par Mehdi Benchelah
Article publié le 14/07/2008 Dernière mise à jour le 14/07/2008 à 17:36 TU
Pendant la plénière au Grand Palais, le président libanais Michel Sleimane, le Premier ministre jordanien Nader al-Dahabi et le Premier Ministre irlandais Brian Cowen, le 13 juillet 2008.
(Photo: AFP)
Coup d’envoi réussi pour l’Union pour la Méditerranée. Malgré les réticences initiales de certains et d’âpres négociations de dernière minute, les quarante trois chefs d’Etat et de gouvernement ont réussi à se mettre d’accord pour signer une déclaration commune. Celle-ci crée un cadre politique nouveau qui liera les pays de la Méditerranée aux pays de l’Union européenne et organisera une coopération sur de grands projets comme la dépollution de la Méditerranée, la création d’autoroutes maritimes, la protection civile, l’économie des PME et un plan solaire pour trouver des énergies alternatives.
Le texte final mentionne que les parties s’engagent à arriver à un Moyen-Orient sans armes de destruction massive, y compris d’armes nucléaires. Les membres de l’Union pour la Méditerranée se sont engagés à promouvoir le respect des droits de l’homme et la bonne gouvernance. La déclaration mentionne aussi que les chefs d’Etat réaffirment leur soutien au processus de paix israélo-palestinien dans le cadre du processus d’Annapolis.
En marge du sommet de Paris, on a assisté au cours du week-end à un intense ballet diplomatique avec la réception à l’Elysée des principaux responsables politiques du Proche-Orient. Samedi matin, le président libanais, le général Michel Sleimane, a été reçu par Nicolas Sarkozy puis ce fut le tour du président syrien Bachar al-Assad dont la dernière visite en France remontait à juillet 2001. A l’issue d’une réunion de travail avec le président français assisté de l’émir du Qatar le Cheikh Hamad Al-Thani, qui avait joué les médiateurs avec succès en mai à Doha, Bachar al-Assad a reconnu la souveraineté libanaise et a déclaré qu’il souhaitait l’ouverture d’une représentation diplomatique syrienne à Beyrouth. Le président syrien s’est pourtant refusé à donner une date précise, se refugiant derrières des considérations techniques. L’ouverture formelle d’une ambassade syrienne serait considérée comme un symbole extrêmement fort de la réconciliation entre les deux pays puisque depuis l’indépendance du Liban en 1943, la Syrie n’a jamais voulu ouvrir une représentation diplomatique chez son voisin.
Surtout, la France se voit offrir pour la première fois un rôle de coparrain du processus de paix entre la Syrie et Israël une fois que les négociations seront entrées dans la phase des pourparlers directs. Le rôle de médiateur étant d’ordinaire réservé au Etats-Unis, cette annonce représente une avancée majeure de la position diplomatique de la France au Proche-Orient. Le président Sarkozy a proposé de fournir des militaires français pour garantir un accord si les parties le souhaitaient.
Mais la surprise est surtout venue du côté du processus de paix israélo-palestinien lors de la visite du Premier ministre israélien Ehud Olmert et du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à l’Elysée dimanche matin. Lors de la conférence de presse commune à l’issue de leur rencontre, Ehud Olmert en effet a annoncé que « l’on avait jamais été aussi proche d’arriver à un accord » entre Israéliens et Palestiniens, et parlé de « moment décisif. ». Il convient néanmoins de relativiser cette annonce car le Premier ministre israélien est confronté à de nombreuses accusations de fraude et de corruption en Israël qui rendent son avenir politique très incertain.
Le président Mahmoud Abbas a quant à lui souligné les quatre qualités du président Sarkozy pour jouer les médiateurs entre Israéliens et Palestiniens. « Vous êtes président de la France. Vous êtes le président de l’Union pour la Méditerranée. Vous êtes le président de l’Union européenne. Surtout vous êtes notre ami et vous êtes l’ami d’Israël. Cela vous donne la possibilité d’aider au succès du processus de paix ».
Se méfier des effets d'annonce et attendre de voir sur le terrain
Les grands gagnants du sommet de l’Union pour la Méditerranée, outre Nicolas Sarkozy qui en a été l’initiateur, sont la Syrie qui réussi à briser son isolement diplomatique et à revenir au sein de la communauté internationale, et Israël qui parvient à intégrer un cadre politique avec plusieurs Etats arabes sans fournir aucune contrepartie.
A l’issue du sommet, la position diplomatique de la France sort sans aucun doute renforcée, même s’il faut se méfier des effets d’annonce des uns et des autres et attendre de voir sur le terrain ce qui se passera dans les années à venir. Le sommet de l’Union pour la Méditerranée a toutefois déjà réussi à amener un changement d’atmosphère positif sur les grandes questions diplomatiques du Proche-Orient.
La fin du sommet a été marquée par un violent incident entre la délégation palestinienne et les négociateurs français. De source palestinienne, on affirme que plusieurs mentions dans le paragraphe numéro 7 qui devait figurer dans la déclaration finale ont tout simplement disparu. Elles ont été remplacées par une simple phrase qui réaffirme le soutien au processus de paix israélo-palestinien dans le cadre de la réunion ministérielle de Lisbonne en 2007 et du processus d’Annapolis uniquement, sans mentionner la conférence de Madrid et les résolutions de l’ONU qui encadrent normalement le processus de paix israélo-palestinien.