par Manu Pochez
Article publié le 19/04/2008 Dernière mise à jour le 21/04/2008 à 12:31 TU
Plages et …plages
Départ tardif de Laayoune à 11H15. On s’était pourtant levés tôt. On suit de près cette affaire de durite qui continue à fuir, et la cassure après autopsie du caoutchouc coudé (la pipe), s’est agrandie.
Un rouleau de chatterton neuf va y laisser son noyau en carton. Combien de tours ? On ne les a pas comptés, mais la réparation de fortune à l’air efficace plusieurs centaines de kilomètres plus loin.
On en a profité pour changer le filtre à essence, par mesure de précaution.. Dernier ravitaillement de fruits frais, pêches melons, qui nous feront patienter pour le déjeuner de 17H.
La deuche est contente, elle est en vent arrière. Elle va nous faire un festival de douceur, descente et remontée des oueds qui s’enchainent, sans jamais rétrograder. Le vent change de direction ? Elle s’adapte sans aucun reproche, elle va même nous impressionner à flirter avec les 100 km/h, mais nous souhaitons la ménager, aussi nous levons le pied.
C’est la mer que nous longeons toujours qui doit l’inspirer, même si les stigmates de ses caprices sont apparaissent sur la plage.
A la hauteur de Tarfaya, nous changeons de cap, nous étions presque Nord, nous voilà en direction de l’est. Les nombreux camions que nous croisons font sursauter le capot, trembler le pare-brise, vibrer les portes, dans un souffle impressionnant.
C’est le week-end aussi au Maroc, on vient en famille ou entre amis, gouter aux délices de la plage. Des petites cahutes sur le bord de mer accueillent ces heureux élus. Les embruns marins nous flattent la narine, et il n’y a pas que les embruns. Les pêcheurs en profitent pour vendre leur marchandise au bord de la route. Une pyramide de cailloux pour signaler leur présence, et le tour est joué. Le client afflue. Odeurs mélangées de mer et de poisson, qui pour certains ont du prendre quelques coups de soleil et ignorent la DLC.
Arrêt à Ksar el Chibani, un couple d’européens s’est installé ici il y a quelques années. Ils étaient venus en vacances en caravane et ont décidé de venir passer leur retraite ici. Achat d’un terrain isolé, construction d’une charmante demeure avec vue sur l’oued, et la mer, ils comptent en faire un endroit paisible de repos pour le touriste de passage, ou ceux qui veulent profiter du lieu, qui inspire à la méditation.
Au large, nous raconte la jeune retraitée, à un peu plus de 140 km des côtes, les îles Canaries, possession espagnole depuis 1479. Cet archipel attire de plus en plus la convoitise des malheureux qui veulent gagner l’Europe. La majorité est malienne et sénégalaise. La semaine dernière, c’est encore une pirogue qui a chaviré, la mer a rendu 17 corps sur le littoral, et il y avait des femmes et des enfants. Quand ils se font prendre par la police marocaine, les clandestins sont rapatriés chez eux, mais dans quel état : ils sont affamés, malades, et n’ont qu’une envie, c’est de recommencer… « C’est terrible ».soupire- t- elle, avec une esquisse de larme dans l’œil.
Avant de reprendre la route, nous irons voir l’une de ces plages où ces candidats au voyage partent vers l’inconnu. Thierry regarde la mer avec le paradoxe du mépris et de l’envie. Même si le fleuve Niger coule à Bamako, ce n’est pas la mer. Pourquoi ne pas revenir cet été avec sa famille, et son petit dernier qui ne l’a jamais vue ?
Enième point de contrôle de la gendarmerie Royale à l’entrée de Tan Tan. Sérénade habituelle très courtoise, « Bonjour, d’où venez vous ? Où allez vous ? Votre nationalité ? Votre profession ? Avez-vous rempli les formalités ? » Nos passeports en main, qu’il ouvre mécaniquement sans les regarder, c’est la deuche qu’il observe avec un sourire attendri. « Elle est très belle ! ». Lentement, il en fait le tour une fois,… deux fois, revient vers nous : « elle est très très belle !» Il se recule pour l’admirer de nouveau, et dégaine…son appareil photo « s’il vous plait ?, je peux la prendre en photo ? Je vous en supplie ! » Multiples clic, clac, la deuche est dans la boite. « Prenez bien soin d’elle ! », nous lance-t-il sur un ton paternel, comme s’il s’agissait de sa fille. On quitte le point de contrôle, avec dans notre rétroviseur, un gendarme heureux…Article principal