Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Reportage photo

Tchad : sur les traces de l'Arche de Zoé

Article publié le 19/12/2007 Dernière mise à jour le 21/12/2007 à 16:49 TU

Retour sur l'affaire jugée à Ndjamena, en textes et en photos.

L’association française, connue sous le nom de Children Rescue au Tchad, avait tenté d’exfiltrer 103 enfants du pays, afin de les confier à des familles d’accueil françaises. Ces enfants ont été présentés comme des orphelins du Darfour, or les enquêtes humanitaires effectuées depuis ont montré que la plupart étaient Tchadiens avec un adulte qu’ils identifient comme un parent. Les accusés estiment qu’ils ont été abusés par leurs intermédiaires et leurs interprètes qui leur ont menti. Reste que le départ pour la France n’avait manifestement été annoncé à personne et qu’il s’est fait en catimini, jusqu’à l’arrestation du convoi par les autorités tchadiennes, au petit matin du 25 octobre dernier. Les détenus français ont entamé une grève de la faim depuis le 8 décembre pour dénoncer une instruction « à charge ». 

Femmes du village de Guilané, à l’Est du Tchad à quelques pas de la frontière soudanaise.(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)
Femmes du village de Guilané, à l’Est du Tchad à quelques pas de la frontière soudanaise.

Les intermédiaires qui ont travaillé pour l’Arche de Zoé ont recruté ici sept enfants. L’un de ces intermédiaires est aujourd’hui inculpé pour avoir livré au total 63 petits à l’association française. Les habitants vivent ici dans des cases de paille. A cause de l’insécurité, il n’y a plus d’enseignant depuis trois ans. C’est ce qui aurait conduit les mamans à confier leurs enfants à l’association française.

(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)

L’Arche de Zoé avait promis d’emmener les enfants dans la ville d’Adré, ville-préfecture située à quelques kilomètres du Soudan. Selon les autorités locales, l’association avait promis de construire ici un « Children center » pour deux ans, afin d’éduquer les enfants en français, en arabe, avec un suivi médical.

Enfants devant le siège de Children rescue, aujourd’hui fermé.(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)
Enfants devant le siège de Children rescue, aujourd’hui fermé.

L’association avait loué des locaux à Adré, dans un local occupé auparavant par le Haut Commissariat aux réfugiés. C’est ici qu’ont été gardés les enfants durant plusieurs jours, avant d’être évacués par petits groupes vers la grande ville d’Abéché.

Paysage semi-désertique, sur la route entre Abéché et Adré. (Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)
Paysage semi-désertique, sur la route entre Abéché et Adré.

L’insécurité a récemment augmenté dans cette zone, avec des attaques de véhicules par des bandits armés, et des braquages d’ONG sur leur lieu de travail ou lors de leurs déplacements.

(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)

Children Rescue avait construit une passerelle artisanale, en bois, pour embarquer les enfants à bord du Boeing qui devait les transférer en France. Il n’existe en effet pas de passerelle pour ce type d’avion sur l’aéroport d’Abéché qui accueille essentiellement des vols humanitaires et militaires. L’équipe avait entraîné les enfants à grimper sur cette passerelle, pour préparer l’embarquement le jour J.

La passerelle est considérée comme une pièce à conviction, elle a été saisie par la justice.

 

(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)

Le convoi de l’association française ayant été intercepté, sur la route vers l’aéroport, le 25 octobre 2007, les 103 enfants sont aujourd’hui gardés à l'orphelinat d'Abéché, en attendant d’être remis à leur parent. Les équipes de travailleurs sociaux se sont attelées à leur redonner un rythme de vie équilibré. Les enfants ont été perturbés par toute l’agitation provoquée par cette affaire. Selon les enquêtes menées par les organisations humanitaires, il s’agirait pour la majorité, d’enfants tchadiens et non pas d’orphelins du Darfour.

(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)

A l’orphelinat d’Abéché, Habista, une des assistantes, porte le plus jeune des enfants, Taher, 15 mois. Sa mère qui a confié deux autres de ses enfants aussi à l’association est autorisée à venir le voir toute la journée, contrairement aux autres parents qui ont droit à des visites plus espacées. Elle ne pourra le récupérer qu’après une décision de justice.

(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)

L’orphelinat d’Abéché qui existe depuis 50 ans a dû s’adapter à cet afflux inattendu d’enfants. Parmi tous les employés appelés à la rescousse, figurent ces femmes chargées de la corvée du linge. D’autres sont chargées de la cuisine, d’autres animent les après-midi sur le terrain de foot.

(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)

Les familles rencontrées sur place dans leur village d’origine demandent surtout qu’on leur rende leur enfant. Certaines ont cependant été convaincues qu’elles pouvaient tirer profit de cette situation et ont décidé de se porter partie civile pour demander des dommages et intérêts à l’association. Ces 18 hommes originaires de l’Est du pays ont été acheminés à Ndjamena la capitale, avec l’appui des autorités, pour officialiser leur démarche.

Au centre, le président Idriss Deby Itno, le 1er décembre, dans la capitale, lors des cérémonies célébrant son 17e anniversaire au pouvoir.(Photo : Marie -Pierre Olphand/RFI)
Au centre, le président Idriss Deby Itno, le 1er décembre, dans la capitale, lors des cérémonies célébrant son 17e anniversaire au pouvoir.

Cette affaire a semé le trouble entre Paris et Ndjamena. Idriss Deby a haussé le ton très vite, affirmant que les enfants rassemblés par l’association française étaient destinés à des réseaux pédophiles et de trafic d’organes. Nicolas Sarkozy a surenchéri, assurant qu’il irait chercher les Français au Tchad « quoi qu’ils aient fait ». Le ton est ensuite retombé. Début décembre, à Lisbonne, les deux présidents ont déclaré qu’ils travaillaient pour « dénouer la situation dans le respect de la justice tchadienne ». Paris souhaite une extradition des six Français à l’issue de leur procès qui s'est ouvert ce vendredi à Ndjamena.


Texte et photos : Marie-Pierre Olphand

Audios

L'affaire Arche de Zoé.(Photo : Reuters)

Maître Laminal

Avocate des familles tchadiennes

« Le procès va faire comprendre que l'on ne doit pas se moquer de l'Afrique, ni du Tchad. »

20/12/2007 par Raphaël Reynes

Maître Mario Stasi

Avocat de l'infirmière de l'association

«Comment voulez-vous imaginer que des gens venant de France, et à peu près normalement constitués, aient voulu prendre des enfants tchadiens à leurs pères et à leurs mères ? C'est aberrant ! ».

21/12/2007

Portrait d'Eric Breteau

« Ses admirateurs parlent d’un meneur d’hommes, ses détracteurs d’un manipulateur hors pair. »

20/12/2007 par Sonia Rolley

Les familles tchadiennes, dans l'attente du procès

« Il faut que les responsables soient condamnés, les 6 Français... et les 4 autres, s'ils sont coupables ! »

20/12/2007 par Raphaël Reynes