Article publié le 26/01/2009 Dernière mise à jour le 27/01/2009 à 09:09 TU
Avec notre envoyée spéciale à La Haye, Sarah Tisseyre
L’audience est ouverte |
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Pour la CPI, c’est un grand jour : plus de dix ans après l’adoption du Statut de Rome instituant la Cour pénale internationale, elle tient, enfin, son premier procès. L’accusé Thomas Lubanga est depuis trois ans déjà, dans sa cellule et voilà deux ans que les charges contre lui ont été confirmées.
Un grand jour, donc, d’autant que le procès a failli ne pas se tenir. Il devait s’ouvrir en juin dernier mais les juges ont alors décidé de suspendre toute la procédure, ils reprochaient au procureur de détenir plus de 200 documents obtenus auprès d’ONG et de l’ONU sous le sceau de la confidentialité. Ils exigeaient de pouvoir les consulter et d’en faire bénéficier la défense. La libération de Thomas Lubanga a même été, à un moment, envisagée. Il a fallu cinq mois pour résoudre la crise, des solutions ont été trouvées pour partager la quasi-totalité de ces documents tout en protégeant les sources.
Thomas Lubanga est jugé pour enrôlement et utilisation d’enfants soldats. Le bureau du procureur a prévu d’appeler 34 témoins à charge avant que la défense appelle les siens.
93 victimes seront aussi représentées par des avocats. C’est une première dans un procès international, une nouveauté parmi d’autres à défaut de présenter un accusé de haut rang, ce procès doit en effet mettre en place les pratiques de la Cour. Premier prisonnier de la CPI en 2006, Thomas Lubanga a pris l’habitude d’essuyer les plâtres.
Spécialiste des questions de justice internationale à l'organisation Human Rights Watch
« Pour l'affaire Lubanga, on a un peu plus de 90 victimes représentées par des avocats. Devant les autres tribunaux internationaux, les victimes étaient présentes mais uniquement en tant que témoins. »
Professionnel
Thomas Lubanga, le chef historique de la milice de l'Union des patriotes congolais (UPC), le 3 juin 2003 à Bunia.
(Photo: AFP)
A son arrivée à La Haye, en 2006, face aux juges, Thomas Lubanga, la quarantaine, s’était présenté comme politicien professionnel. En fait, il a d’abord été commerçant avant de devenir chef de guerre. Grand, mince, issu d’une famille modeste de la communauté Hema, il fonde en 2000, l’Union des patriotes congolais (UPC), alors que la guerre fait rage en Ituri.
Activement soutenu par l’Ouganda, puis par le Rwanda, l’UPC et son aile militaire, les FPLC constituent l’un des six groupes armés de cette région du nord-est de la RDC.
Selon l’accusation, il comptait plusieurs milliers de soldats dont un nombre significatif d’enfants de moins de 15 ans. A la tête de l’UPC, Thomas Lubanga s’empare d’importantes mines d’or et sa milice n’hésite pas à massacrer les civils de l’ethnie Lendou.
En 2003, ces hommes sont chassés de Bunia par la force européenne Artémis. Quelques mois plus tard, Thomas Lubanga rejoint Kinshasa, comme plusieurs chefs miliciens d’Ituri qui se sont engagés à rendre les armes, il s’est vu promettre un poste de général au sein de l’armée congolaise, il attend sa promotion dans un grand hôtel de la capitale.
Soupçonné de continuer à piloter ses troupes à distance, Thomas Lubanga est toutefois arrêté en 2005 après le meurtre de 9 casques bleus en Ituri. Emprisonné à Kinshasa, il est livré, un an plus tard, à la CPI.
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