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Géorgie / Russie

Washington hausse le ton contre Moscou

par Sylvain Biville, Stefanie Schüler

Article publié le 12/08/2008 Dernière mise à jour le 13/08/2008 à 05:51 TU

Le président américain George W. Bush (g) et son homologue russe Dmitri Medvedev.(Photos : Reuters)

Le président américain George W. Bush (g) et son homologue russe Dmitri Medvedev.
(Photos : Reuters)

Qualifiant l’intervention militaire russe en Géorgie d’« escalade dramatique et brutale », George W. Bush a lancé, ce lundi, une très sévère mise en garde à Moscou. Selon le président américain, l’action de la Russie met en danger ses relations avec l’Europe et les Etats-Unis.

Lundi, a peine rentré de son voyage aux Jeux Olympiques à Pékin, George W. Bush s’est précipité devant les caméras. Prononcé depuis le jardin des roses de la Maison Blanche, le ton de son allocution a été d’une rare gravité : « La Russie a envahi un pays souverain voisin et menace un gouvernement démocratiquement élu par son peuple, une telle action est inacceptable au 21e siècle », a déclaré le président américain. « Il semblerait que des actions soient en cours pour renverser le gouvernement (géorgien, ndlr) légitimement élu. Ces actions menacent les relations avec les Etats-Unis et l'Europe », a-t-il ajouté avant d’appeler Moscou à accepter le plan de paix de l’Union européenne. Celui-ci prévoit un cessez-le-feu immédiat et le retrait de toutes les forces d’Ossétie du Sud afin de restaurer le statu quo tel qu’il existait le 6 août, soit avant le début des affrontements.

Test pour la politique étrangère américaine

Les Américains prennent la crise en Ossétie du Sud très au sérieux, tel est le message adressé à Moscou. Si Washington veut se faire comprendre à tout prix, c’est parce que cette guerre pourrait se réveler catastrophique pour l'image de la diplomatie des Etats-Unis. C’est en tout cas ce que craignent plusieurs membres de l’administration Bush et officiers américains. Selon eux, les Etats-Unis risquent de passer pour la superpuissance, incapable d’aider la Géorgie en cas d’urgence. Un drame qui mettrait sérieusement en cause l’autorité de Washington dans la région du Caucase.

Aux Etats-Unis, des experts s’interrogent : après les projets américains d’élargir le bouclier antimissile jusqu’en Pologne, après le soutien de l’administration Bush au président géorgien Mikheïl Saakachvili pour promouvoir la démocratie à la frontière russe, après avoir appuyé la Géorgie et l’Ukraine dans leur démarche pour rejoindre l’Otan, n’est-il pas logique que Moscou voie aujourd’hui en Washington plus une menace qu’un partenaire ? « La manière avec laquelle nous avons traité les Russes ces deux dernières annés les a mis le dos au mur. Ils ne peuvent pas nous voir autrement que comme une nation hostile à leur intérêts », estime dans les colonnes du New York Times Michael Greig, chercheur à l’Université du Texas.

Pourtant, sous Vladimir Poutine et George W. Bush, les relations bilatérales entre les Etats-Unis et la Russie avaient atteint un niveau de proximité inédite depuis la fin de la guerre froide. Il y a sept ans, le président américain avait même discerné « au fond de l’âme » de son ancien homologue russe un partenaire « direct et digne de confiance ». Mais depuis deux ans, l’entente américano-russe s’envenime d’une manière inquiétante. Ces derniers jours, les Etats-Unis ont rapatrié les troupes géorgiennes stationnées en Irak, répondant ainsi à une demande du gouvernement géorgien, ce qui a été fermement condamné par Moscou.

La crise géorgienne : un test pour McCain et Obama

Pour John McCain, le conflit entre la Russie et la Géorgie apparaît comme une aubaine. Depuis des années, le sénateur de l’Arizona met en garde contre la dérive « autocratique » du pouvoir russe. Partisan de la manière forte contre Moscou, il réclame même son exclusion du G8, le groupe des huit pays les plus industrialisés.

Dès vendredi, le candidat républicain a fermement condamné « l’agression russe contre la Géorgie », alors que Barack Obama, se contentait prudemment d’appeler les deux parties « à la retenue ». Le sénateur de l’Illinois a depuis durci le ton, allant jusqu’à interrompre ses vacances à Hawaï, pour lire une déclaration lundi, devant une allée de palmiers, dénonçant « l’escalade militaire russe ».


Aujourd’hui John McCain et Barack Obama - qui se sont entretenus tour à tour avec la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice et avec le président géorgien Mikheïl Saakachvili - demandent tous les deux un cessez-le-feu sous l’égide de l’ONU, l’envoi de troupes de maintien de la paix dans la région et l’ouverture de négociations pour l’adhésion de la Géorgie à l’OTAN. Mais leur réaction initiale révèle une différence d’approche dans la gestion des crises.


Le candidat républicain, qui fait campagne sur son expérience internationale, a d’entrée de jeu pris fait et cause pour la Géorgie et son président, qu’il présente comme un ami, en accusant la Russie de chercher à le renverser. Son adversaire démocrate adopte lui une position plus mesurée. « Nous voulons un avenir de coopération avec le gouvernement russe », estime-t-il, tout en appelant Moscou à ne pas « régresser dans des conflits du passé ». L’équipe de campagne de Barack Obama a par ailleurs rappelé que le principal conseiller de politique étrangère de John McCain, Randy Scheunemann, avait travaillé pendant quatre ans comme consultant pour le gouvernement géorgien.

Ce mardi, le président russe Dmitri Medvedev a finalement annoncé la fin de l’opération militaire russe en Géorgie. La réaction de la Maison Blanche a été immédiate : Washington vérifie actuellement si la Russie a réellement mis un terme à ses attaques, a déclaré le porte-parole Tony Fratto. D’après lui, l’administration Bush réfléchit également à un soutien accru à son partenaire géorgien, « une fois que les tirs auront cessé ». Cette information a été confirmée seulement quelques minutes plus tard. Matthew Bryza, l’émissaire américain en mission à Tbilissi, a annoncé un plan d’aide économique renforcé. 

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