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Hongrie

Un gouvernement de crise à Budapest

par Piotr Moszynski

Article publié le 15/04/2009 Dernière mise à jour le 15/04/2009 à 17:19 TU

Incidents mardi, le jour de l’investiture du nouveau gouvernement hongrois de Gordon Bajnai. Ils sont survenus à la fin d’une manifestation de l’opposition de droite. Celle-ci réclame des élections anticipées. La coalition au pouvoir les refuse, les sondages lui étant très défavorables.
Manifestation contre le nouveau Premier ministre et son gouvernement à Budapest, en Hongrie, le 13 avril 2009.(Photo : AFP)

Manifestation contre le nouveau Premier ministre et son gouvernement à Budapest, en Hongrie, le 13 avril 2009.
(Photo : AFP)


Des oies vivantes utilisées comme projectiles contre les forces de l’ordre, un manifestant à moto qui fait exprès d’entrer en collision avec plusieurs policiers, d’autres manifestants qui brûlent un drapeau de l’Union européenne, tout en crachant et en urinant dessus… Tous les moyens étaient bons pour exprimer son mécontentement lors du rassemblement de quelques centaines de sympathisants d’extrême droite mardi soir à Budapest. Ils ont d’abord participé à une manifestation plus large, et beaucoup plus pacifique, qui a réuni plusieurs milliers de personnes proches de l’opposition de droite pour protester contre l’accès au pouvoir du nouveau Premier ministre Gordon Bajnai, élu par le Parlement ce mardi après-midi. Une fois la manifestation principale terminée, quelques centaines de manifestants, dont des membres de la formation paramilitaire d’extrême droite « La Garde hongroise », ont refusé de quitter les lieux, décidés d’en découdre avec la police. Résultat : dix blessés, dont un grave, et onze interpellations.

 Subterfuge

Cela dit, au-delà d’incidents provoqués par les extrémistes, l’opposition a vraiment des choses à dire. La coalition au pouvoir, composée des socialistes et libéraux, est au plus bas dans les sondages et le Premier ministre sortant, Ferenc Gyurcsanyi, a été contraint à la démission car incapable de trouver une majorité parlementaire prête à soutenir son projet des réformes. Le moins que l’on puisse dire, c’est que dans les circonstances de ce genre, une revendication d’élections anticipées ne semble pas choquante. Et pourtant, la coalition gouvernementale a utilisé un subterfuge juridique pour les éviter. Elle a déposé une motion de censure constructive qui consiste à abolir le gouvernement, tout en proposant en même temps le nom du nouveau Premier ministre. Cette procédure, empruntée à la Constitution allemande, permet de changer rapidement de chef de gouvernement sans avoir recours aux élections anticipées. D’où, la colère de l’opposition.

Toutefois, il n’est pas certain que celle-ci ait vraiment intérêt à prendre le pouvoir maintenant, alors que la Hongrie fait partie des pays d’Europe centrale et orientale les plus touchés par la crise mondiale. Elle ne doit sa survie économique qu’à une aide d’urgence de 20 milliards d’euros, obtenue à l’automne 2008 d’institutions financières internationales. En contrepartie, Budapest s’est engagé à réduire ses dépenses. Ainsi, tout gouvernement, quel qu’il soit, devra prendre des mesures qui seront inévitablement très douloureuses et très impopulaires.

Un an, un gouvernement, un forint

Gordon Bajnai ne le cache pas et reste lui-même prudent quant aux perspectives de sa propre survie politique. Son principal slogan illustre bien les risques et les difficultés de sa tâche : « Un an, un gouvernement, un forint ». Il dispose en effet d’un mandat de seulement un an, jusqu’aux élections législatives du printemps 2010, pour conduire le pays avec un gouvernement de crise, composé principalement d’experts. Souhaitant sans doute donner l’impression de partager la crise avec la population, il s’est attribué un salaire symbolique d’un forint, environ 1/300e d’euro.

Il vaut mieux, en effet, ne pas apparaître comme baignant dans l’opulence quand on a l’intention de proposer, entre autre, le gel des salaires, la suppression du treizième mois au sein de la fonction publique et pour les retraités, ainsi que le retrait de nombreuses aides aux familles. C’est clair, une période très dure attend les Hongrois.