusqu’au 1er juillet 2008 de négocier avec d’autres fournisseurs réduit le risque de voir se rééditer l’échec du Rafale au Maroc.

Un mémorandum de coopération nucléaire

La Libye a également paraphé, lundi soir, un mémorandum de coopération nucléaire. Cet accord qui est le deuxième de ce type conclu par la France après celui avec l’Algérie, devrait aboutir «à la fourniture d’un ou plusieurs réacteurs nucléaires pour le dessalement de l’eau de mer ainsi qu’au soutien à l’exploration et à l’exploitation de l’uranium». Pour ces équipements nucléaires civils, l’Elysée évoque au moins 2 milliards d’euros. Un montant très hypothétique, la concrétisation de ces projets semble, en effet, lointaine. Quant à la dernière enveloppe de 2 milliards d’euros annoncée par l’Elysée, elle regroupe la construction du nouvel aéroport de Tripoli et un contrat de gestion de l’eau potable avec le groupe Veolia. Des contrats encore potentiels que l’Elysée n’est pas en mesure de confirmer.  

Un détail important dont s’est emparé l’opposition. Pour le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale Jean-Marc Ayrault : « il ne faut pas faire croire aux Français que tous ces milliards sont déjà signés et vont rentrer dans les caisses de la France. Il y a des contrats qui étaient déjà acquis, par exemple Airbus, donc c’est de l’affichage et puis pour le reste, c’est hypothétique ».