Article publié le 13/01/2008 Dernière mise à jour le 13/01/2008 à 18:15 TU
Par notre envoyée spéciale, Florence de Changy
Le score des élections législatives à Taiwan est sans appel : le DPP, le camp présidentiel pro-independance, n’occupera plus qu’un quart des sièges dans le nouveau parlement. Les deux camps en ont très vite pris la mesure : « C'est une déception catastrophique » a declaré la porte-parole du DPP. Le président Chen Shui Bian a d'ailleurs démissionné de son poste à la tête du parti, estimant que le parti venait connaître sa pire de fait depuis sa création. Une fois n'est pas coutume, il s'est excusé en se disant « honteux et navré ».
Du côté du Kuomintang en revanche, c'est une victoire encore plus écrasante que ce que l'ancien parti nationaliste chinois osait espérer. « Les Taiwanais ont décidé de donner une deuxième chance au Kuomintang, on va renouer avec le succès », déclare-t-on chez les bleus. Au quartier général du parti, la fête battait son plein samedi soir. Certains ont entamé un chant patriotique célébrant la république de Chine de Sun Yat Sen, tandis que d'autres scandaient déjà « Ma Ying Jeou (leur leader) président » ! ».
Car le Kuomintang n'a pas seulement la majorité au Parlement, il emporte ce qu'on appelle ici une « majorité dorée », à savoir les deux tiers du Parlement : 81 sieges sur 113 lui donnent le champ libre pour faire passer un très grand nombre de mesures, y compris des réformes constitutionnelles. « Le Kuomintang va dominer tous les apects de la vie politique dans les années à venir » a déploré Bi-khim Hsiao, députée sortante du DPP. Le Kuomintang peut même compter sur 5 sièges supplémentaires en appui, gagnés par deux petits partis proches du Kuomintang.
Ce résultat est donc avant tout un vote de sanction très sévère contre le président, auquel les Taiwanais reprochent non seulement les affaires de corruption de son entourage, mais surtout le bilan décevant de ses huit années au pouvoir, et la détérioration économique des plus récentes années. L'insatisfaction est grande parmi la population, nostalgique des années 80 et du début des années 90, quand Taiwan était un « dragon ». Les Taiwanais comptent sur une amélioration des relations avec la Chine pour relancer l'économie. Le Kuomintang a promis d'en faire une priorité.
Pour le camp indépendantiste, ce cuisant échec augure très mal de l'élection présidentielle, dans deux mois. On voit mal en effet ce qui pourrait renverser ce raz-de-marée d'ici mars, même si les grandes questions nationales, qui n’ont pas été abordées dans cette élection-ci, pourraient si ce n’est inverser, du moins atténuer la tendance du scrutin de samedi.
Le malheur de Chen Shui Bian fera assurément le bonheur du président chinois. Depuis l'apparition d'un parti indépendantiste à Taiwan, Pékin a engagé des relations officieuses privilégiées avec le Kuomintang. Au cours de cette dernière campagne, Pékin s'est montré très discret. Mais le Kuomintang sera prudent dans son approche. Pour le Kuomintang non plus, il n’est plus question d’unification. Mais il n’est pas question non plus de « déclarer » une indépendance, que les faits ont déclarée de longue date.
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