par Ariane Picard
Article publié le 19/06/2008 Dernière mise à jour le 20/06/2008 à 07:17 TU
Des camions transportant de la nourriture attendent l'ouverture du point de passage de Sufa pour entrer dans la bande de Gaza.
(Photo : Reuters)
Quel est le contenu de l’accord ?
Après une année d’affrontements et de tensions permanentes, l’Etat hébreu et le mouvement islamiste palestinien du Hamas estiment qu’une période d’accalmie est nécessaire dans la bande de Gaza.
Pour rappel, la bande de Gaza, territoire de 362 km2, où vivent 1,5 million de Palestiniens, a subi depuis un an le blocus israélien. Aujourd’hui, elle connaît une crise humanitaire sans précédent. En effet, le blocus a engendré des conditions de vie très difficiles à Gaza : de nombreux malades n’ont pu bénéficier de soins médicaux, les denrées alimentaires sont plus difficiles d’accès, etc.
« Le cycle des violences a convaincu les deux côtés qu’il n’y avait pas de solution militaire (...). Il faut une solution politique », d’après Jihad Hamad, politologue palestinien de l’université Al-Ahzar de Gaza.
Cependant, le cessez-le-feu n’est viable que si certaines modalités sont respectées sur la durée. « Comme nous l’avons dit aux Egyptiens, nous sommes prêts à cesser le feu à deux conditions. La première est que les Israéliens arrêtent toutes leurs agressions contre notre peuple. La deuxième est qu’ils ouvrent les frontières afin que toutes les marchandises nécessaires à la population puissent entrer à Gaza, c’est-à-dire une levée du siège de la bande de Gaza », a déclaré Tahar al-Nounou, porte-parole du gouvernement Hamas au micro de RFI.
Côté israélien, les responsables estiment que cette trêve n’est pas synonyme d’apaisement avec le Hamas. « Nous n’avons pas négocié avec le Hamas. Nous avons réagi aux propositions égyptiennes. Nous allons tenter cette fois-ci une trêve dans les termes proposés par l’Egypte », a expliqué Ygal Palmor, porte-parole du gouvernement israélien sur l’antenne de RFI.
Par ailleurs, bien que le Hamas ait participé à la conclusion de cette trêve, aujourd’hui rien ne garantit qu’il puisse contrôler les autres mouvements armés, autres facteurs considérés comme une menace par Israël.
A l’heure qu’il est, l’agenda de la trêve prévoit de rouvrir progressivement des terminaux routiers reliant Israël et la bande de Gaza, afin de permettre aux habitants de Gaza d’accéder aux marchandises dont ils ont besoin pour vivre décemment.
Mais ce que le mouvement islamiste palestinien exige surtout, c’est la réouverture du grand terminal de Rafah, entre la bande de Gaza et l’Egypte. Une position névralgique qui ne peut fonctionner sans l’accord d’Israël.
Quels sont les acteurs de la trêve ?
Le Hamas, en arabe « mouvement de résistance islamique », est considéré comme une organisation terroriste par la communauté internationale. D’obédience sunnite, il est actuellement le plus important mouvement islamiste palestinien.
En juin 2007, le Hamas prend le contrôle de cette enclave palestinienne. En réaction, Israël provoque un durcissement de la politique d’isolement et du blocus économique sur la bande de Gaza.
L’Egypte joue un rôle de médiateur entre le Hamas et Israël. Toutes les négociations passent par elle. Par conséquent, cette trêve n’est pas synonyme de reconnaissance d’Israël par le Hamas et inversement.
Rien n’est donc moins sûr que la tenue de cette trêve. De plus, quelques heures à peine avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, dans la nuit du 18 au 19 juin, un Palestinien a trouvé la mort et deux autres ont été blessés lors de tirs israéliens au sud de Gaza.
Enfin, sur l’année qui vient de s’écouler, ce sont 600 Palestiniens et 18 Israéliens qui ont perdu la vie. Signe supplémentaire de la fragilité sur laquelle repose cette trêve.
Quels avantages et risques pour Israël ?
Pour les deux parties, l’enjeu est de taille. En visite à Paris mercredi 18 et jeudi 19 juin, Ehoud Barak, le ministre de la Défense israélien a déclaré au micro de RFI : « Nous nous sommes mis d’accord sur l’approche égyptienne suggérant un cessez-le-feu et mettant un arrêt temporaire des tirs (…). Nous pensons qu’avant de commencer une opération majeure (ndlr : offensive militaire), nous devions donner une chance ».
Idem pour le Hamas ?
Si la trêve tient, le Hamas verrait son image renforcée au détriment du gouvernement de Mahmoud Abbas, situé à Ramallah, en Cisjordanie. Mais il deviendrait surtout un acteur incontournable des négociations aux yeux d’Israël alors que l’Etat hébreu, considère les membres du Hamas comme des terroristes.
Pour sa part, Salam Fayyad, le Premier ministre palestinien a estimé que cette trêve était « un pas très important » concernant l’amélioration de la situation humanitaire dans la bande de Gaza. Et celui-ci de lancer un appel à Israël pour l’arrêt de ses opérations militaires en Cisjordanie aussi.
Quid du sort de Gilad Shalit ?
Depuis deux ans, le jeune soldat israélien Gilad Shalit est détenu par un commando palestinien. Ainsi, en avril dernier, le Hamas avait adressé une liste de 450 prisonniers palestiniens dont il réclame la libération à l’Etat hébreu, par l’intermédiaire de l’Egypte. Le Hamas a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne libèrera pas le jeune soldat si Israël ne relâche pas ces prisonniers en contrepartie.
Par ailleurs, ce jeudi, la famille du jeune soldat regrette que la trêve ait été conclue sans prendre en compte le sort de celui-ci. En effet, il y a quelques mois, Ehoud Olmert, le Premier ministre israélien, avait affirmé à Noam Shalit, le père du soldat détenu, qu’aucun accord ne serait conclu avec le Hamas, tant que son fils ne serait pas libre.
Ce n’est qu’une fois la trêve passée que Tzipi Livni, ministre israélienne des Affaires étrangères, a déclaré que si le Hamas souhaitait obtenir la réouverture du terminal de Rafah, point d’ouverture de la bande de Gaza vers l’Egypte, la libération du soldat Shalit était la condition incontournable. Ce qui implique une intensification des pourparlers avec ses ravisseurs. Un premier signe d’espoir peut-être avec la visite la semaine prochaine d’un négociateur israélien au Caire afin de discuter du sort du jeune soldat.
A Paris, Bernard Kouchner, le ministre des Affaires étrangères, a salué les efforts de l’Egypte pour parvenir à ce résultat, en affirmant enfin que « seule une solution politique peut résoudre la crise actuelle à Gaza ».
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