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Israël /Territoires palestiniens

Un cessez-le-feu et après ?

par Monique Mas

Article publié le 19/01/2009 Dernière mise à jour le 20/01/2009 à 00:37 TU

La perspective des législatives de février prochain a pesé dans la décision du gouvernement Olmert de lancer le 27 décembre dernier l’opération « Plomb durci » contre le Hamas. Les électeurs s’avérant largement conquis par son offensive militaire, il a revendiqué la victoire pour justifier le cessez-le-feu unilatéral mis en œuvre le 17 janvier à minuit alors que le bain de sang palestinien éclaboussait le consensus occidental sur la légitime défense israélienne. En réponse, le Hamas a décrété une trêve d’une semaine dès le 18 janvier en début d’après-midi en réclamant la fin du blocus israélien, une manière de reprendre pied sur la scène diplomatique où la France et l’Egypte en particulier, mais aussi plus largement l’Europe et les pays arabes, promettent d’aider à la (re)construction matérielle et politique des Territoires palestiniens. Plus affaibli que jamais, le chef du Fatah et de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, s’est à son tour prononcé lundi en faveur d’un gouvernement d’union nationale avec le Hamas.

Un enfant palestinien à Beit Lahiya, au nord de la bande de Gaza, le 19 janvier 2009.(Photo : Reuters)

Un enfant palestinien à Beit Lahiya, au nord de la bande de Gaza, le 19 janvier 2009.
(Photo : Reuters)


« Ce qu'il faut, c'est un gouvernement d'union nationale qui mette en oeuvre la levée du blocus (israélien), l'ouverture des points de passage, et la reconstruction », a lancé Mahmoud Abbas, reprenant ainsi les revendications du Hamas, tout en ajoutant à la liste un vœu personnel : « la tenue simultanée d'élections présidentielle et législatives ». Il en espère visiblement la légitimité déniée manu militari en juin 2007 par le mouvement islamiste qui lui a arraché Gaza et sert depuis lors de repoussoir international jusque dans les rangs de la Ligue arabe. Celle-ci est en effet si divisée sur le Hamas qu’il aura fallu attendre, ce 19 janvier, 22 jours de feu ininterrompu contre les Palestiniens et le sommet du Koweit où vient de s’exprimer Mahmoud Abbas pour entendre les dirigeants arabes se prononcer sur l’offensive israélienne.

Les pays arabes appellent les Palestiniens à s'unir

« La Ligue arabe emmenée par l'Arabie saoudite et l'Egypte affiche sa solidarité avec les Gazaouites. »

20/01/2009 par Aurélien Colly

La gêne arabe explique largement le geste de l’Arabie Saoudite annonçant au Koweit un don d'un milliard de dollars pour la reconstruction de la bande de Gaza, ce qui correspondrait aux destructions immobilières estimées par certaines sources palestiniennes à quelque 500 millions de dollars et aux frais d’un montant équivalent à prévoir pour le déblaiement des gravats. Une forme de solde pour tout compte que cette contribution en espèces, diront les mauvais esprits. Reste que la facture politique sera infiniment plus lourde pour les Palestiniens et l’on comprend que le chef de la très virtuelle Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, estime aujourd’hui « judicieux et nécessaire de nous – c’est-à-dire le Fatah qu’il dirige et le Hamas en particulier – rencontrer immédiatement sur le sol égyptien ».

L'Egypte s'engage à verrouiller la frontière

Fort des relations de son pays avec Israël et de l’appui des Occidentaux, Européens et France en tête, en attendant l’investiture le 20 janvier de la nouvelle administration Obama aux Etats-Unis, le président égyptien Hosni Moubarak a lancé des invitations aux diverses factions palestiniennes (Fatah et Hamas surtout) et aux Israéliens auxquels il propose des entretiens séparés ce jeudi 22 janvier. Et de source israélienne citée par l’Agence France presse, l’Israël et l'Egypte seraient déjà parvenus à formaliser une entente pour empêcher la contrebande d'armes le long de la frontière avec la bande de Gaza en déclinant l’offre d’observateurs sinon de casques blancs étrangers dont ni l’un ni l’autre ne veulent.

Pour expliquer le cessez-le-feu unilatéral, le Premier ministre israélien Ehud Olmert assure que « l’opération Plomb durci a atteint ses objectifs et même au-delà ». Si elles ont affecté sa capacité de nuisance, les frappes israéliennes n’ont pas pour autant détruit l’ennemi désigné, à savoir la direction du Hamas qui bénéficie d’un regain de popularité et qui, jusqu’à plus ample information ne compterait qu’une poignée de morts. Quant aux troupes islamistes, estimées par Israël entre 15 et 20 000 hommes, quelques centaines de combattants « seulement » seraient tombés dans l’opération « Plomb durci ». Ce sont les civils palestiniens qui ont payé le plus lourd tribut, avec plus de 1 300 morts dont des centaines d’enfants et des milliers de blessés…

« Je n’ai pas de mots pour décrire ce qui s’est passé ici », avoue une urgentiste palestinienne, le docteur Noujoud Abudada.

Le bilan humanitaire dans la bande de Gaza

« Selon le Bureau central palestinien des statistiques, 4 000 bâtiments d'habitation ont été détruits mais aussi 48 immeubles gouvernementaux, 30 commissariats, 20 mosquées et 18 écoles. »

20/01/2009 par Frédérique Misslin

Une éclaboussure sanglante sur la vitrine de la « démocratie » israélienne qui voit plusieurs organisations humanitaires dénoncer des crimes de guerre israéliens à Gaza. Le prix d’une « légitime défense » israélienne qui n’a pas permis la libération du soldat Gilad Shalit enlevé en 2007 dans la bande de Gaza, qui fait globalement consensus en Occident mais jette des foules de manifestants dans les rues arabes. Un bain de sang qui creuse un peu plus le fossé entre Israéliens et Palestiniens, mais aussi entre Hamas et Fatah palestiniens.

Un cessez-le-feu unilatéral pour ne pas négocier avec le Hamas

Du point de vue israélien, celui par exemple d’un spécialiste des affaires de Défense et de Sécurité à l'Institut pour le Contre-Terrorisme d'Herzlyia comme Elie Karmon, « les dirigeants du Hamas auront beaucoup de mal à s'expliquer auprès de la population » de Gaza.

Elie Karmon, israélien et spécialiste des affaires de Défense et de Sécurité à l'Institut pour le contre-terrorisme d'Herzlyia

« La stratégie du bouclier humain a complètement échoué car le Hamas a décidé d'utiliser la population civile comme bouclier et Israël n'a pas eu le choix que de faire des attaques contre les magasins d'armement, dans les mosquées, dans des appartements privés où l'on a trouvé des tunnels... » 

19/01/2009 par Nicolas Falez


Echaudée en 2006 au Liban face au Hezbollah, l’armée israélienne n’a pas lésiné sur les moyens à Gaza pour anéantir en particulier le cordon ombilical économique et militaire reliant le territoire à l’Egypte via le réseau souterrain de Rafah, au sud. L’Egypte s’engage à verrouiller la zone et, pour le reste, les autorités israéliennes ont voulu un cessez-le-feu à leurs seuls conditions et bénéfices.

Pas question, selon Ehud Olmert, de négocier quoi que ce soit – une trêve par exemple – avec le Hamas qui a défaut d’être admis comme un interlocuteur se voit à nouveau offrir un strapontin par le chef du Fatah. Et derrière la volonté internationale affichée par l’Europe de donner aux Palestiniens les moyens de panser leurs plaies rien ne laisse vraiment espérer une volonté politique nouvelle de nature à ressusciter une quelconque « Autorité » palestinienne et à donner quelque viabilité à l’idée d’un Etat palestinien dont Israël puisse estimer qu’il ne menace pas son existence. De l’avis du spécialiste français de l’armée israélienne, Pierre Razoux, «le cessez-le-feu ne règle strictement rien sur le fond ».

Pierre Razoux, historien français, auteur de « Tsahal : une nouvelle histoire de l'armée israélienne » aux éditions Perrin

« L'armée israélienne est dans une situation qui lui permet d'étouffer le Hamas et d'empêcher pour l'instant la reconstitution de ses stocks militaires. »

19/01/2009 par Nicolas Falez

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