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Crise alimentaire mondiale

Réunion de la cellule spéciale de l'ONU

par Myriam Berber

Article publié le 12/05/2008 Dernière mise à jour le 13/05/2008 à 04:49 TU

Le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon (c) lors de la réunion sur la crise alimentaire mondiale du 28 avril.(Photo : UN)

Le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon (c) lors de la réunion sur la crise alimentaire mondiale du 28 avril.
(Photo : UN)

Autour du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, les principaux dirigeants des agences onusiennes, de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international ainsi que des experts du monde entier se sont réunis lundi 12 mai 2008 à New York. Objectif : élaborer une stratégie face à la crise provoquée par la flambée des prix des produits alimentaires de base, riz, blé et maïs, notamment. La situation risque d’empirer dans les semaines et les mois à venir. Les dégâts provoqués par le cyclone en Birmanie pourraient affecter les perspectives de production à l’échelle mondiale.

La cellule spéciale des Nations unies sur la pénurie alimentaire mondiale s’est réunie pour la première fois ce lundi 12 mai à New York. Sous l'autorité du secrétaire général Ban Ki-moon, cet état-major qui rassemble les dirigeants des 15 agences onusiennes, du FMI et de la Banque mondiale, a jeté les bases d’un « cadre global d’action » comprenant une série de plans à court et long terme pour faire face à la flambée des prix alimentaires à travers le monde. Cette crise a déjà provoqué des émeutes dans près de 37 pays dans le monde, dont Haïti, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, l’Egypte, l’Ethiopie, l’Indonésie et les Philippines.

Selon la Banque mondiale, la cherté de la nourriture est devenue un combat quotidien pour près de 2 millions d’individus dans le monde. Parmi les causes de cette crise sont évoquées la baisse de la production agricole dans les pays en développement, l’augmentation de la consommation dans les pays émergents et le développement des biocarburants. La FAO a pourtant estimé, ce lundi, que la production mondiale de riz atteindrait un niveau record en 2008, mais que les prix, eux, resteraient élevés à court terme.

Le riz basmati à 1 400 dollars la tonne

Et dans ce marché tendu, le moindre accident climatique aggrave la situation. La destruction du grenier alimentaire en Birmanie par le cyclone Nargis a provoqué une nouvelle flambée des cours mondiaux . À Chicago, le cours du riz a augmenté de 5% en une semaine, sur les marchés à terme. Le riz basmati se négocie à 1 400 dollars la tonne. « Le cyclone Nargis réduira fortement la production de riz dans ce pays. La Birmanie aura sans doute besoin d’un coup de main des pays voisins notamment la Thaïlande et le Vietnam pour ses importations de riz et cela pourrait entraîner des tensions supplémentaires sur les cours mondiaux de riz », a expliqué la FAO, l’agence onusienne spécialisée dans l’agriculture.

La priorité immédiate est de nourrir les populations. Ban Ki-moon a réitéré l'appel de l'ONU aux pays donateurs leur demandant de répondre d’urgence aux appels de fonds lancés par les diverses agences. Le Programme alimentaire mondial (PAM) qui évalue ses besoins totaux pour 2008 à 3,1 milliards de dollars, a demandé une rallonge d’urgence de 755 millions de dollars pour lui permettre de mener à bien son action. La FAO demande quant à elle 1,7 milliard de dollars pour renforcer la production agricole des pays touchés par la crise, alors que les stocks alimentaires mondiaux sont au plus bas depuis 1980. La Banque asiatique de développement vient de débloquer 500 millions de dollars d'aide d'urgence. Le président George W.Bush a d’ores et déjà demandé au Congrès américain d’approuver une aide de 770 millions de dollars, qui s’ajouteront aux 200 millions de dollars d’aide débloqués le 14 avril. Ce qui porterait l’aide américaine à 1 milliard de dollars. Pour sa part, la Commission européenne s’est engagée, le 22 avril dernier, à fournir 182,21 millions de dollars puisés dans des fonds européens. Cela portera à 440,17 millions de dollars l’aide alimentaire totale promise jusqu’à présent en 2008 par Bruxelles.

Une nouvelle politique alimentaire

Parallèlement aux aides financières mondiales, les Nations unies doivent aussi explorer des solutions à plus long terme. Une tâche plus que difficile pour concilier les tenants du protectionnisme et ceux de l’ouverture des marchés, ou encore partisans et adversaires des biocarburants. Pour répondre à cette crise alimentaire, l'ancien secrétaire général de l'ONU, Koffi Annan, plaide pour une « révolution verte » en Afrique. Révolution qui passerait entre autres par une plus grande diversification des cultures et de meilleures semences, mais aussi par la commercialisation, le marketing ou bien encore l’adoption de règles sanitaires. Dans cette perspective, la Banque mondiale annonce le doublement de ses prêts à l’agriculture en Afrique. Ils passeront à 800 millions de dollars pour 2009.

Face à la crise, plusieurs gouvernements ont également décidé de réorienter leur politique alimentaire. Les Emirats arabes unis répondent à plus de 85% de leurs besoins alimentaires au moyen d'importations qui proviennent des États-Unis, du Royaume-Uni, de l'Allemagne et de la France. Pour moins dépendre des importations et avoir un accès durable à l’alimentation dont ils ont besoin, ce pays du Golfe a ainsi décidé d’investir dans des terres agricoles au Pakistan, pour y développer des produits de première nécessité. Outre un climat très favorable et une excellente base de ressources naturelles pour l'agriculture, le Pakistan offre des incitations fiscales plus qu’intéressantes pour les investisseurs étrangers. Si l’on en croit des informations rapportées, ce lundi 12 mai 2008 par le Financial Times, Abraaj Capital qui gère un capital de près de 4 milliards de dollars à Dubai, un des plus gros fonds d’investissements privés du Moyen-Orient, vient d’annoncer un projet en ce sens. Le gouvernement pakistanais aurait donné un accord de principe pur la vente de champs agricoles. Pas moins de 800 000 acres de terre ( 324 000 hectares) de ferme ont déjà été achetés.

A écouter

Première réunion lundi de la cellule de crise de l'ONU sur la pénurie alimentaire

« La cellule de crise appelle les pays du monde entier à s'assurer que leurs politiques, notamment d'exportation de denrées alimentaires, n'aient pas pour conséquence d'exacerber la crise alimentaire mondiale. Les denrées alimentaires indispensables doivent être fournies sans entraves»

13/05/2008 par Philippe Bolopion

Production record de riz en 2008, selon la FAO : une bonne nouvelle, à moyen terme

« Une grande partie de ce riz sera récolté en fin d'année, il faudra donc attendre l'an prochain pour voir les prix se calmer sur le marché mondial. Des prix qui resteront de toutes façons élevés...»

13/05/2008

Dossier spécial

(Photo : AFP)