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Russie/Géorgie

Une Russie décomplexée

par Patrick Adam

Article publié le 26/08/2008 Dernière mise à jour le 27/08/2008 à 04:20 TU

En reconnaissant l’indépendance des deux Républiques séparatistes de Géorgie, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, la Russie prend à revers Américains et Européens qui ont tous dénoncé cette initiative. Après avoir violemment réprimé l’attaque, par Tbilissi, de l’Ossétie du Sud et tardé à retirer ses troupes de Géorgie, Moscou nargue cette fois les Occidentaux sur le terrain diplomatique.

A Soukoumi (capitale de la République autoproclamée d'Abkhazie) des gens brandissent les drapeaux abkhaze (G), russe (C) et ossète (D). Sur la banderole : « République d'Abkhazie - Indépendante ».(Photo : Reuters)

A Soukoumi (capitale de la République autoproclamée d'Abkhazie) des gens brandissent les drapeaux abkhaze (G), russe (C) et ossète (D). Sur la banderole : « République d'Abkhazie - Indépendante ».
(Photo : Reuters)

C’est dans une posture très solennelle que le président russe Dimitri Medvedev est apparu à la télévision. Prenant les analystes par surprise, il décide donc de porter le fer sur le terrain diplomatique après avoir emporté une victoire militaire en Géorgie. Le message est clair, Moscou non seulement fait fi des appels à un respect du cessez-le-feu et donc à un retrait rapide de ses troupes, mais ne se laisse pas intimider et va au-delà des craintes exprimées par les Occidentaux.

Dimitri Medvedev

« Je me suis conformé à la volonté librement exprimée par les peuples ossète et abkhaze. »

écouter 00 min 42 sec

26/08/2008 par Alexandre Billette

C’est donc une Russie totalement décomplexée qui porte haut l’étendard de sa grandeur retrouvée, quitte à revoir sa doctrine pourtant maintes fois réaffirmée d’une intangibilité des frontières héritées de la guerre froide. L’argument lui avait servi à justifier sa répression en Tchétchénie, et récemment Moscou a toujours plaidé pour le respect de l’intégrité de la Serbie concernant le Kosovo, en contradiction des positions défendues par l’Union européenne et les Etats-Unis.

Ce demi-tour idéologique, les autorités russes l’assument pleinement. Alors que l’ancien dirigeant Mikhaïl Gorbatchev met en garde contre une « nouvelle scission » du monde, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov estime que son pays ne sera pas isolé au plan international. Dans le doute, le président Dimitri Medvedev affirme « n’avoir peur de rien », y compris d’une nouvelle « guerre froide », tout en assurant ne pas la vouloir.

La revanche sur le passé

Incontestablement la crise géorgienne permet au Kremlin de laver ce qu’il estime être l’affront des années passées. Dopé par les ventes d’hydrocarbures, le régime russe n’hésite pas à utiliser des moyens militaires là où sa diplomatie butait à imposer ses ambitions de politique étrangère. A commencer par l’élargissement de l’OTAN. Moscou s’est toujours opposé au développement de l’Alliance atlantique dans ce qu’il considère être sa zone d’influence naturelle. Autant dire que les révolutions géorgienne puis ukrainienne, qui ont porté au pouvoir des régimes pro-occidentaux soucieux de se rapprocher de l’OTAN, ont été très mal vécues à Moscou.

A titre d’exemple, c’est d’ailleurs en échange d’une promesse de neutralité permanente de la part de la Moldavie, que le Kremlin propose un plan de paix pour la Transnistrie, autre territoire séparatiste. La Russie estime ne pas avoir été entendue non plus concernant l’indépendance du Kosovo. Enfin l’installation en Pologne et République tchèque du bouclier antimissiles américain aura été l’ultime provocation. Plus largement, l’Irak pourrait être ajouté à la liste des dossiers sur lesquels la Russie considère avoir été bafouée.

Pour autant estime Isabelle Facon, chercheuse à la Fondation pour la recherche stratégique, il ne s’agit pas « d’une reconquête impériale » de la part de la Russie, mais plutôt « d’un message d’inflexibilité adressé à l’Occident », ainsi que « d’un signal adressé à ses voisins tentés par un trop grand détachement ».

Des liens maintenus

Nullement déstabilisée par les condamnations unanimes, la Russie annonce qu’elle protégera l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud si elles étaient attaquées.

Dès lors, l’ensemble des relations entre Moscou et l’Occident sont-elles menacées ? A priori non. Moscou suspend sa coopération avec l’OTAN dans plusieurs domaines, mais contrairement aux premières déclarations de l’un de ses ambassadeurs, continue d’autoriser le transit de vivres et d’équipements à travers son territoire vers l’Afghanistan. Autrement dit, des liens demeurent quand il existe un intérêt commun. Les relations avec l’OMC ont elles aussi tangué, mais là encore les menaces sont restées verbales.

A écouter

Pascal Boniface

Directeur de l'Institut des relations internationales et stratégique (IRIS)

« Pour la Russie, l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud est une sorte de "match retour" par rapport à l'indépendance du Kosovo reconnue par les Occidentaux ».

26/08/2008 par Anne Fauquembergue

Londres réclame une coalition

« Une décision injustifiable et inacceptable dit le ministre britannique des Affaires étrangères David Miliband ».

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