Article publié le 12/08/2008 Dernière mise à jour le 12/08/2008 à 16:22 TU
Avec notre correspondant à Tbilissi, Régis Genté
Livide et au bord des larmes, Mikheil Saakachvili a terminé son allocution devant une partie de son gouvernement, retransmise en direct à la télévision, lundi-soir. Plus tard, dans la nuit, on le voyait un peu rafraîchi, repeigné et ayant repris de la vivacité, tenter de gagner à sa cause, l’opinion publique mondiale sur la BBC.
« Il y a des drapeaux géorgiens partout autour du Parlement (...) mais derrière cette attitude de défi, il y a quand même une très grande crainte et une grande inquiétude pour l'avenir de la Géorgie. »
Si politiquement, le président géorgien semble encore soutenu par sa population, il est en revanche terriblement affaibli sur la scène internationale. Fort de son écrasante victoire militaire, la Russie ne semble accepter de discuter avec la communauté internationale, du futur de la Géorgie, qu’une fois que sa « bête noire » aura démissionné. « Mikheil Saakachvili doit se retirer », a déclaré à Moscou, ce mardi matin, Sergueï Lavrov, le chef de la diplomatie russe.
Pour l’heure, le tombeur d’Edouard Chevardnadze, lors de la Révolution des roses de novembre 2003, se veut combatif. Il attend beaucoup de ses amis américains et européens, et notamment de Nicolas Sarkozy, avec qui l’entente est bonne. Mais dans les circonstances du moment, les sentiments n’ont certainement guère de place.
Nicolas Sarkozy est donc à Moscou pour tenter une médiation sachant qu'en fin de journée il sera à Tbilissi.
Avec notre envoyée spéciale à Moscou, Marina Mielczarek
Le président Medvedev recevant, le 12 août au Kremlin, Nicolas Sarkozy, le chef de l'Etat français et président en exercice de l'Union européenne.
(Photo : Reuters)
Les deux présidents, Nicolas Sarkozy et Dmitri Medvedv sortiront avec une heure de retard ; ce qui veut certainement dire que les négociations sont plus difficiles que prévues. La rumeur ici, dans les couloirs du Kremlin, avance que le Premier ministre, Vladimir Poutine ferait partie de l’entretien. La question étant de savoir si sa présence sera officialisée durant le déjeuner présidentiel, prévu tout à l’heure.
Néanmoins, juste avant d’entrer en réunion à huis clos, Dmitri Medvedev et Nicolas Sarkozy ont laissé échapper quelques bribes de conversation, que l’on a pu comme cela, récolter. Pour le président russe : « Les objectifs sont atteints, l’agresseur puni, ses forces désorganisées. Mais attention, l’arrêt des hostilités ne signifie pas un cessez-le-feu total et durable, la Russie se garde la possibilité d’intervenir dans d’éventuelles poches de résistance ».
La scène s’est déroulée très vite, au seuil de la porte, mais le président français a écouté. Il était plutôt tendu. Il comprend que la Russie cherche à protéger les intérêts des russophones. Mais Nicolas Sarkozy a insisté tout à l’heure dans le couloir pour que : « Moscou respecte l’intégrité territoriale de la Géorgie ».
Pour ce qui est de la situation plus en détail. Difficile de savoir ce qui se passe exactement à Gori. La Géorgie affirme que l'aviation russe a attaqué, tuant de nombreuses personnes. Ce que dément l'état major russe. Toujours est-il qu'un journaliste néerlandais a été tué tout à l'heure lors d'un bombardement. Il travaillait pour la télévision, et c'est le cinquième reporter à perdre la vie depuis le début des combats.
Concernant la réunion avec la Russie qui était prévue à Bruxelles au siège de l'Otan, elle a été annulée. En tout cas pour l'instant. Il faut savoir qu'à l'ONU à New-York, la Russie a rejeté le projet de résolution rédigé par la France qui appelle à un cessez-le-feu et une sortie de crise en trois temps. George Bush, quant à lui demande à la Russie d’accepter un cessez-le-feu immédiat. Mais, rien n’indique que Washington soit prêt à punir l’envahisseur, par autre chose que par une condamnation verbale.
Avec notre correspondant à Washington, Jean Louis Pourtet
Condamnant ce qu’il a qualifié d’ « escalade brutale de la violence », George Bush a demandé à la Russie d’accepter un cessez-le-feu immédiat, ainsi que la médiation de la communauté internationale. « La Russie a envahi un Etat souverain voisin et menace un gouvernement démocratique, élu par son peuple. Un tel acte est inacceptable au XXIème siècle ».
Le président américain craint aussi un bombardement contre l’aéroport de Tbilissi. Pour George Bush, « Cette escalade du conflit a grandement terni l’image de la Russie dans le monde et elle entrave les relations de Moscou avec les Etats-Unis et l’Europe. Il est temps pour la Russie de respecter son engagement, d’agir pour mettre fin à la crise », a conclu le président américain.
Mais en dépit de cet avertissement, rien n’indique que Washington soit prêt à punir l’envahisseur, par autre chose que par une condamnation verbale. Condoleezza Rice, qui a multiplié les coups de fil, appuie avec le groupe des sept, une solution négociée. John McCain et Barack Obama ont eux aussi réclamé un cessez-le-feu.
Par ailleurs, le Pentagone a annoncé qu’ « il avait terminé le rapatriement des 2 000 Géorgiens de la force multinationale en Irak et avait prévenu à l’avance Moscou du plan de vol de ses C17 ».