par Nicolas Falez
Article publié le 21/05/2008 Dernière mise à jour le 22/05/2008 à 23:29 TU
L'émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, et les membres du nouveau Parlement libanais assistent à la signature de l'accord de Doha par le parlementaire Samir Geagea, le 21 mai 2008.
(Photo : Reuters)
La crise libanaise et l’accord de Doha en cinq questions-réponses :
Qui sont les signataires de l’accord de Doha ?
La majorité libanaise, également appelée « mouvement du 14 mars », est essentiellement composée du Courant du futur (parti musulman sunnite dirigé par Saad Hariri et dont est issu le Premier ministre Fouad Siniora), du Parti socialiste progressiste (dirigé par le chef druze Walid Joumblatt) et des Forces libanaises (du chrétien Samir Geagea).
Dans l’opposition (parfois appelée « mouvement du 8 mars »), on trouve principalement le Hezbollah (parti musulman chiite pro-iranien, dirigé par Hassan Nasrallah), Amal (chiite également, c’est le parti du président du Parlement Nabih Berri) et le Courant patriotique libre (du général chrétien Michel Aoun).
La majorité libanaise est soutenue par les Occidentaux et l’Arabie Saoudite. L’opposition dispose du soutien de la Syrie et de l’Iran.
Quel est le contenu de l’accord ?
- Une séance du Parlement doit avoir lieu dans les 24 heures suivant la conclusion de l’accord, afin d’élire un président de la République. Il s’agira de l’actuel chef de l’armée Michel Sleimane.
- Un gouvernement d’union de 30 membres doit être formé. Il comprendra 16 ministres de la majorité et 11 de l’opposition. Les 3 restants seront nommés par le président de la République.
- Les parties s’engagent à ne pas démissionner du gouvernement et à ne pas paralyser son action (c’est la stratégie que l’opposition avait pratiquée fin-2006, lorsque ses ministres avaient quitté le gouvernement)
- Interdiction du recours aux armes à des fins politiques
- Adoption de la loi électorale de 1960 (qui n’était plus en vigueur) pour les législatives de l’an prochain. Avec toutefois des amendements concernant le découpage électoral de Beyrouth (la capitale envoie 19 députés sur un total de 128 au Parlement libanais).
- Le nouveau président conduira un dialogue visant à étendre l’autorité de l’Etat dans tout le pays.
- L’autorité sur les forces de sécurité et forces militaires est entre les mains de l’Etat
- Les dirigeants libanais s’abstiendront d’user d’un langage exacerbant les tensions politiques.
Y a-t-il un vainqueur et un vaincu ?
L’Iran, la Syrie, l’Arabie Saoudite, les Etats-Unis, la France et d’autres encore se sont empressés d’applaudir l’accord de Doha. Le président français, Nicolas Sarkozy, salue les efforts de l’émir du Qatar et rappelle que la France s’est elle-même beaucoup investie dans la recherche d’une solution à la crise libanaise (7 voyages au Liban du chef de la diplomatie française Bernard Kouchner en 6 mois). Tout le monde est-il réellement satisfait ? Oui, si on considère que le Liban a frôlé la guerre civile ces dernières semaines. Mais on notera tout de même que pour parvenir à cet accord, la majorité libanaise a reculé sur un point-clé : elle accorde à l’opposition une minorité de blocage au sein du gouvernement (11 ministres sur 30).
Quelles sont les questions qui restent en suspens ?
L’accord de Doha ne remet pas en cause l’armement du Hezbollah. Au nom de la résistance contre Israël, la milice chiite a pu conserver son arsenal, à l’issue de la guerre civile libanaise (même après le retrait israélien du Sud-Liban en 2000). Des armes qui ont d’ailleurs été utilisées contre l’Etat hébreu, lors du conflit de l’été 2006. La milice chiite pro-iranienne a longtemps assuré qu’elle ne retournerait jamais ses fusils contre d’autres libanais… c’est pourtant ce qu’elle a fait début-mai, lors d’affrontements interlibanais meurtriers. Aujourd’hui le Hezbollah reste le seul groupe politico-confessionnel à disposer de son propre arsenal, ce qui pèse forcément sur le climat politique du pays.
Autre point d’interrogation : l’accord de Doha permettra-t-il de combler le fossé qui sépare les deux camps, opposition et majorité ? Ces dernières années, la crise libanaise s’est cristallisée autour d’une tendance « pro-occidentale » et d’une tendance proche de l’Iran et de la Syrie. Rien ne dit que le Liban va cesser d’être un terrain d’affrontements entre ces deux blocs et – plus précisément – de la confrontation Iran/Etats-Unis.
Enfin, l’attitude de la Syrie et de ses alliés libanais dans cette crise a souvent été expliquée par la crainte de voir l’enquête sur l’assassinat de Rafic Hariri en 2005 mettre en cause de hauts-responsables syriens. La communauté internationale affirmant toujours son intention de juger les assassins de l’ancien Premier ministre libanais, on peut se demander si les progrès dans la mise en place du « Tribunal Hariri » ne risquent pas d’ouvrir de nouvelles périodes d’instabilité au Liban.
Qui est le Général Michel Sleimane ?
L’homme qui doit être élu dimanche à la présidence de la République libanaise est âgé de 59 ans, c’est un chrétien originaire du nord du pays. Général, il commande les forces armées de son pays depuis 1998. L’homme a su se tenir à l’écart des luttes politiques… quitte à s’attirer des critiques au moment de la prise de contrôle d’une partie de Beyrouth par le Hezbollah, début-mai. Michel Sleimane dirige une armée libanaise qui a su se renforcer ces dernières années, notamment en se déployant dans le sud du pays après la guerre de 2006 contre Israël ou en affrontant les islamistes retranchés dans le camps de réfugiés palestiniens de Nahr el-Bahred en 2007.
A écouter
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« Le gouvernement qui va s'installer aux commandes du pays et un gouvernement de transition, de supervision des élections et certainement pas de décisions capitales. »
23/05/2008
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« Je revois les commerces, qui reprennent, les restaurants, les enfants jouant à la bicyclette, au ballon. »
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