Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Crise financière

Des effets à craindre pour l’économie réelle

par Myriam Berber

Article publié le 15/10/2008 Dernière mise à jour le 15/10/2008 à 16:39 TU

Avec l’adoption des plans bancaires européens, puis du plan américain nouvelle mouture, la détente des marchés a pris de l’ampleur. Le souci numéro un désormais, c’est le danger de contagion de la crise financière à l’économie réelle.

A Londres, deux employées quittent la banque Lehman Brothers avec leurs cartons, le 15 septembre 2008.( Photo : AFP )

A Londres, deux employées quittent la banque Lehman Brothers avec leurs cartons, le 15 septembre 2008.
( Photo : AFP )


Des Etats-Unis à l’Europe, en passant par l’Inde et l’Afrique du Sud, les conséquences de la crise financière commencent à se faire sentir. Les Etats-Unis seraient entrés en récession, si l’on en croit la présidente de la banque de Réserve fédérale de San Francisco, Janet Yellen. Un point de vue partagé par bon nombre d’experts qui estiment que la récession est déjà là depuis le troisième trimestre, et qu'elle devrait y rester au quatrième trimestre ainsi qu'au premier trimestre de 2009. Avec des effets sur les entreprises. L'Américain Ford et le Japonais Mazda ont gelé leur projet d'une usine commune, en raison de la crise. Les entreprises commencent également à lancer des plans sociaux. Ainsi, le groupe agro-alimentaire américain Pepsico a annoncé, cette semaine, 3 300 suppressions d’emplois. Son grand voisin, le Canada, devrait également être touché. Son économie est extrêmement liée à celle des Etats-Unis qui absorbent près de 80% des exportations canadiennes.

En Asie, l’Indien Tata Steel, sixième producteur mondial d'acier, vient de perdre plus d'un milliard de dollars, en raison des investissements boursiers d'une de ses filiales. La première compagnie aérienne privée indiennes, Jet Airways a annoncé 1 900 suppressions d’emplois, soit 15% de sa masse salariale du fait de la crise. Aucune région du monde n’est épargnée. Hong Kong est sur le point d’entrer en récession tandis que la Chine voit chuter les prix des produits qu’elle exporte, dont l’acier. Entre le 6 et le 10 octobre, les cours de l’acier ont chuté de 12%. Du côté des pays émergents toujours, le ralentissement de l’économie mondiale commence à peser sur le secteur minier sud-africain. Les entreprises n’arrivent plus à trouver des financements internationaux pour les programmes de développement ou d’exploration des mines.

Multiplication des plans sociaux

En Europe, plusieurs études de conjoncture semblent démontrer que les pays de la zone euro vont affronter une récession engendrée par la crise des crédits hypothécaires à risques («subprimes »). L'Allemagne, première économie de la zone euro, table sur une progression du PIB de seulement 0,2%. Le pays, très orienté vers les exportations, va souffrir du ralentissement de la demande mondiale pour ses produits phares : les biens d’équipement. Les effets commencent à se faire sentir sur le marché du travail. A la fin de 2009, le pays devrait compter 350 000 actifs de moins. Le constructeur automobile allemand Daimler a d’ores et déjà annoncé, cette semaine, 3 500 suppressions d’emplois en Amérique du Nord.

Dans le deuxième grand pays de la zone euro, le ralentissement est bien réel. Depuis le 3 octobre dernier, la France est entrée officiellement en récession technique. L'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) fait état d’un recul de 0,3% de l’activité en France pour le deuxième trimestre et prévoit que la tendance se poursuive aux troisième et quatrième trimestres. Le PIB devrait baisser de  0,1%, selon l’Insee. Dans un contexte international plutôt difficile, tous les moteurs potentiels de la croissance se sont dégradés au printemps. Baisse de la production, Chute de la consommation des ménages et hausse du chômage. Selon l’assurance chômage, l’Unedic, il y aura  46 000 demandeurs d'emploi supplémentaires de plus cette année et 41 000 l’an prochain.

La construction de logements en baisse

Les mauvaises nouvelles commencent à s'accumuler du côté des entreprises. Le fabricant français de panneaux publicitaires JCDecaux, qui comptait se rapprocher de la filiale russe de son concurrent Américain News Corp, a renoncé à l'opération. Le premier fabricant de meubles français, Cauval industries, connu pour ses marques de matelas Dunlopillo et Tréca, a été placé sous procédure de sauvegarde en raison de problèmes de trésorerie liés à la crise financière.

Ailleurs en Europe, les craintes d’une contagion de la crise financière à l’économie réelle se confirment. L’Irlande, le premier pays européen à se déclarer en récession, a subi de plein fouet la crise immobilière. Cette année, la construction de logements devrait baisser de moitié par rapport à 2006. Au Royaume-Uni, la crise pèse lourdement sur l’emploi. Selon les chiffres officiels, le nombre de chômeurs a augmenté de 164 000 de juin à août, ce qui porte à 5,7% le taux de chômage britannique. Pour faire face aux pertes liées à la crise des subprimes, les banques cherchent à contrôler au maximum leurs coûts. Le Center for Economic Business Research prévoit plus de 10 000 licenciements dans la finance à la City d’ici à la fin de l’année.

Crise financière provoquée par les crédits hypothécaires à risques (« subprimes »), flambée des prix des denrées agricoles et du pétrole : la difficile situation économique commence à se faire sentir sur les plus pauvres. Le nombre d’Américains bénéficiant de bons d’aide alimentaire (« food stamps ») a approché un record cet été 2008. Quelque 29 millions de personnes aux Etats-Unis sont concernées. Ce chiffre est le plus élevé depuis que le programme a été mis en place dans les années 1960. De l’autre côté de l’Atlantique, en France, les permanences d’accueil du Secours populaire ont ainsi reçu 15 à 20% de demandes d'aides supplémentaires sur un an.

(Photo : Reuters/montage RFI)