par Myriam Berber
Article publié le 02/05/2008 Dernière mise à jour le 02/05/2008 à 22:04 TU
Vue plongeante d'une scène de distribution de riz à Haïti par la Minustah (Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti).
(Photo : Philippe Nadel)
« Les émeutes de la faim risquent de s’étendre si les dirigeants mondiaux ne prennent pas de mesures radicales », a prévenu le Sénégalais Jacques Diouf, directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon a également appelé la communauté internationale « à prendre des mesures immédiates à long terme ». L’appel a été entendu. L’heure est à la mobilisation générale un peu partout dans le monde. Pour le président de la Banque mondiale, « depuis quelque mois, pour environ 2 milliards d’individus dans le monde, la cherté de la nourriture est devenue un combat quotidien et même une question de survie ».
La première urgence, selon Robert Zoellick, est de renflouer le Programme alimentaire mondial (PAM). Cette agence onusienne, qui octroie de l’aide d’urgence aux pays pauvres, nourrit 73 millions de personnes chaque année dans 78 pays. Avec l’envolée des denrées alimentaires : le prix du riz, aliment de base, dans bon nombre de pays pauvres, a grimpé de 75% en deux mois, Celui du blé s’est envolé de 120% sur l’année, le PAM, qui évalue ses besoins totaux pour 2008 à 3,1 milliards de dollars, a demandé une rallonge d’urgence de 755 millions de dollars pour lui permettre de mener à bien son action. La FAO, l’agence onusienne spécialisée dans l’agriculture, demande quant à elle 1,7 milliard de dollars pour renforcer la production agricole des pays touchés par la crise, alors que les stocks alimentaires mondiaux sont au plus bas depuis 1980.
« Un total de 5 milliards en 2008 et 2009 à la lutte contre la faim »
Le président George W.Bush a d’ores et déjà demandé, jeudi 1er mai 2008, au Congrès américain d’approuver une aide de 770 millions de dollars, qui s’ajouteront aux 200 millions de dollars d’aide débloqués le 14 avril. Ce qui porterait l’aide américaine à 1 milliard de dollars. Le président américain a souligné que « les Etats-Unis dépenseront un total de 5 milliards en 2008 et 2009 à la lutte contre la faim ». Pour sa part, le Canada a annoncé qu'il consacrerait près de 50 millions de dollars supplémentaires à l’aide alimentaire. Cette contribution porte à 230 millions de dollars le soutien canadien pour l’exercice 2008-2009, dont 160 millions à l’Afrique.
Dans le concert des promesses, la Commission européenne s’est engagée, le 22 avril 2008, à fournir 182,21 millions de dollars puisés dans des fonds européens. Cela portera à 440,17 millions de dollars l’aide alimentaire totale promise jusqu’à présent en 2008 par Bruxelles. Dans le même temps, l’Union européenne a également pris des mesures pour augmenter la production agricole. Parmi ces mesures : la mise en jachère de terres a été gelée, le niveau des quotas laitiers a été relevé et les droits de douane sur les céréales ont été supprimés. Côté Français, le président Nicolas Sarkozy a annoncé, le même jour, le doublement de son aide qui passera à près de 100 millions de dollars dès 2008. Le 30 avril 2008, le Koweit a annoncé qu’il contribuerait également à hauteur de 100 millions de dollars pour la création d’un fonds islamique destiné à fournir de l’aide alimentaire.
Une «révolution verte » en Afrique
D’autres pays cherchent une solution régionale. L’Amérique centrale envisage « d'investir 630 millions de dollars pour augmenter la production agricole locale » et espère « une aide du Venezuela, riche en pétro-dollars », a indiqué le 26 avril le ministre nicaraguayen de l'Agriculture Ariel Bucardo à l’issue d’une réunion qui rassemblait plusieurs pays d’Amérique centrale ainsi que Cuba, Haïti, la République dominicaine et le Venezuela. L’Amérique centrale, qui importe une grande part de sa nourriture et exporte très peu de matières premières, pourrait être, selon le FMI, l’une des régions les plus touchées par la crise alimentaire mondiale.
Parallèlement à ces aides financières, il faut aider ces populations à se doter d’un système agricole productif. Robert Zoellick a avancé quelques propositions dans le « New Deal agricole » afin de soutenir l’idée d’une « révolution verte » en Afrique où la productivité agricole est la plus faible au monde. Selon lui, cette révolution implique des réformes dans le foncier, les engrais, l’irrigation mais aussi la commercialisation, le marketing ou bien encore l’adoption de règles sanitaires. Dans cette perspective, la Banque mondiale annonce le doublement de ses prêts à l’agriculture en Afrique. Ils passeront à 800 millions de dollars pour l’année 2009.
A écouter
Sur le respect du droit à l'alimentation
« J'en appelle à une session spéciale du Conseil des droits de l'homme pour s'emparer de la question du droit à l'alimentation. »
02/05/2008 par Philippe Bolopion
Sur le développement des biocarburants
« Ces politiques qui, au fond, occupent des terres arables, en quantité limitées sur la planète, pour produire des carburants pour faire rouler les automobiles (...) je crois qu'il faut sur cette question un gel des investissements. »
02/05/2008 par Philippe Bolopion