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Côte d'Ivoire

Cinq ministres auditionnés dans l'enquête sur la filière du cacao

par David Baché

Article publié le 15/08/2008 Dernière mise à jour le 15/08/2008 à 17:41 TU

Le procureur de la République d'Abidjan Raymond Tchimou.(Photo : Norbert Navarro/RFI)

Le procureur de la République d'Abidjan Raymond Tchimou.
(Photo : Norbert Navarro/RFI)

En Côte d'Ivoire, cinq ministres vont être auditionnés en tant que témoins dans le cadre de l'enquête sur les malversations dans la filière cacao. Une nouvelle étape dans l'enquête judiciaire menée sur les malversations et détournement d'argent présumés du milieu.

La vaste enquête sur la filière cacao lancée en octobre 2007 n'était jamais remontée si haut dans les arcanes du pouvoir ivoirien.

Les ministres auditionnés sont les actuels et anciens ministres de l'Economie et de l'Agriculture, à savoir les ministères qui ont autorité sur les divers organismes ivoiriens de gestion de la filière café-cacao. Parmi eux, l'actuel numéro deux du gouvernement et ancien ministre de l'Economie, Paul Bohoun Bouabré, son successeur Charles Diby Koffi, qui était à l'époque chargé du Budget au sein du même ministère, ainsi que l'actuel ministre de l'Agriculture, Amadou Gon Coulibaly, seront donc auditionnés par le juge d'instruction en charge de l'affaire, Ladji Gnakalé.

Dans un communiqué, le gouvernement précise bien que tous « ne sont pas inculpés mais seront simplement entendus pour éclairer par leur témoignage les investigations nécessaires à l'enquête en cours ».

Une enquête menée par le procureur de la République ivoirien Raymond Tchimou, à la demande du président Laurent Gbagbo.

Numéro un mondial, la Côte d'Ivoire produit chaque année plus d'un million de tonnes de cacao, qui rapportent à l'Etat environ 600 milliards de francs CFA (plus de 900 millions d'euros).

Election présidentielle

Ce n'est vraisemblablement pas une coïncidence, la prochaine élection présidentielle ivoirienne doit avoir lieu, en principe, le 30 novembre prochain.

A quelques mois de cette échéance électorale, le président Laurent Gbagbo, qui devrait être candidat à sa propre succession, est soucieux de mettre en avant sa volonté de faire le ménage. Au moment de l'annonce de la décision d'autoriser les auditions, à l'issue d'un Conseil des ministres, le gouvernement ivoirien a ainsi indiqué vouloir « marquer sa volonté de transparence (...) et son engagement à faire aboutir l'enquête ».

Et tant pis pour les anciens proches et collaborateurs du président.

Ce qui permet aussi à Laurent Gbagbo, dans la même optique électorale, de donner des gages à la communauté internationale.

Un audit de l'Union européenne rendu public en mai 2007, évoquait les « abus de biens sociaux » et les « ressources éventuelles détournées » au profit du régime.

Un mois plus tard, c'est l'ONG britannique Global Witness qui accusait directement le gouvernement ivoirien d'avoir détourné près de 27 milliards de francs CFA (plus de 40 millions d'euros) entre octobre 2002 et avril 2003 pour financer la guerre contre les rebelles des Forces nouvelles.

Un palier supplémentaire

Dans l'enquête, c'est un palier supplémentaire qui est aujourd'hui franchi.

En juin dernier, les principaux dirigeants de la filière café-cacao avaient déjà été arrêtés pour « détournement de fonds, abus de bien sociaux et escroquerie ».

Ces anciens tenants des divers organismes gérant la filière de l'or brun sont aujourd'hui détenus à la Maca, la maison d'arrêt et de correction d'Abidjan. Parmi eux, des proches du président Laurent Gbagbo et même des membres du parti présidentiel, le FPI.

Dans leurs différentes déclarations, ces dirigeants ont expliqué avoir toujours agi avec « les autorisations préalables des ministères de tutelle », explique le gouvernement ivoirien, qui justifie ainsi leur audition.

A noter enfin que Paul Bohoun Bouabré, actuellement ministre du Plan et du Développement, est par ailleurs dans le collimateur de la justice française à propos de la disparition en 2004 du journaliste Guy-André Kieffer, qui enquêtait, entre autres, sur la filière cacao.